Republication du 24 juillet 2019
Aujourd’hui, quand on pense au freelancing (hors économie à la demande), on pense surtout aux compétences en informatique: développeur web, graphiste, designer, etc. Mais vous serez surpris de voir l’étendue des métiers qui peuvent être exercés sous ce statut. De nombreuses personnes rêveraient de pouvoir passer de salarié à freelance mais prétextent que leur métier n’est pas compatible. La plupart du temps, c’est une erreur : dans mon entourage, certains exercent des métiers assez peu répandus sous le statut freelance (responsable RH par exemple) et cela fonctionne très bien pour eux !
Pour vous convaincre que vos compétences sont convoitées, faites quelques recherches ; par exemple sur les plateformes Malt ou Crème de la Crème. Vous verrez qu’on trouve vraiment de tout. Le plus difficile, c’est d’être en mesure de trouver des missions de façon durable, et de passer freelance en connaissance de tous les avantages et les inconvénients que ce statut apporte par rapport au salariat. Il y a un an, après 3 ans et demi de salariat en startups (chez BlaBlaCar et PayFit), je me suis mis à mon compte en tant que Product Manager et UX Designer. Je fais partie du collectif Mozza. Voici quelques conseils qui m’ont aidé à faire cette transition en douceur.
Identifier quelle·s compétence·s vous souhaitez vendre
La façon dont vous allez vendre vos compétences va orienter le type de missions que vous allez signer. Par exemple, un développeur web peut se vendre de plusieurs façons différentes :
- S’il se vend en tant que " développeur web ", il se verra proposer des missions où il va purement et simplement écrire des lignes de code.
- Il peut se vendre en tant que " consultant technique "; dans ce cas il pourra éventuellement coder, mais son intervention consistera essentiellement en un rôle plus large où il va conseiller son client sur l’architecture et les solutions techniques à mettre en place.
- Étant donné le manque de ressources sur le marché, certains développeurs décident de se vendre comme " directeur technique " (CTO) par intérim. Certains fondateurs de startups recherchent ces profils afin de les aider à recruter leurs premiers développeurs, à mettre en place les premières fondations de leur architecture technique et éventuellement coder leur premier prototype.
Cette diversité des compétences est applicable à tous les secteurs. Si vous tapez " RH " sur Malt, vous verrez que vous pouvez trouver des experts en paie, des " Head of talent ", des " Coachs professionnels ", des " responsables administratifs " avec des durées de missions et des rémunérations extrêmement variables.
Dans votre métier de salarié, vous avez probablement cultivé de nombreuses compétences. Identifiez laquelle semble porteuse (beaucoup de demande pour relativement peu d’offre) en consultant différentes plateformes de freelance.
Se rassurer au début
Cela peut faire un peu peur de passer de salarié à freelance : moins de garanties et de confort, plus de risques et d’incertitude. Pour se rassurer et se convaincre que vous faites le bon choix, voici plusieurs choses qui ont bien fonctionné pour moi au démarrage :
Faire une (ou plusieurs) missions " test " en parallèle de votre CDI si le rythme le permet (ou par exemple le week-end ou le soir). Cela peut être assez intense, mais cela vous permettra de :
- vous assurer que c’est un format de mission qui vous convient
- commencer à sécuriser des clients et un réseau qui vous seront utiles lorsque vous vous lancerez dans le grand bain
Signer une mission longue histoire de vous laisser un peu le temps de trouver votre rythme. Assurez-vous juste d’être payé régulièrement : vous pouvez par exemple demander plusieurs acomptes. Personnellement, j’interviens sur des missions assez courtes, de 2 à 4 semaines en général. Mais ma première mission, que j’ai trouvée via la plateforme Crème de la crème, a duré 3 mois. Cela m’a permis de me sentir serein au moment de devenir freelance à temps plein.
