La vente immobilière, notamment de par sa grande complexité administrative, est aujourd’hui conçue et vécue de manière extrêmement anxiogène. En effet, au fil des années, le législateur a ajouté des nombreuses briques règlementaires destinées, en premier lieu, à protéger les acheteurs. Si l’intention est louable, le résultat l’est moins : une grande quantité d’informations, impliquant une masse tout aussi importante de documents à comprendre et à signer. A cela s’ajoute également un parcours d’achat intégrant de nombreux interlocuteurs, du diagnostiqueur au syndic en passant par le banquier, l’assureur ou encore le notaire, aucun ne parlant le même langage mais dont la présence doit pourtant assurer la validité de l’acte d’achat...
Bref, un parcours du combattant pour tout aspirant acquéreur, alors même que l’on peut aujourd’hui être son propre banquier, effectuer des consultations médicales à distance et payer ses impôts en ligne via son Smartphone, dans son salon ou sa cuisine. Pourquoi donc devrait-il en être autrement s’agissant d’un achat immobilier ? À l’heure du tout numérique, il est grand temps que l’achat immobilier se réforme, lui aussi, vers une digitalisation accrue impliquant davantage de simplification et de conseil, au bénéfice tant du client que de la profession toute entière.
Le numérique au soutien du client-acheteur...
Chacun des professionnels énumérés ci-dessus joue un rôle dans le parcours de l’acquéreur. Pour autant, alors même que leur objectif final à tous demeure la satisfaction client, leur travail ne fait l’objet que d’une collaboration aujourd’hui encore trop limitée. Et pour cause, l’immobilier tout entier a oublié un élément désormais fondamental : l’acheteur, en tant que client, se veut le 1er ambassadeur de leur travail. Sa satisfaction nécessite donc qu’il soit acteur de sa consommation et qu’il dispose, pour cela, des services et des outils nécessaires.
À ce titre, le numérique, par la simplicité des process qu’il promet, doit pouvoir garantir ce parcours fluide et clair à l’utilisateur permettant aux professionnels, notamment les notaires, de se concentrer davantage sur leur rôle de conseil. Comment ? En automatisant les tâches qui peuvent l’être, en assurant ce contact humain constant avec le client, et la gestion commune de son projet d’achat. C’est à cette triple condition qu’il pourra replacer la valeur de son accompagnement là où elle se trouve véritablement ! En effet, loin du seul taxateur que l’on voit habituellement en lui, le notaire est avant tout un conseiller et un garant de la régularité de l’achat effectué sur laquelle il engage sa responsabilité.
...et du modèle notarial français tout entier !
Cette revalorisation du rôle du notaire, si elle doit en premier lieu permettre de servir au mieux l’acheteur, s’avère également indispensable à la profession tout entière. En effet, cette dernière est actuellement confrontée une double problématique de concurrence accrue et de baisse des actes tarifés. Résultat : elle fait face à la nécessité d’adopter les outils digitaux pour, d’une part, se valoriser, et, d’autre part, abaisser ses coûts de production. Mais, à l’image d’autres marchés monopolistiques, tels que les banques, les hôtels ou les taxis, qui ont été disruptés par l’arrivée de plateformes numériques venues d’Outre-Atlantique, qui empêchera de nouveaux arrivants étrangers d’en faire de même en matière notariale ?
Aussi, si cette transformation numérique de la profession est souhaitable, pour toutes les raisons citées, il n’en demeure pas moins qu’elle doit rester le fruit d’une initiative française, encadrée par le droit et garant de ce savoir faire notarial national. Et pour cause, ces plateformes impliquent naturellement une masse de données, de l’identité civile de chaque acheteur au marché tout entier, dont l’exploitation par une plateforme étrangère, du fait de sa méconnaissance de notre droit, risquerait d’entrainer un abaissement du service, qui n’est aujourd’hui plus envisageable. En somme, le notariat doit prouver qu’il est, cette fois encore, capable de s’adapter aux transformations sociales et aux nouveaux usages en travaillant à s’ouvrir aux outils numériques et à toutes les opportunités qu’ils offrent, au plus près des LegalTech ! Une mue digitale, au soutien de la protection du justiciable, devenue donc indispensable car seule en mesure d’assurer la qualité de ce métier plus que jamais d’avenir.
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Par Sacha Boyer, cofondateur de MyNotary