Quand on s’est lancé il y a huit ans, et que l’on a écrit notre premier business plan, on espérait atteindre 20 millions de vidéos vues par mois au bout d’un an, explique Guillaume Lacroix, fondateur et CEO du média Brut. On a fait 30 millions de vues le premier mois, au bout de cinq mois, on faisant 120 millions de vues. On était une sorte d’exception mondiale. On faisait plus de vues aux États-Unis que les médias américains. » Ce chiffre dépasse aujourd’hui 2 milliards de vues par mois, faisant de Brut l’un des leaders mondiaux de l’information sur les réseaux sociaux.
Une croissance continue
En novembre 2016 commençait donc la croissance continue de Brut qui se poursuit encore jusqu’à ce jour. Ils s’étaient pourtant lancés sur fonds propres, sans arriver à en lever.
« Xavier Niel nous a sauvés de la banqueroute, confesse le CEO de Brut. Il nous a contactés parce qu’il voyait ses enfants regarder nos vidéos. Il est devenu notre premier investisseur et il est encore très présent aujourd’hui. » Après cette première étape marquée par une explosion de la croissance, Brut se met en quête d’un modèle économique. Un parcours qui ne se fera pas sans multiplier les erreurs, une marque de fabrique pour Guillaume Lacroix qui les revendique comme des insignes honorifiques : la preuve des nombreuses explorations réalisées par ses équipes en quête de nouveaux formats créatifs.
« On s’est essayé à l’abonnement avec notre plateforme de streaming BrutX qui a cartonné ! Nous n’avons pourtant pas eu les moyens de financer sa croissance. »
En effet, Brut sera contraint de fermer le service moins d’un an après son lancement. Son fondateur défend pourtant que, sans BrutX, ils n’auraient jamais réussi à faire émerger le modèle publicitaire qui fait aujourd’hui la réussite du média : avec un format qui prétend réinventer la publicité télé pour les réseaux sociaux. Dans un même temps, les équipes de Brut accompagnent des clients comme Duolingo pour qui ils gèrent les réseaux sociaux en France, ou Visa, pour qui ils dirigent la stratégie sociale et les réseaux sociaux dans le monde.
L’entreprise s’est pourtant engagée dans une troisième phase depuis trois ans :
« Nous avons essayé de nombreuses choses, maintenant nous savons ce que nous avons à faire et on priorise pour devenir rentable. C’est ce que nous avons fait et nous sommes déjà rentables, sans avoir à faire de compromis ou de sacrifice sur la qualité éditoriale. »
Brut a ainsi atteint son premier quarter rentable pour le dernier trimestre 2023 avant d’en enchaîner plusieurs pour confirmer le fait que le média atteint structurellement la rentabilité.
Cela arrive après de multiples levées de fonds qui ont eu lieu au fil des ans : d’abord 10 millions d’euros en 2018 avec Kima Ventures, 36 millions en 2019, 63 millions en 2021 et enfin 40 millions d’euros en 2023 avec la volonté d’en faire l’impulsion jusqu’à la rentabilité.
Guillaume Lacroix refusera de commenter les chiffres, mais de nombreuses sources placent le chiffre d’affaires de Brut entre 50 et 100 millions d’euros, soit le chiffre d’affaire d’une grosse chaîne d’information de la TNT.
L’avenir de Brut
La fermeture du bureau américain de Brut n’est donc pas un signe d’une décélération de la croissance ou de l’internationalisation. Au contraire d’après Guillaume Lacroix, « nos chiffres démontrent une accélération partout dans le monde ! Après la France, nos plus gros pays sont l’Inde et les États-Unis. On connaît aussi une explosion sur le continent africain et on regarde avec intérêt le Moyen-Orient : c’est un endroit hyper-intéressant du monde et on souhaiterait être une voix jeune et moderne dans le monde arabe. »
La plus grande fierté du patron de Brut est pourtant à chercher ailleurs. En effet, alors que la confiance moyenne dans les médias se situe entre 25 et 30%, la confiance donnée à brut atteint les 89%. « C’est incroyable, commente-t-il. Nous sommes déjà le leader mondial de l’information sur les réseaux sociaux, mais je pense que l’on peut encore largement grandir avec une boîte financièrement solide, et qui continue de se démarquer grâce à ses idées créatives et intelligentes. La mission de Brut, c’est donner les outils pour mieux comprendre le monde —ne surtout pas leur dire quoi penser— mais qu’ils puissent s’emparer des outils pour se forger leur propre opinion. »