Depuis les années 80, les open spaces sont venus remplacer les bureaux cloisonnés - les fameux “cubicles” outre-Atlantique. Présentés comme le nec plus ultra de l’organisation des espaces de travail, les plateaux ouverts se sont peu à peu imposés, d’abord dans les bureaux des startups puis très vite dans ceux des grands groupes. Modernes, lumineux, chaleureux… Mais surtout censés faciliter la communication et la créativité chez les collaborateurs de ces entreprises dynamiques et flexibles. Or une étude publiée par la revue Philosophical Transactions of the Royal Society en juillet dernier dresse un tout autre constat : obliger les employés à se côtoyer n'améliorerait en rien leur créativité ni leur communication, au contraire.
Cette récente analyse pourrait expliquer le succès de Slack et ses concurrents. En l'absence d'un minimum d'intimité au sein d'un open space, les employés compenseraient en se construisant "des murs virtuels". Au contraire, dans un espace de travail cloisonné, aller converser avec un collègue serait perçu comme une détente, "une pause". L'open space serait donc une fausse bonne idée : la créativité ainsi que la collaboration seraient favorisées par des espaces clos permettant une plus grande intimité physique et cérébrale.
S’isoler pour mieux s’ouvrir
Des espaces clos permettant une plus grande intimité physique et cérébrale : c’est justement ce que propose la startup WeeM, créée par Clément de Souza, Sylvain Le Chatton, Maxime Nicot et Emmanuel Ratel en 2017. Dans leurs cabines acoustiques connectées et personnalisables, les collaborateurs peuvent passer leurs appels, méditer et même recevoir leurs rendez-vous professionnels en toute intimité. “On est pragmatique : il y a un marché du foncier qui est extrêmement fort et qui ne va évidemment pas baisser. Il faut bien optimiser les charges fixes, d’où la nécessité parfois de l’open space. Et bien qu’ils puissent être sources de nombreux maux (nuisances sonores, troubles de la concentration), il ne faut pas revenir en arrière : le mieux c’est de trouver des solutions, et on pense que la cabine acoustique peut en être une”, explique Emmanuel Ratel, cofondateur de WeeM.
Et les chiffres semblent lui donner raison : installées depuis quelques semaines au sein de la Cantine Numérique à Petit-Quevilly, les cabines de WeeM affichent fièrement un taux d’occupation de 70% en journée. Un succès qui a convaincu la Caisse d’Épargne Normandie d’équiper son siège avec une WeeM pour une période test de 6 mois, et d’acheter la solution si le test s’avère réussi. “Après les avoir rencontrés au Summer Festival de NWX en juin dernier, ils ont émis une réelle envie de développer la Qualité de Vie au Travail (QVT) dans leurs bureaux. Nous avons donc créé des groupes de travail avec les collaborateurs, et développé pour eux des modules spécifiques comme des applications de méditation et de concentration. On a même ajouté une boîte à questions comme celle de Canal+ pour que les collaborateurs puissent nous donner leurs retours”, raconte Emmanuel Ratel.
Pour Bruno Goré, Président du Directoire de la Caisse d’Epargne Normandie, les nouvelles attentes des collaborateurs quant à leurs espaces de travail sont surtout liées à la mobilité, et à la possibilité de se connecter " n’importe où, à n’importe quel moment, sur n’importe quel terminal multi-protocole, dans des espaces confortables et acoustiques ". Le design ergonomique et original de la WeeM les a dont séduit pour répondre à ce besoin et développé ainsi le " micro-working ", qui permet à la fois de " réduire la fracture numérique mais aussi d’imaginer et expérimenter de nouveaux usages pour nos clients, notamment en zone rurale où les services privés comme publics se raréfient " précise Bruno Goré. Par ailleurs, la WeeM a un tout autre avantage non négligeable pour une banque : la confidentialité à travers un espace d’échange strictement confidentiel. La Caisse d’Epargne Normandie a ainsi financé le prototype de la startup et participe activement à la phase d’industrialisation avec deux financements en dette, dont un prêt innovation grâce à son dispositif Néo Business (dédié aux entreprises innovantes).
Si les cabines acoustiques connectées de WeeM se prêtent particulièrement aux usages des entreprises et des lieux de coworking où elles répondent aux problématiques de coûts, d’espace et de QVT, ses fondateurs ont de plus grandes ambitions pour elles. À l’origine, la WeeM a en effet été imaginée comme une solution pour créer des espaces de travail partagé à destination des tiers lieux (gares, aéroports) sur un modèle type Autolib, qui soit monétisable via une application mobile et un paiement à la minute. “Après le télétravail et le coworking, on voulait inventer le micro-working. Cela répond à un double problème, qui est d’une part la difficulté de travailler dans ces tiers-lieux qui font pourtant partie de nos déplacements quotidiens, et de l’autre la réduction de ces déplacements justement”, analyse le cofondateur de WeeM. Il cite pour preuve les seuls trajets domicile-travail qui représentent 71% du temps et 40% de la distance du trafic total de l’Ile-de-France, entraînant bouchons et pollution.
Emmanuel Ratel veut donc croire que les cabines de WeeM sont capables de plus que d’aider les collaborateurs dans les open space : “Ça dépasse le cadre du travail : on peut tout à fait imaginer d’autres utilisations. Notre métier est en train de pivoter d’un fournisseur d’espaces de travail à un accompagnateur de nouveaux usages. Demain, ces cabines seront peut-être au coeur des solutions pour recréer du lien social, dans des secteurs comme la médecine ou la banque.”
En attendant, WeeM compte sur l’essor des espaces de coworking - qui poussent comme des champignons - pour s’implanter dans les principales métropoles. De quoi contribuer activement à l’amélioration des conditions de travail des collaborateurs en respectant les contraintes d'optimisation de l’espace.
Maddyness, partenaire média de la Caisse d’Epargne.