Trouver les bons canaux pour décrocher des missions
Pour trouver des clients, différentes options s’offrent à vous :
Passer par les plateformes de mise en relation entre indépendants et entreprises. Il y en a des dizaines et des dizaines. A vous de trouver celle qui vous conviendra le mieux.
- les généralistes Malt, Crème de la Crème, Upwork, Toptal, etc.
- les spécialisées Comet, Codeur.com (pour les développeurs), Creads (pour les graphistes), TextMaster (pour les rédacteurs / traducteurs), etc.
Utiliser son réseau. Généralement, c’est ce qui vous permettra de trouver les missions les plus intéressantes. N’hésitez pas à recontacter via LinkedIn vos anciens clients, votre ancien employeur, et toutes relations LinkedIn susceptibles d’être intéressées par vos services.
Établir des partenariats. Par exemple, chez Mozza, nous sommes en relation avec plusieurs agences de développement informatique. Nous recommandons celles-ci à nos clients lorsqu’ils ont des besoins en développement, et inversement ces agences nous recommandent lorsque leurs clients font face à des problématiques en design produit.
Cibler de façon astucieuse les prospects à fort potentiel. Par exemple, chez Mozza, nous vendons des prestations de stratégie produit et design d’application mobile pour des startups B2C. Nous avons commencé à faire de la veille sur des sites répertoriant les entreprises levant de l’argent auprès de fonds de capital-risque, comme AngelList par exemple. Généralement, une entreprise avec peu d’employés (moins de 20) qui vient de lever plus d’un million de dollars a de fortes chances d’avoir des besoins en design produit. C’est pourquoi nous contactons ces entreprises afin de leur proposer spontanément nos services.
Passer du marketing sortant à l’entrant
Au sein de Mozza, le collectif d’UX dont je fais partie, mes amis Adrien et Maxime ont trouvé un moyen intéressant d’attirer des prospects. Au lieu de démarcher les prospects de façon " sortante ", c’est-à-dire les contacter proactivement pour leur proposer nos services, ils ont réussi à faire en sorte que de nombreux prospects nous contactent de leur propre initiative. C’est ce qu’on appelle le marketing " entrant ", ou " inbound marketing " en anglais. Comment ont-ils fait ? Ils se sont essentiellement appuyés sur le contenu et la marque :
- Le contenu : depuis 5 ans, nous avons chez Mozza créé beaucoup de contenu (présentations SlideShare, articles Medium, vidéos, interviews de designers) dispensant de précieux conseils sur des sujets que nous maîtrisons (produit management, UX design, growth hacking). Ceci permet d’asseoir notre crédibilité. De nombreux clients ont contacté Mozza après avoir lu nos présentations car ce contenu les a convaincus que nous pouvions leur apporter une réelle valeur ajoutée.
- La marque : au fil des missions et des clients satisfaits, Mozza devient une marque reconnue. Certains prospects nous ont contactés après avoir entendu du bien de nos services de la part de nos anciens clients. Avoir un site web contribue fortement à la notoriété d’une marque. Nous consacrons régulièrement de l’énergie à l’amélioration de notre site vitrine, qui détaille certains de nos projets, présente notre équipe et notre contenu. De la même manière, de nombreux freelances ont leur propre site vitrine afin de présenter leur CV et leur portfolio; c’est une sorte de super CV. Parmi mes préférés : ceux de Mathieu Grac et de Thomas Chrétien.
Démystifier la lourdeur administrative
Au niveau administratif, vous aurez l’impression d’avoir un " coût d’entrée " assez élevé. En effet, vous allez devoir accomplir pas mal de tâches qui auparavant étaient gérées par les ressources humaines lorsque vous étiez salarié. Par exemple, payer ses charges sociales ou souscrire à une mutuelle. Cependant, c’est bien plus simple que ça en a l’air : le nombre de formalités administratives dont vous devrez vous acquitter au départ se compte sur les doigts de la main :
- Créer son statut micro-entrepreneur (très simple, et si vous optez pour la banque pro Shine par exemple, ils le font pour vous)
- Souscrire à la sécurité sociale des indépendants (et éventuellement à une mutuelle santé supplémentaire)
- Créer son compte Net-Entreprises (pour la déclaration des charges sociales).
