Face à la demande excessive de produits carnés, l’insecte semble la meilleure des alternatives. C’est en tout cas ce que croit la startup Ynsect. Rencontre avec son co-fondateur Alexis Angot à l’occasion de la sortie du MaddyInsights Food&Tech.
La demande en produits carnés augmente drastiquement, tirée par la démographie galopante, ainsi que par l'amélioration des conditions de vie de certaines populations qui leur facilite ainsi l'accès à la viande. Cette demande augmentera ainsi de 75% d’ici à 2050 pour atteindre une production annuelle de 470 millions de tonnes (rapport How to feed the world in 2050 de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture). A court terme, c’est en revanche l’aquaculture qui verra sa production le plus augmenter.
Soit autant d’animaux supplémentaires qui seront demandeurs de protéines de qualité. Or, la production actuelle de protéines n’est pas suffisante pour répondre à ces enjeux. Surtout que certaines sources se tarissent, notamment les farines de poissons, issus de la pêche de petits poissons pélagiques, dont les prix ont ainsi été multipliés par cinq en quinze ans, et dont les stocks sont en danger.
« Il y a urgence pour développer des sources alternatives de protéines, de grande qualité et à prix compétitif », rappelle Alexis Angot, Co-Fondateur d’Ynsect
C’est là qu’interviennent les insectes.
Les insectes à l'assaut de nos assiettes
Nous assistons à une réelle révolution agricole. La dernière fois qu’une filière animale faisait son apparition dans nos systèmes économiques internationaux, c’était il y a environ 50 ans, avec le passage de l’aquaculture de systèmes de production traditionnels vivriers et locaux à une production globale répondant aux besoins quantitatifs et qualitatifs des filières alimentaires mondiales. La filière insecte vit la même « mue » aujourd’hui et verra sa production éclore d’ici dix ans en Asie, en Europe, en Afrique et en Amériques , après une production traditionnelle à petite échelle répandue en Asie. C’est une filière qui sera par essence durable, à de multiples égards :
- Par la valorisation de biomasse ou aliments sous-utilisés ou gaspillés. Demain on pourra par exemple transformer le bois en protéines. Certains insectes en sont capables !
- Par la consommation très réduite de ressources par ces insectes, que ce soit en biomasse, en eau, en surface de production ;
- Par le développement de technologies garantissant la plus haute qualité sanitaire et environnementale des produits finis comme les protéines, notamment par l’absence de produits chimiques dans les procédés de transformation, ou l’utilisation de technologies automatisées permettant une grande productivité tout en préservant le bien-être des insectes.
Les insectes peuvent ainsi être transformés en différents produits : protéines, huiles, diverses molécules spécifiques telles que les polymères, pigments, phénols,…
Les premiers marchés ciblés par Ynsect sont donc ceux de la nutrition des animaux de compagnie (la seule officiellement autorisée officiellement en Europe à l’heure actuelle) et des poissons d’élevage (protéines et lipides principalement).
Puis viendront les marchés de l’alimentation des volailles et des porcs. Et enfin, l’alimentation humaine. Le nutraceutique (produit vendu sous forme de comprimé et ayant des effets positifs sur le corps) et les biomatériaux sont également des relais de croissance à moyen et long termes. Par exemple, la chitine (une molécule de la famille des glucides) présente dde ans l’exosquelette des insectes pourrait être utilisée dans la fabrication de certains plastiques techniques.
Et demain ? Le prochain défi à court terme pour Ynsect sera la construction d’un démonstrateur de niveau industriel (>1T/jr de larves produites) de ses technologies encore actuellement au stade de pilote.
« Ce démonstrateur est une étape cruciale dans la naissance de cette nouvelle industrie de l’insecte. Cette unité sera composée d’un atelier d’élevage d’une espèce locale de scarabée, le Tenebrio molitor, nourri à partir de sous-produits végétaux régionaux uniquement, essentiellement des fibres de céréales - substrats peu digestes pour les animaux monogastriques et donc peu valorisés - et des sous-produits de leur transformation telles que les chutes de production des biscuiteries, souvent gaspillées », explique Alexis Angot, Co-Fondateur d’Ynsect
Par la suite, viendra un atelier de transformation, qui transformera des larves, après leur abattage, en trois produits principaux : une poudre de protéines, une huile et une poudre de chitine. S’il n’y a plus de doute sur l’arrivée imminente d’insecte dans nos assiettes, le prochain chantier, de taille, consistera à rassurer le consommateur et ancrer cette pratique dans les mœurs.
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