Outils et conseils par Jessica Yuen
16 août 2019
16 août 2019
Temps de lecture : 5 minutes
5 min
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Pour éviter les crises d’ego, supprimez les intitulés de vos postes

Les mots signifiaient beaucoup chez Gusto, où Jessica Yuen a dirigé pendant trois ans une partie de l'équipe. Si un langage réfléchi a permis de créer un dialogue vecteur des valeurs de la startup, c'est progressivement l'absence de mots qui a façonné la culture d'entreprise.
Temps de lecture : 5 minutes

Article initialement publié en septembre 2018

À un moment où nous embauchions à un rythme particulièrement rapide, une longue liste "d'étiquettes" a été créée pour les différents postes ouverts - avocats, spécialistes, experts - et chacun causait de la confusion à l'extérieur. Notre équipe de direction a ainsi décidé de consacrer un après-midi entier, en juillet, à l'exploration de l’impact de tous ces titres sur notre équipe. Oui, nous savions que les titres contribuaient à la clarté des rôles mais ils apportaient également une ombre inutile. Nous nous étions vraiment toujours souciés de la clarté mais jamais de cet autre "côté".

Lors de la réunion, notre CTO a pris une position provocatrice pour lancer la discussion : " et si on se débarrassait complètement des titres ? Je n'ai pas besoin de m'appeler CTO ". Lors de cette réunion, nous avons également réalisé que les titres n’étaient pas nécessaires dans notre société actuelle, qu'ils ne représentaient aucunement la mesure des contributions d'un salarié. Ils ne nous ont en effet pas rendus plus forts, plus sages et ne nous ont pas rapprochés de la réalisation de notre mission. Non, les titres ajoutaient tout simplement des points de confusion.

Nous avons donc décidé de mettre nos idées en pratique. À l’intérieur de cette salle de conférence, l’équipe de direction s’est engagée à se débarrasser des titres et, en même temps, de tout ce que ces quelques lettres représentaient. Ensuite, nous avons échangé avec d’autres sociétés qui n’avaient plus de titre pour voir ce qu’elles avaient appris de cette expérience. Plusieurs conversations et une communication à l'échelle de l'entreprise plus tard, et notre bureau sans titre est devenu réel.

Voici l'e-mail que j'ai envoyé à l’équipe :

En résumé :
Clarification quant aux titres : nous avons abandonné les titres pour revenir aux descriptions des missions de chacun pour être mieux alignés avec nos valeurs.

En détail :
En juillet, nous avons décidé d'abandonner les titres qui ne correspondaient pas à notre culture. Comme beaucoup d'entre vous ont récemment rejoint notre entreprise, nous voulions vous rappeler cette décision ainsi que la philosophie derrière celle-ci.

Pourquoi avoir fait ce choix ? Pourquoi cela est important ?
1) Les titres n'étaient pas uniformisés, ce qui créait de la confusion (étiez-vous un expert ou un spécialiste ? qu'est-ce qui est le mieux ?)
2) En considération de notre philosophie "zéro ego", nous estimions que les étiquettes nous détournaient du travail à réaliser.
3) Psychologiquement, dire que nous faisons partie d'une équipe est très différent d'un titre personnel. Comme nous continuons à agrandir la famille Gusto, développer un langage qui reflète nos croyances aura une influence plus importante que ce que l'on peut croire.

L'impact

Je pensais qu'il y aurait un soulèvement après la diffusion de cet email. Et je me suis assurée de me préparer car je peux vraiment comprendre la réaction  des gens qui pensent que ce changement signifie renoncer à une chose pour laquelle ils ont travaillé dur dans leur carrière. Mais, peu après l'annonce, j'ai commencé à recevoir des mails qui disaient des choses telles que " c'est génial ", " cela correspond tellement à nos valeurs " et " je suis vraiment excité que nous essayions ceci et que nous soyions fidèles à qui nous sommes vraiment ". Les retombées immédiates ont été extrêmement positives. C’est drôle parce que nous nous sommes débarrassés des titres de postes et, le même mois, nous avons décidé de rendre plus saines les collations que nous proposions. Résultat : le sujet des collations a été beaucoup plus controversé.

Le changement le plus immédiat a été du côté des recrutements. Nos RH ont vu des personnes incroyables postuler - des personnes qui n’auraient jamais osé postuler auparavant car les titres mis en avant les empêchaient de sauter le pas. De nombreuses sociétés sans titre avec lesquelles nous avions parlé pendant la phase de recherche avaient mentionné un phénomène similaire. Les titres peuvent attirer le mauvais type de candidats. Le fait de ne pas avoir de titre peut filtrer ces personnes.

Supprimer les titres a également eu un impact psychologique sur l'équipe. L'un n'était plus un " responsable du service client ", il faisait simplement partie de l'équipe dédiée aux clients. Ce léger changement dans la formulation a permis de saisir la nature collaborative de ce que nous essayions d’accomplir.

Ce que nous avons appris

Rompre avec la tradition n’est pas aussi simple que ça. Quelques problèmes sont survenus suite à cette rupture dans notre organisation : nos descriptions de postes n'apparaissent plus forcément dans les résultats de recherche sur internet, ce qui n’est pas très bon du point de vue du référencement. Donc, si vous cherchez par exemple un consultant en marketing, vous trouverez sûrement un tas d'annonces mais probablement pas la nôtre.

En mettant nos intitulés de postes à l’écart, nos salariés se sont posés beaucoup plus de questions sur leur parcours. Pour y remédier, nous avons dû déployer des efforts considérables à l’échelle de l’entreprise pour "marquer" les étapes de carrière de chacun et nous avons associé ces changements à des programmes de développement des performances pour encourager la croissance et l’apprentissage.

Lâcher nos intitulés de postes est un enjeu de taille. Nous sommes restés ouverts à l’adaptation de cette approche à l’avenir et nous avons reconnu les problèmes potentiels à venir mais nous espérons continuer sans titre aussi longtemps que possible. C'est un rappel constant que nous sommes dans la même équipe, unis par le même objectif.

Retrouvez l'article de Jessica Yuen sur Linkedin

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