Décryptage par Maddyness, avec Google
12 novembre 2019
12 novembre 2019
Temps de lecture : 7 minutes
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Un échec en vaut-il un autre ?

Il faut parfois en passer par un bon gros plat pour obtenir ensuite la note maximale en performance artistique. Mais tout le monde ne se remet pas d’un gadin de la même façon.
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Echouer un peu, beaucoup, passionnément, à la folie… ou pas du tout ? S’il suffisait d’une recherche Google pour éviter l’échec, cela se saurait. 

 

Tous les entrepreneurs ont dû rebondir à un moment ou un autre de leur projet, assure sans préambule Isabelle Saladin, fondatrice de l’association Les Rebondisseurs, qui préfère le terme de rebond à celui d’échec. Il peut s’agir d’un petit rebond, comme un pivot, mais aussi d’un rebond plus important si l’on a planté sa boîte.” Echec, fail, plantage, peu importe comment on l’appelle, l’essentiel est donc de savoir s’en remettre ! Mais la remontada est-elle possible après n’importe quel fiasco ?

En théorie, la réponse est un grand oui. “Les entrepreneurs savent qu’ils peuvent tout perdre, c’est inhérent à la démarche entrepreneuriale, rappelle Isabelle Saladin. Mais quand ça arrive, il faut faire un effort d’analyse pour en tirer du positif.” Un parti pris qui fait écho au mantra de Lao Tseu : “l’échec est le fondement de la réussite”. Les investisseurs, rompus aux affres de l’entrepreneuriat, valorisent de plus en plus ces acquis de l’expérience, au risque que cela pénalise les primo-entrepreneurs, parfois jugés trop “verts” pour diriger une wannabe licorne.

Assumer l’échec

Dans la pratique, certains échecs sont plus difficiles à encaisser que d’autres. “Quand il y a de l’affect, c’est terrible”, souligne la fondatrice des Rebondisseurs. Clients à rembourser, employés à licencier et associés à gérer constituent autant de fardeaux dont les entrepreneurs en perdition ont à s’acquitter. Souvent dans la douleur, les premiers employés étant devenus des amis ; la rupture entre associés s’apparente à l’explosion d’une famille. Douleur à laquelle il faut ajouter le sentiment de culpabilité de l’échec, loin d’être encore normalisé dans l’Hexagone. “Le fondateur n’est jamais responsable à 100% de l’échec mais il est celui qui doit l’assumer parce que son rôle était d’anticiper et de limiter les risques. Le chef d’orchestre n’est certes pas le premier violon mais si celui-ci se plante, cela relève de sa responsabilité”, illustre Isabelle Saladin.

Tous les entrepreneurs ne sont pas égaux face à l’échec. La pente à remonter est plus raide pour certains, comme les fondateurs issus de catégories socio-professionnelles peu aisées. “C’est notamment le cas des dirigeants de TPE et PME, souvent plus âgés que les fondateurs de startups et provenant de milieux moins favorisés. Dans leur génération, la réussite sociale est étroitement associée au travail et les conséquences d’un échec en la matière sont donc plus radicales”, observe Isabelle Saladin. Au contraire, pour les startuppers, dont beaucoup viennent au contraire des CSP supérieures, l’échec est moins stigmatisant à la fois socialement et financièrement.

D’un point de vue business, tous les échecs ne garantissent pas non plus les mêmes chances de rebond. La plateforme d’information et d’analyse financière CBInsights s’est penchée sur les raisons pour lesquelles les startups échouaient. Après avoir disséqué une centaine de billets de fondateurs rédigés post-mortem, elle en a tiré, l’an dernier, une liste de 20 principaux écueils. Les trois premières causes, toutes citées par plus d’un entrepreneur sur cinq, sont emblématiques des difficultés des entrepreneurs à surmonter certaines mauvaises passes.

L’absence de marché : l’échec radical ?

C’est la principale cause d’échec des startups : 42% des startups analysées par CBInsights se sont finalement rendues compte qu’il n’existait pas de marché pour leur produit ou leur solution ou que le marché n’est pas assez mature. Richard Ollier, fondateur de Giroptic, a ainsi décliné un grand classique de la rhétorique entrepreneuriale lors de la liquidation judiciaire de l’entreprise : “nous étions en avance sur notre marché. Notre tort est finalement d'avoir sans doute eu raison trop tôt”, estimait-il dans une interview accordée à nos confrères des Echos.

