Article initialement publié en juin 2017
Pensez-vous que le secteur de l'économie collaborative tend à se structurer aujourd'hui, et notamment à reposer sur quelques piliers ?
En France, nous avons la chance d'avoir un secteur de l'économie collaborative assez dynamique. On y compte déjà plusieurs belles réussites, ce qui prouve que les Français sont assez friands du système D. On a en revanche assisté à de véritables effets de mode sur certains projets, des épiphénomènes, qui n'ont pas contribué à valoriser le marché, mais ce dernier commence à se structurer autour de quelques beaux projets dont l'impact positif sur la société n'est plus à prouver. Là ou le rôle de l'économie collaborative s'ancre vraiment dans l'économie française et tend à croitre, c'est dans les secteurs du transport, du logement, du prêt entre particuliers ou encore de l'assurance. La crise a propulsé l'économie collaborative sur le devant de la scène, et les secteurs un par un n'y échappent pas.
En revanche, il ne faut pas croire que l'économie collaborative repose uniquement sur un aspect financier, mais bel et bien aussi sur un aspect pratique : la majorité des services liés à l'économie collaborative offrent aujourd'hui aux consommateurs une flexibilité qu'aucun acteur traditionnel ne peut offrir. Si vous regardez Airbnb par exemple, les locataires peuvent très souvent négocier leur heure d'arrivée et de départ avec les propriétaires, tandis qu'un locataire de véhicule sur OuiCar pourra choisir d'aller récupérer une voiture à un endroit qu'il aura choisi, à l'heure qu'il aura décidé, ce qui n'est aujourd'hui pas forcément simple à mettre en place avec des hôtels pour le premier, et des loueurs traditionnels pour le second.
Les Français sont-ils pour autant prêts pour l'économie collaborative ?
On sent toujours une petite appréhension de la part des Français. Petit à petit les consommateurs se rendent compte qu'il est parfois plus facile de louer un objet à un particulier plutôt que de passer par des acteurs traditionnels. Il suffit de passer le cap pour en découvrir les réels avantages.
À relire : L’économie collaborative n’est plus un micro-phénomène. Les français enfin adeptes ?
On assiste en revanche encore à un problème de masse critique sur plusieurs offres et acteurs. Ces derniers peuvent désormais se targuer de concurrencer les acteurs traditionnels, mais n'arrivent pas encore, pour la plupart, à changer la donne car ils peinent à dépasser une masse critique pour offrir de vrais avantages à leurs utilisateurs et continuer à grossir. Une fois ce cap passé, le service proposé ne peut que s'améliorer et offrir de réels avantages à ses utilisateurs.
Et les pouvoirs publics ?
J'ai eu la chance d'échanger sur le sujet avec les gouvernements successifs. Ils sont dans l'ensemble intéressés par l'économie collaborative et en comprennent les enjeux mais cette volonté qu'à l'État de vouloir tout réguler est parfois contre-productive, car finalement les consommateurs n'y comprennent plus rien. Récemment, par exemple, la fiscalité liée au seuil de professionnalisation a été clarifiée (désormais, au dessus de 7800 euros par an, on devient professionnel). Nous étions assez demandeurs de cette clarification. mais les consommateurs n'ont rien compris à ça, et nous avons reçu beaucoup de retours au service client de personnes qui nous disaient par exemple avoir peur de dépasser le seul car ils ne voulaient pas payer de charges.
À relire : Quelle fiscalité et législation pour l’économie collaborative ?
Après, tout ça va se tasser, et chacun va trouver sa place. Le CNPA (conseil national des professionnels de l'automobile), qui était jusqu'ici assez réfractaire à l'économie collaborative, nous demande désormais de le rejoindre. Tous essaient de s'adapter, ils voient que l'économie collaborative peut être complémentaire à leur business, sans pour autant leur voler des clients.