Ce n’est plus un scoop, l'écosystème media est en plein bouleversement. En deux décennies, les réseaux sociaux ont mis fin à l’hégémonie des médias traditionnels, fragmenté les audiences et remis la création de contenu entre les mains de chacun. Et en quelques années seulement, l’IA générative va accélérer de façon exponentielle le volume des contenus, de leurs formats et de leurs canaux.
Les bulles informationnelles, les fake news, les polémiques sont la face sombre de cette révolution. Mais ils sont à mettre en regard de la créativité et de la diversité des producteurs de contenus, de la nouvelle légitimité de l’information portée par les grands médias, et de la capacité inédite du marketing à mieux cibler et à personnaliser.
La fabrique de l’opinion, et notamment de l’image des entreprises, s’en trouve profondément transformée. Si nous avons - comme annoncé par Camus - « remplacé le dialogue par le communiqué », il s’agit désormais d’inverser cette tendance pour définir une nouvelle relation entre l’entreprise et ses parties prenantes.
Être dans la « vraie vie »
Pour parler aux audiences, il s’agit d’abord de capitaliser sur ce que les marques leur apportent. Rares sont les secteurs comme la banque qui s’inscrivent aussi profondément dans la vie du client. Les particuliers ont besoin de gérer leur budget, régler leurs dépenses quotidiennes, épargner pour leurs projets, louer ou acquérir leur logement ou leur véhicule. Les entreprises doivent payer leurs salariés et leurs fournisseurs, financer leurs innovations, commercer à l’international… autant d’opportunités de connexion avec nos audiences.
Dans un monde post-Covid où les formats désincarnés entament leur déclin et où leurs récits lénifiants sont rejetés, ne faudrait-il pas s’attacher à renouer avec nos publics dans la « vraie vie » ? En voici quelques cas d’usage.
Pour BNP Paribas, le cinéma permet par exemple de proposer de véritables expériences collectives, avec 75 000 cinéphiles invités dans les salles françaises en 2023. Nous créons aussi des événements de large rassemblement autour de Roland Garros : notre Wildcard battle avec le youtubeur Domingo a réuni 8 000 spectateurs sur le court Lenglen et 700K vues, car ces expériences vécues se prolongent en ligne.
Les médias eux-mêmes se réinventent dans une plus grande proximité avec leurs audiences. Le podcast est devenu le format idéal pour développer un propos plus argumenté. Certains sont des pépites qui permettent de s’adresser de manière très fine et très affinitaire aux auditeurs, par exemple sur la cause des violences économiques faites aux femmes, ou sur les enjeux de l’IA dans les ressources humaines.
Enfin nous cherchons la tonalité – notamment en publicité - qui reflète à la fois ce que nous sommes et ce qui intéresse les gens : la connivence se crée naturellement lorsqu’on est à la fois drôle et sincère !
Être sur les vrais sujets
Si notre capacité d’écoute se renforce, elle nous impose d’être en mesure de répondre. Si j’écoute l’autre, avec ses inquiétudes, ses questionnements, je dois pouvoir y réagir.
C’est la méthode que nous avons retenu sur la thématique du climat. Les banques ont une ligne de crête ambitieuse à tenir : décarboner l’économie sans la fragiliser, financer les énergies de demain tout en s’assurant que les biens et les personnes puissent circuler aujourd’hui. Si cette trajectoire est de mieux en mieux acceptée, c’est que nous avons pu entretenir un dialogue riche avec nos parties prenantes, avancer des preuves chiffrées et auditées sur nos efforts, mais aussi reconnaître ce qu’il reste à accomplir, et les difficultés auxquelles nous faisons face.
Sur ce sujet comme sur d’autres, nos méthodes des relations presse s’appliquent désormais sur les réseaux sociaux, par la multiplication de rencontres et d’échanges avec les créateurs de contenus. Briefing, pédagogie, relais d’arguments, la génération émergente d’influenceurs ne fait pas que du marketing : ils agissent comme de véritables animateurs de communautés. La même logique s’applique au sein de l’entreprise, où l’advocacy interne des équipes revêt une dimension cruciale. Là encore il ne s’agit plus d’informer mais de convaincre.
Cette démarche de sincérité et d’ouverture, nouvelle chorégraphie imposée aux directions de la communication, est aussi une responsabilité : maintenir le dialogue ouvert est une contribution que le monde de l’entreprise doit apporter à nos démocraties fragilisées.