Frédérique Clavel, Présidente de l'APCE et de Fédération Pionnières - un réseau d'incubateurs et pépinières au féminin de solutions innovantes - récemment nommée par Fleur Pellerin à son poste, revient pour Maddyness sur l'entrepreneuriat au féminin à l'occasion de la journée de la femme. Si la situation tend à s'améliorer - et les nombreux évènements organisés aujourd'hui comme la journée de la femme digitale le prouvent - elle reste encore précaire pour de nombreuses entrepreneuses, un constat que veut combattre Frédérique Clavel au travers de ses actions et en demandant un engagement plus ferme de la société envers elles.
#1 Pouvez-vous nous dresser un état des lieux de l'entrepreneuriat au féminin?
Les femmes représentent un potentiel d’énergie et de talents encore insuffisamment libéré aujourd’hui. Certes, la situation s’est améliorée depuis 2003, date à laquelle le projet Pionnières a démarré. A l’époque, 3 éléments m’avaient sauté aux yeux : on comptait moins de 5% de femmes dans les incubateurs, ceux-ci étaient uniquement destinés à l’accompagnement de start-ups techno alors que le secteur d’activité majoritairement concerné par la création d’entreprise par les femmes était, et est encore, celui des services.
"Les femmes représentent un potentiel d’énergie et de talents encore insuffisamment libéré aujourd’hui" Frédérique Clavel
J’ajouterai à ceci un élément très important : la difficile reconnaissance, à l'époque, de l’innovation de services qui reste un de mes chevaux de bataille ! Quand nous avons ouvert les portes de l’incubateur Paris Pionnières, le premier incubateur en France dédié à l’accompagnement des projets portés par des femmes, grâce au soutien de Christian Sautter à la Mairie de Paris, l’offre a créé tout de suite de la demande. Et très vite le modèle a été dupliqué en Normandie, au Maroc. Aujourd’hui le réseau des Pionnières compte 13 implantations en France et 5 à l’étranger.
#2 Une situation qui s'améliore pour les femmes entrepreneuses?
Oui et non. Les entreprises créées par les femmes évoluent positivement car le taux atteint 38% contre 30% il y a quelques années. Cependant en ce qui concerne l’innovation ou les projets financés par le capital d’amorçage, la part des femmes est plutôt inférieure à 10%. Pour une France qui veut doubler le nombre de ses ETI en cinq ans il y a un bon réservoir de potentiel au féminin...
#3 On voit une augmentation visible des structures et qui leur sont dédiés, est-ce un véritable mouvement de fond?
Beaucoup d’augmentation d’évènements car le thème est porteur, beaucoup de réseaux féminins, Grandes écoles, EPWN, BPW et bien d’autres. En ce qui concerne les outils d’accompagnement et de financement il y en a trop peu ! C’est dommage mais les moyens publics et privés manquent cruellement.
#4 Comment voyez-vous l'avenir pour ces femmes?
Vers un accompagnement toujours plus grand? L’avenir est forcément plus brillant pour celles qui sont accompagnées puisque le taux de pérennité pour celles-ci est de 80% contre 50%... Nous avons des accords avec des organisations pratiquant le mentoring des entrepreneurs pour faire suite à notre action. Paris Pionnières monte son réseau de « marraines ».
"Nous avons besoin d’une véritable politique d’appui à l’entrepreneuriat féminin qui soit portée au plus haut niveau de l’état avec des moyen dignes de cette ambition" Frédérique Clavel
#5 Le réseau des Pionnières s'élargit d'année en année, des nouveautés sont-elles à prévoir dans le réseau?
Le réseau s’élargit avec de très faibles moyens et une énergie débordante. Nous sommes sollicitées de toutes parts en France comme à l’étranger. Nous ne pouvons pas répondre à toutes ces demandes. Nous avons besoin d’une véritable politique d’appui à l’entrepreneuriat féminin qui soit portée au plus haut niveau de l’état avec des moyen dignes de cette ambition. Pour fabriquer des entreprises solides, ambitieuses, pérennes et créatrices d’emplois stables, il faut trois ingrédients : information/sensibilisation, accompagnement, financement.