Maddyness a souhaité expérimenter un nouveau type d'article. Il s'agit de poser une question, que se pose la rédaction, à 2 investisseurs (BA ou VC) ainsi qu'à 2 entrepreneurs. Pour cette première publication, nous remercions Jérémie Berrebi (Kima Ventures), Jean-David Chamboredon (ISAI), Cédric Giorgi (Cookening) et Patrice Lamothe (Pearltrees) d'avoir pris le temps de répondre à cette question.[hr]
Pourquoi tout le monde dit bravo à une startup qui vient de lever des fonds? Alors qu'elle vient de perdre une partie de son capital?
Jérémie Berrebi
Parce qu’elle a désormais les moyens de se développer... Il vaut mieux avoir 70% de 100 que 100% de 10. Maintenant, il est clair que lever des fonds n’est pas une fin en soi, que le début d’une aventure!
Jean-David Chamboredon
Une levée de fonds n'est bien sur qu'une étape pour une startup et seule l'histoire post-levée dira si les félicitations sont meritées ou pas. Ceci dit, c'est une étape au cours de laquelle un "tiers", le nouvel investisseur, affirme sa conviction sur le potentiel de la startup dans laquelle il investit, a une valorisation plus représentative de la valeur future de la société que de sa valeur instantanée.
Une levée de fonds notifie donc à l'entrepreneur (et à l'écosystème) que des acteurs avertis valident la thèse que l'entrepreneur porte... Cette thèse peut s'avérer fausse mais elle est dorénavant supportée par un groupe d'associés plus large et des moyens financiers sont disponibles pour la concrétiser...
Quant à la dilution subie par les actionnaires de la première heure, la question est simple: vaut-il mieux avoir 10% d'une société qui vaudra 100 millions ou 100% d'une société qui vaut et vaudra intrinsèquement au mieux 100.000 euros ? La réponse est dans la question, non ?
Si la réponse n'est pas pertinente, la société concernée n'est pas faite pour lever du capital risque !
Patrice Lamothe
L'objectif d'une startup est de développer le produit le plus innovant possible, le plus vite possible, sur le marché le plus large possible. C'est le sens même du mot "startup", ce qui la distingue du modèle traditionnel, où une entreprise cherche à être immédiatement rentable, puis à croître progressivement, en fonction de sa capacité d'auto-financement.
Pour une startup, la préservation du capital n'est donc pas une préoccupation centrale, alors que l'accélération et la capacité d'innovation que fournissent les levées de fonds sont essentielles. Chaque levée est l'annonce d'une nouvelle étape et normalement la preuve que les précédentes étapes ont bel et bien été franchies. En ce sens, les bravos sont largement mérités.
Cela dit, il ne faut jamais oublier qu'une levée n'est pas un but en soi: c'est une nouvelle ligne de départ, pas un drapeau d'arrivée!
Cédric Giorgi
Alors, déjà, je n'aime pas du tout le fait de voir ça comme une perte de capital. Par contre, je comprends la question, je me la suis moi aussi posée. Pourquoi féliciter une levée de fonds, alors que la levée n'est clairement pas une fin en soi, clairement pas un milestone important en terme d'avancée du produit, de changement des usages etc.
La réponse est je pense très simple. La levée est un parcours du combattant. rien n'est jamais simple, rien n'est jamais acquis. Donc on dit bravo car l'écosystème sait que c'est un parcours semé d'embûches. (Et tout le parcours d'entrepreneur est semé d'embûches, mais la levée est une embuche identifiable et reconnaissable de l'extérieur).
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