- Adhérer au prélèvement libératoire des impôts, ce qui vous permettra de payer vos impôts en même temps que vos charges sociales
Ces démarches sont du " one shot " : vous n’aurez à les faire qu’une seule fois.
Ensuite, vous aurez certes quelques routines à ne pas manquer afin d’être dans la légalité :
- Bien gérer vos factures, notamment sur la numérotation. L’application Shine est top pour ça !
- Ne pas oublier le paiement trimestriel de vos charges sociales. Ça se fait en 3 minutes sur le site de Net-Entreprises.
- Si vous dépassez le plafond de TVA, vous devrez penser à facturer la TVA à vos clients et à ne pas la dépenser ! Car vous devrez ensuite la déclarer et la verser à l’Etat.
Vous voyez, tout cela n’est pas très sorcier. La partie administrative peut devenir plus lourde si vous décidez de créer une SASU (Société par Actions Simplifiée Unipersonnelle) afin de ne pas être limité par le plafond de revenus auto-entrepreneur, mais à 70 000 € pour les prestations de services, vous avez de la marge !
S’adapter à ce nouveau format de travail
Le temps et l’espace ne sont plus les mêmes lorsque vous devenez indépendants :
D’abord, l’espace : il y a de grandes chances que vous n’occupiez plus un bureau fixe. Travailler seul peut être déroutant. Personnellement, ma productivité est en berne lorsque je travaille à domicile. Je suis beaucoup plus efficace lorsque je suis entouré d’autres personnes en train de travailler. C’est pourquoi nous avons décidé de sous-louer des bureaux à Paris avec mes amis de Mozza afin de nous retrouver régulièrement. Certes, vous pourrez avoir l’occasion de travailler chez votre client, ce qui a ses avantages et ses inconvénients. Mais le travail à distance apporte aussi beaucoup d’avantages, comme la possibilité de vivre où vous voulez (certains membres de Mozza vivent à Lisbonne ou encore à Kiev), de voyager autant que vous le souhaitez ou encore d’éviter les périodes de pointe lorsque vous partez en week-end. Sachez simplement que plus vous voyagez, plus il vous faudra être en mesure de gérer les imprévus (trop de distractions, mauvaise connexion Wi-Fi, etc). A vous de trouver le cadre qui vous convient !
Ensuite, la gestion du temps de travail peut être assez déroutante lorsque vous avez l’habitude d’horaires de bureau classiques. En freelance, vous ne ferez pas forcément du 9h-19h comme dans un job de startup parisien. Vous serez beaucoup plus " maître " de votre temps. Cela pourra vous arriver d’être plus efficace que prévu, et de libérer du temps pour autre chose. Où à l’inverse, de prendre du retard et de devoir terminer un projet le week-end. Si vous n’êtes pas discipliné là-dessus, cela peut devenir rapidement incontrôlable. Je vous conseille d’utiliser un outil de suivi de votre temps de travail (par exemple TimeCamp) afin de facturer votre client en conséquence. D’ailleurs, vous devrez choisir si vous facturez en régie ou au forfait ; voici un article qui explique les avantages et inconvénients de chaque modèle.
Le travail indépendant est en pleine explosion. On y voit aujourd’hui de nombreux métiers qu’on n’imaginait pas exercer en dehors du salariat il y a quelques années. En parallèle, les canaux de prospection (plateformes type Malt, Crème de la crème) se multiplient, les outils (néo-banques et aide administrative par exemple : Shine) s’améliorent de jour en jour et les mentalités évoluent. De plus en plus d’entreprises sont prêtes à confier certains aspects clés de leur métier à des freelances. La confiance est de plus en plus forte, ce qui permet de normaliser le statut d’indépendant dans de nombreuses professions. Le passage de salarié à indépendant n’a jamais été aussi simple !