Animés par l'esprit entrepreneurial et soucieux d'avoir un impact positif, Paul Malfoy, ingénieur agronome diplômé d'AgroParisTech, et Valentin Sabatet, ingénieur en bioinformatique, se sont lancés le défi de résoudre une problématique cruciale dans l'agroalimentaire, un secteur à l'intersection de leurs compétences. Très vite, ils identifient le gaspillage alimentaire comme un enjeu majeur auquel ils souhaitent apporter leur concours. Et pour cause, chaque année en France, 10 millions de tonnes de produits alimentaires sont perdus et gaspillés, dont 50 % de fruits et légumes, générant ainsi l'émission inutile de 15 millions de tonnes de CO2. Partant de ce constat alarmant, ils ont élaboré une solution scientifique innovante qu'ils aspirent désormais à déployer à grande échelle et fondent en 2021 l’agritech Proteme.
« Le gaspillage alimentaire, tant en France qu'à l'échelle mondiale, soulève des enjeux complexes qui se recoupent : le développement durable, notamment la décarbonation, et les enjeux sociaux, tels que l'éradication de la faim. Une part importante de la production alimentaire est gaspillée, anéantissant ainsi une grande partie du travail de nos agriculteurs et de la filière. Il est évident que le gaspillage alimentaire est un problème systémique, touchant l'ensemble de la chaîne de valeur. Proteme ne prétend pas résoudre tous ces problèmes. Notre objectif est de nous concentrer sur un aspect précis : la conservation des aliments », explique Paul Malfoy.
Une seconde peau invisible et biodégradable
Bien que peu connus du grand public, les produits de conservation pulvérisés sur les fruits et légumes pour prolonger leur durée de conservation sont souvent d'origine chimique. Leur utilisation soulève des préoccupations importantes concernant la santé, tant pour les agriculteurs qui les manipulent que pour les consommateurs qui ingèrent les résidus.
« Les pesticides utilisés avant la récolte pour augmenter les rendements sont bien connus du grand public. En revanche, ceux appliqués après la récolte pour combattre les moisissures et les pourritures le sont beaucoup moins. Et pour cause : en Europe, leur étiquetage n'est pas obligatoire. Or, ces produits chimiques de synthèse sont souvent des perturbateurs endocriniens et potentiellement cancérigènes », alerte le CEO. Il ajoute : « Si l'agriculture biologique, qui interdit l'usage de ces substances, est préservée, elle subit en contrepartie des pertes de fruits et légumes plus importantes que le secteur conventionnel. »
Soutenue par l’incubateur X-up de l’École polytechnique, puis par le Food'InnLab d'AgroParisTech et co incubé par Rungis&Co, le binôme Paul Malfoy et Valentin Sabatet a développé un substitut, une seconde-peau biodégradable, inodore et invisible à l’oeil nu qui protège les citrons et les bananes et se désintègre une fois passée sous l’eau.
« Cette solution, élaborée à partir de composés naturels - des biopolymères -, est compatible à la fois avec les méthodes de production conventionnelles et biologiques. Elle offre ainsi une alternative inédite pour des itinéraires de production qui en étaient auparavant dépourvus. En contact avec l'eau, l'enrobage, initialement invisible, se gélifie, offrant une expérience visuelle unique au consommateur. Afin de l'informer et de le sensibiliser à cette innovation, nous collaborons étroitement avec les interprofessions des fruits et légumes en France », témoigne le CEO.
Les bananes et les citrons en première ligne
Avec sa solution encore en développement baptisée Prosane, l'agritech Proteme vise directement les agriculteurs. Comme le rappelle Paul Malfoy, « ce sont eux qui sont responsables de la protection et de la conservation des produits. Pour des raisons de volume, de rentabilité et d'impact environnemental, nous nous concentrons sur les très grandes exploitations agricoles et les industriels. Pour l'heure, nous nous focalisons exclusivement sur les citrons et les bananes. La banane, fruit le plus consommé au monde, est particulièrement produite dans les Antilles françaises. Plusieurs grandes entreprises françaises sont d'ailleurs des acteurs majeurs de ce marché. La banane Française est l’un de nos prospects. Quant aux citrons et aux agrumes en général, notre démarche est guidée par une éthique forte, car ce sont justement ces fruits qui font l'objet d'un usage massif de produits chimiques toxiques. C’est un marché qui a vraiment besoin de notre solution. »
Fort de résultats probants obtenus depuis le second semestre 2024 - +10 jours de conservation pour les bananes et 2,5 fois moins de moisissures sur les agrumes - , Proteme dispose désormais d'une solution véritablement efficace. L'entreprise attend cependant l'obtention des autorisations réglementaires nécessaires pour commercialiser son produit sur les territoires visés. « Ce processus étant long et complexe, nous estimons pouvoir lancer sa commercialisation courant 2026 », précise le CEO. Après une première levée de fonds en pre-seed à hauteur de 605.000 euros réalisée début 2023 auprès de deux collectifs de business angels - le français WeLikeStartup et un club du benelux BeAngels - et le family office chipriote Exerte Partners, pour finaliser ses produits et les rendre efficaces, l’agritech Proteme a par ailleurs été lauréate France 2030 du programme “Innover pour réussir les transitions alimentaires et écologiques”. Une reconnaissance qui lui a permis d’obtenir des subventions et des aides publiques couvrant 50 % du projet qu’elle présentait, soit 1 million d’euros.
Désormais détentrice de ses propres locaux au sein du campus du Genopole à Evry-Courcouronnes, Proteme boucle actuellement un seed de 2 millions d’euros en private equity et vise à compléter ce financement par des fonds non dilutifs pour atteindre un montant total de 4 millions d'euros. « Ces fonds nous permettront de monter à l’échelle nos procédés de production pour répondre aux besoins clients, mais aussi de suivre nos processus réglementaires d’homologation qui sont longs et coûteux. De manière très concrète, cela se traduit par le doublement de la taille de nos locaux et de nos effectifs au cours de l’année prochaine. » Ce développement devrait permettre à Proteme - dès lors que les produits seront homologués - de faire décoller le chiffre d'affaires très rapidement.
« Nous visons 1 million de CA en 2026, 4 en 2027, et 8 ou 9 vers 2028 », détaille Paul Malfoy. Pour y parvenir et développer une communauté d'ambassadeurs capable de promouvoir la solution au plus grand nombre, Proteme lance une campagne de financement participatif sur la plateforme Sowefund.
Pour devenir actionnaire de Proteme et contribuer à la réduction du gaspillage alimentaire, c’est par ici.