« 20 % des salariés sont exposés à une IA dans leur entreprise. Il y a deux ans, c’était moins de 1 % », assure Mick Levy, directeur stratégie et innovation au sein d’Orange Business Service. L’IA générative, apparue en 2022, a en effet démocratisé la technologie. « Cela fait 20 ans que les entreprises utilisent l’IA, notamment dans les secteurs de l’assurance, de la banque ou des transports. Mais les CODIR s’y intéressent surtout depuis l’avènement de ChatGPT », estime Mick Levy qui conseille une centaine d’entreprises par an sur leur stratégie IA et data. Cet outil, à l’effet bluffant, a en effet suscité l’intérêt des dirigeants pour la mise en place de chatbot interne, d’outils marketing pour générer des images avec la charte de l’entreprise ou d’accès instantané à une base de connaissances pour les techniciens. « Les dirigeants y voient de nombreuses opportunités et veulent se saisir du sujet. »

Un constat que partage Grace Mehrabe, la dirigeante d’Outmind. Cette startup propose des moteurs de recherche interne à ses clients pour permettre aux salariés de trouver en un clic les données dont ils ont besoin alors qu’elles sont souvent éparpillées au sein de la société. « Les dirigeants voient surtout le gain de productivité que permet l’IA générative et ne veulent pas être en retard par rapport à leurs concurrents. Ils s’y intéressent notamment par peur de la concurrence », estime-t-elle.

L’IA traditionnelle plus adaptée à certains usages

Pour autant, le marché est encore « loin de la maturité », souligne Grace Mehrabe. Car le manque de connaissances autour de l’IA est important. « Cette technologie est parfois réduite à ChatGPT, souligne Mick Levy. Et les entreprises veulent intégrer de l’IA générative mais ne savent pas toujours pour quels usages. »

L’un des grands enjeux est donc de comprendre cette technologie, ses opportunités, ses risques et ses limites. D’autant que la crainte de perdre son emploi pour les salariés peut être forte. Et que les usages identifiés par l’entreprise ne sont pas forcément couverts par l’IA générative. « Pour certaines problématiques, l’IA traditionnelle est plus adaptée. Pour faire de la prédiction par exemple, décrire des situations complexes ou détecter des cas de fraude. Mais l’intérêt de l’IA générative est qu’elle a remis sur la table les sujets autour de l’IA traditionnel et de la data. Certains CODIR se désintéressaient totalement de ces sujets et y trouvent désormais un intérêt », poursuit Mick Levy, qui précise que certains de ses clients se sont rendu compte que des outils d’IA avait été intégrés au sein de leur société depuis déjà plusieurs années sans qu’ils n’y prêtent attention.

« L’IA générative sert aujourd’hui surtout l’image des entreprises »

Car jusque-là, l’IA était réservée aux data scientists. La GenIA permet désormais d’impliquer tous les salariés grâce à ses réponses visibles et bluffantes. Reste la difficulté du passage à l’échelle pour les entreprises. « Une fois passés les premiers tests, qui montrent généralement toute la valeur du projet, les entreprises ne parviennent pas toujours à industrialiser leur concept. Et beaucoup de projets restent au stade embryonnaire », souligne Mick Levy. Souvent parce que la marche est trop grande en termes de transformation, mais aussi parce que le coût est trop important. « L’IA va apporter une forte valeur ajoutée, et il va falloir accepter les transformations que cela implique », estime le conseiller, pour qui les sociétés devront également lancer des outils spécifiques pour se démarquer.

Selon lui, c’est d’ailleurs l’IA traditionnelle qui bousculera le plus les organisations. «  L’IA générative sert aujourd’hui surtout l’image des entreprises, qui tardent encore à réaliser la puissance de l’IA traditionnelle. Mais on estime qu’à terme, l’IA générative ne créera que 33 % de la valeur créée par l’IA au niveau mondial. »