Article initialement publié en avril 2020
Les difficultés traversées par les entreprises en France sont évidemment exogènes. C’est bien la crise sanitaire qui a amené une crise économique, dont la puissance est sans précédent depuis 1945. Une “crise artificielle” en quelque sorte, où la machine économique est suspendue pour préserver la santé de la population. Le Covid-19 bouleverse durablement le rapport au travail des Français·es et il est source d’enseignements pour les entreprises.
Renforcer l’usage du télétravail
Au plus fort du confinement, 45% des actifs ne travaillaient plus du tout, selon un sondage Odoxa Consulting du 9 avril 2020, seulement 1 sur 4 se rendait encore au travail, les autres exerçaient en télétravail. Si sa pratique a explosé, une fracture territoriale demeure : 41% des actifs télétravaillent en Île-de-France contre seulement 11% en Normandie, par exemple. Plus généralement, le télétravail a maintenu l’activité des cadres, alors que les employés et salariés l’ont soit perdu, soit se trouvent contraints à exercer en " présentiel ".
La crise met donc en lumière les capacités, mais aussi les disparités technologiques de nos entreprises à s’adapter à leur environnement. En sortie de crise, une réflexion de fond devra être engagée pour aider les différents secteurs à s’équiper, donc à pousser plus loin, les dispositions de la Loi PACTE qui a donné un cadre légal au télétravail. En effet, il est probable qu’il s’imposera comme une pratique beaucoup plus généralisée ; les trois-quarts des Français·es souhaitant qu’il se développe davantage à l’avenir (76% selon le même sondage).
Dans une économie intégrée où les entreprises sont pour la majorité, exposées au contexte international tant sur le plan de l’approvisionnement, de la circulation des biens, des personnes et des flux monétaires, la solidarité doit s’exercer. C’est-à-dire, qu’elles devront partager et développer l’effet réseau entre elles.
Des solutions par secteur ?
Si l'activité a redémarré dès le 11 mai en France, toutes les entreprises n'ont pas répondu immédiatement et de concert. Leurs activités sont de nature complémentaires d’un point de vue macroéconomique. Pour autant, chacune à ses spécificités propres. Par ailleurs, la mise en place de la distanciation sociale et des gestes barrières génère des adaptations et des nouvelles charges - notamment dans le secteur du BTP, déjà touché par le blocage des matières premières aux frontières et l’arrêt des chantiers. Près de 90% des chantiers ont ainsi été mis à l’arrêt en France, selon la Fédération Nationale des Travaux Publics (8000 entreprises et 300 000 salariés). Leur logistique va être également perturbée, comme pour toutes les PME et ETI en général, encore plus spécifiquement dans le commerce et l’automobile.
Enfin, s’agissant du e-commerce, les négociants ou commerçants qui s’étaient déjà numérisé ou qui ont opté pour ce processus durant la crise bénéficieront d’une nette avance dans la poursuite de leur activité. Les avantages du e-commerce, de la dématérialisation, des flux et des outils collaboratifs ne sont plus à prouver.
Dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration, dont les établissements sont autorisés à rouvrir dès mardi, les précautions sanitaires devraient être très lourdes là aussi, alors que les coûts fixes resteront inchangés, voire massifs. Par conséquent, l’économie peut se réactiver mais son fonctionnement habituel ne pourra être restauré en partie que par une souplesse propre à chaque secteur d’appartenance. Enfin, le Covid-19, source de risques psycho-sociologiques ne disparaîtra pas des consciences du jour au lendemain. 7 actifs sur 10 disent avoir peur d’attraper le virus en retournant au travail (71%). Cette tendance pèsera sur la reprise.
Quel plan de trésorerie ?
Au delà des aspects sanitaires qui priment sur tout, la sortie de crise imposera de nouveaux plans de gestion pour les entreprises. En plus des aides de l’État, du prêt sans garantie et des dispositifs de soutien, il sera indispensable de mettre en place un plan prévisionnel de trésorerie dans chaque structure économique. Il visera indéniablement à la survie de l’entité et à son redressement en sortie de crise. Ce plan de trésorerie risque toutefois d’être complexe à élaborer, dans la mesure où l’augmentation de l’endettement de chacun, se traduira probablement, dans certains secteurs, par une augmentation des primes de risque. Les imprévus vont se multiplier.
Il convient donc de réaliser trois scénarios : pessimiste, réaliste et optimiste. De plus, de bonnes pratiques, comme le report à l’amiable ou la négociation d’un échéancier, donnera une vision claire des fluctuations possibles.
Une seule certitude pour l’heure : cette crise bouleverse la manière dont les entreprises s’organisent, travaillent, interagissent. Mais une chose est certaine : le numérique, la dématérialisation et les outils de gestion en ligne seront en mesure d’apporter des réponses à ces immenses défis, en rapprochant les individus et en créant de nouveaux services entre les acteurs économiques.
Antoine Sentis est directeur marketing et communication du Groupe EBP