L’écosystème de l’assurance a connu de fortes évolutions et l’arrivée des Insurtechs comme nouveaux acteurs laisse présager un bouleversement des codes du marché traditionnel. Que réserve 2017 au secteur de l'assurance ? Le cabinet de conseil Aurexia a compilé les tendances majeures qui, selon eux, marqueront l’année à venir…
Chaîne de valeur : fragmentation et spécialisation
Avec l’arrivée de nouveaux entrants et l’attente toujours plus forte de transparence, de personnalisation et de flexibilité, les consommateurs n’auront plus affaire à un seul acteur traitant l’intégralité de la chaîne de valeur mais à un ensemble de fournisseurs proposant des produits et des services spécifiques.
- L’expansion des assurtechs ou insurtechs positionnées sur une partie spécifique de la chaîne de valeur va s’accentuer. De l’innovation produit (Otherwise, l’assurance P2P à la française) à la fourniture de services à forte valeur ajoutée en passant par des solutions innovantes de relation client, le panorama des acteurs de l’ssurance continuera à s’enrichir. Les assureurs traditionnels ont compris l’intérêt de nouer des partenariats avec ces start-ups qui seront vecteurs de différenciation, d’acquisition et de fidélisation client. Covéa a ainsi récompensé Testamento pour le Prix InsurTech 2016, qui permet de réaliser un testament en ligne, sans passer par un notaire.
- De nouveaux modèles de distribution comme les plateformes participatives de mutualisation des risques, comme inspeer.me, ou les agrégateurs de produits et services d’assurance devraient également continuer à surfer sur la vague du numérique. Ainsi, même si le nombre d’acteurs explose sur la chaîne de valeur, le consommateur pourra bénéficier d’une vision agrégée de la meilleure réponse à son besoin. Certains marchés de niche, peu couverts en termes de distribution jusqu’à maintenant, devraient bénéficier de nouveaux entrants spécialisés. Coverwallet, par exemple, propose une solution automatisée accompagnant les PME dans la qualification de leurs besoins, la comparaison des offres du marché, la souscription et la gestion de leurs contrats.
Digitalisation : source de technologies innovantes pour les assureurs traditionnels
Le numérique et les technologies mobiles ouvrent aux assureurs de nombreuses possibilités dans la redéfinition de l’expérience client et dans l’optimisation des coûts. L’avènement du multicanal devrait encore améliorer l’interopérabilité des processus entre les canaux, comme l’a fait Natixis Assurances en proposant la déclaration de sinistres par sms.
- Les acteurs vont expérimenter et généraliser de nouvelles solutions de relations client. Les chatbots (expérience en cours entre Aviva et Alexa) et les interactions conseillers-clients en réalité augmentée continueront à apparaître en avant-vente, en gestion de contrats et de sinistres ou encore dans le cadre d’actions de prévention. PNB MetLife en Inde utilise déjà la réalité augmentée pour promouvoir l’assurance vie auprès des plus jeunes avec la solution ConVRse. En France, le Groupe APICIL l’utilise pour faciliter la prise de contact des commerciaux avec ses clients. La gamification constitue également un levier important pour toucher de manière ludique des cibles plus jeunes et multiplier les occasions de contact avec les clients.
- Les objets connectés ont été, au départ, utilisés sur le marché de l’assurance Auto pour permettre la tarification comportementale comme le « Pay how you drive ». Direct Assurance a d’ailleurs été l'un des premiers à lancer l’offre YouDrive. Aujourd’hui, ce sont les solutions autour de la maison intelligente qui connaissent le plus grand essor. Macif protect, par exemple, comprend un équipement de surveillance à distance : caméra consultable sur smartphone, centrale d’alarme ou éclairage activables à distance, …. La technologie connectée est aussi utilisée en santé, comme chez Generali avec Vitality qui permet de suivre le bien-être des salariés de ses entreprises clientes (suivi et recommandations sur l’alimentation et le mode de vie, …). C’est l’opportunité pour les assureurs d’apporter des services complémentaires hors assurance à l’assuré et d’intensifier les interactions avec lui.
Evolution des usages : nouveaux besoins à assurer et innovation produit
De nouveaux risques apparaissent avec les modes de consommation actuels, incitant les assureurs à innover dans leurs offres.