On pourrait penser qu’une technologie qui n’a pas trouvé de clients ne mérite rien d’autre que d’être remisée au fond d’un placard - et les entrepreneurs qui la portaient avec. Heureusement, l’exécution primant sur l’intention, certains projets trouvent un second souffle à l’instar de Giroptic, finalement rachetée par l’Américain Openframe. Les caméras à 360° n’ont pas convaincu le grand public ? Elles seront utiles aux agents immobiliers pour leur permettre de faire visiter les biens à distance ! Comme le disait Antoine Lavoisier, “rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme”.

Même les belles histoires de l’entrepreneuriat français comportent leur part d’ombre. Ainsi, lorsqu’ils ont essuyé refus sur refus de la part des investisseurs, les fondateurs de ce qui allait devenir Zenly auraient pu se décourager. Mais leur application, baptisée Alert Us et initialement destinée à localiser son enfant pour garantir sa sécurité, allait finalement décoller en se transformant en réseau social basé sur la géolocalisation. Au point d’intéresser le géant Snap qui a racheté l’entreprise en 2017 pour 213 millions de dollars (238 millions d’euros). Sacré rebond !

Plus d’argent, plus d’élan

Autre problème récurrent pour les startups : se retrouver à cours d’argent. Près d’un tiers des échecs (29%) sont liés à des fonds de tiroirs désespérément vides. Les causes peuvent être multiples : problèmes de gestion, technologie pas suffisamment aboutie pour intéresser les investisseurs, concurrence trop rude… Toujours est-il que quand il n’y a plus d’argent, il n’y a plus d’élan.

Nous n’avons plus d’argent et n’avons pas pu trouver les fonds nécessaires pour continuer notre activité”, se désolait Pierre Lebeau, créateur du robot Keecker dans son message annonçant en mars dernier la fermeture de la société éponyme. L’échec est amer pour l’entrepreneur, qui estimait dans son billet que son rêve “n’était pas mauvais, nous avons juste essayé de solutionner un très gros problème avec des moyens limités et n’avons pas pu financer notre vision suffisamment bien”. Même constat pour Afrostream, qui a baissé le rideau à l’automne 2017 : sauvée une première fois du gouffre par une levée de fonds, la startup a finalement périclité lorsqu’elle n’a pu trouver de nouveaux investisseurs.

Mais la fin d’un projet n’est que le début d’un autre. Et s’il n’y a pas d’argent pour un projet, il y en aura à profusion pour un autre. Rappelons-nous que si la Terre ne s’est pas créée en un jour, les géants technologiques non plus ! Et nombre d’entrepreneurs ont dû essuyer des revers avant de connaître (enfin) la lumière. De quoi inspirer aux Shadoks cette devise fort peu mathématique : “plus ça rate, plus on a de chances que ça marche”.

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Pas toujours que des numéros 10 dans la team

Troisième écueil, et pas des moindres, pour les startups : ne pas avoir la bonne équipe, qui a pesé dans près d’un quart des échecs (23%). Comme l’a rappelé Isabelle Saladin, c’est probablement l’une des causes les plus cruelles de l’échec d’un projet. Comment imaginer que celui ou celle qui a été un·e ami·e merveilleux·se ne soit pas l’associé·e ou l’employé·e idéal·e ? Du papier à la réalité, il y a un gouffre parfois trop abrupt pour être franchi.

C’est une des nombreuses raisons qui ont poussé Big Moustache dans ses retranchements, il y a trois ans. Alors que l’entreprise a été fondée par deux associés, Nicolas Gueugnier, CEO de la startup, s’est retrouvé seul aux commandes en pleine tempête, alors que son acolyte a préféré quitter le navire. De quoi faire sérieusement tanguer l’embarcation lorsqu’elle nécessitait au contraire le plus de stabilité possible. Au bord du naufrage, l’entreprise avait redressé la barre grâce à l’investissement de Sia Partners et coule désormais des jours heureux.

Le vrai secret, c’est de communiquer dès le départ et ne rien se cacher, avance Isabelle Saladin des Rebondisseurs. Entre les fondateurs, c’est comme dans un couple : il faut des bases saines, être certains d’être alignés sur les objectifs du projet. Une entreprise peut décoller très vite… mais se crasher tout aussi rapidement en cas de désalignement des valeurs.” Ne confondez donc pas vitesse et précipitation : consolider les fondations est une étape indispensable pour bâtir un succès dans la durée.

L’échec est donc une étape si ce n’est incontournable du moins enrichissante pour les entrepreneurs. Une maigre consolation, diront les mauvais esprits. Mais un mal nécessaire pour ne pas reproduire les erreurs passées, répondront les plus sages : c’est en touchant le fond que le rebond est possible.

Maddyness, partenaire média de Google

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