- Avec le développement de l’économie collaborative, le secteur de l’assurance a vu de nouveaux partenariats apparaître : Axa et Blablacar, Allianz et Drivy, MAIF et GuestToGuest. Axa propose d’ailleurs une assurance Ma Mobilité Auto qui permet d’assurer le prêt d’une voiture pour une courte durée. Sources de revenus complémentaires, ces assurances liées à des besoins spécifiques et courts termes nécessitent de nouvelles modélisations de risques et de tarification sans pouvoir bénéficier d’un historique important de données.
- Avec les Certificats Mutualistes, les assureurs souhaitent, grâce à ce nouveau produit, renforcer la relation sociétaire dans une logique de diversification ou d’augmentation de leurs fonds propres. Les Caisses Régionales de Groupama et AG2R La Mondiale ont par exemple lancé leurs émissions récemment et il y en aura probablement d’autres à venir.
- Les assurances affinitaires répondent aux nouveaux besoins de couverture personnalisée souhaitée par les consommateurs et sont également une opportunité de nouveaux leviers de croissance pour les assureurs. Axa s’est, par exemple, rapproché de Trov pour proposer une assurance qui couvre les objets personnels.
- Parce que les assureurs doivent multiplier les occasions de contact avec leurs clients et leur apporter toujours plus de valeur, le marché ne manque pas d’originalité dans la proposition de nouveaux services qui sortent du domaine habituel de l’assurance. Le partenariat Matmut et Cbien permet de réaliser un inventaire de ses biens mobiliers quand MAAF propose un Assistant Air qui donne des informations sur la qualité de l’air.
Data mining et assurance : l’affinement des modèles prédictifs
Même si la collecte et l’utilisation des données personnelles restent controversées et règlementées, les assureurs souhaitent affiner encore davantage leurs modèles en utilisant la mine d’informations mise à leur disposition. Les sources de données se multiplient, permettant aux acteurs d’identifier de nouvelles variables explicatives, comme c’est le cas entre les domaines bancaire et assurantiel pour les bancassureurs par exemple.
- Grâce aux technologies connectées, les assureurs peuvent bénéficier d’informations en temps réel. Ce caractère instantané est un moyen d’enrichir au fil de l’eau les modèles statistiques en identifiant plus rapidement les facteurs de risques (les conditions routières et climatiques) et en informant les assurés. C’est le cas du français Meteo Protect qui, via la collecte de données en instantané, offre aux entreprises et aux institutions des produits de couverture financière qui indemnisent quand la météo impacte leur chiffre d’affaires.
- Les domaines d’application du data mining sont essentiellement de trois ordres pour les acteurs de l’assurance : l’élaboration et l’affinage des modèles prédictifs de management du risque (exclusions de certains risques pour réduire la sinistralité) mais également d’identification des besoins (parcours d’équipement, suggestions commerciales pour le conseiller, personnalisation du parcours client en fonction de ses usages, …). Enfin, l’utilisation des données peut servir le domaine sinistre pour améliorer la détection des fraudes comme pour optimiser la gestion des indemnisations.
RPA et Blockchain : nouveaux leviers de rentabilité et d’optimisation
En quête de leviers d’optimisation de leurs processus et de gains de productivité, les assureurs vont continuer à exploiter les techniques d’automatisation qui sont déjà mises en application dans le secteur financier.
- La RPA ou Robotic Process Automation, consiste à faire reproduire par un robot des tâches standard et récurrentes réalisées par des humains. Les champs d’application en assurance sont nombreux et encore inexploités. Fukoku Mutual Like Insurance utilise notamment la technologie Watson d’IBM pour la gestion des remboursements de santé.
- Les acteurs de l’assurance portent également un intérêt croissant pour la technologie Blockchain qui pourrait permettre à plusieurs parties d’exécuter des contrats digitaux (smart contrats) et des transactions de manière sécurisée, transparente et vérifiable. La startup française Stratumn présentait récemment son prototype LenderBot, une plateforme de prêt d’objets entre particuliers fonctionnant de manière autonome, jusque dans la souscription de l’assurance, grâce à la technologie Blockchain.
Les enjeux pour 2017 sont donc colossaux pour les assureurs qui devront étudier les opportunités à surfer sur ces nouvelles tendances. Leurs méthodes de travail voire leur organisation sera à adapter : entités pilotes dédiées en interne, coordination des initiatives groupe, approche collaborative, coworking, travaux menés en «Test and Learn».