Importé des États-Unis, le rôle de Chief of Staff est en plein essor en France : si l’on mène une recherche sur LinkedIn, 454 000 personnes sont référencées avec le hashtag #chiefofstaff dans le monde, 113 000 aux États-Unis, et 1 700 en France. Pour la deuxième année consécutive, Seven, en partenariat avec le spécialiste du conseil stratégique aux dirigeants GRK, a lancé une étude pour décortiquer les facettes de ce rôle aux contours encore nébuleux. « Dans le sillage de notre formation “BeCoS”, dont la vocation est de mieux comprendre ce nouveau métier, nous voulions recueillir des données salariales, démographiques et sectorielles pour dresser des tendances en termes de rémunération », explique Estelle Maret, CoS au sein du cabinet.
Une cinquantaine de personnes ont répondu (sur 300), issues majoritairement des petites et moyennes structures, majoritairement dans le domaine de la tech. « L’étude est donc représentative de l’univers tech et prend davantage en compte les retours des entreprises de moins de 200 employés : 50 % des répondants travaillent dans des entreprises de 0 à 50 employés (25,9 %, de 50 à 200 salariés). » Salaire, parcours, perception de la rémunération et enjeux à venir : quels sont les points clés à retenir de cette étude inédite ?
Diversité des parcours professionnels
L'une des principales révélations de l'étude est la diversité des parcours professionnels des Chiefs of Staff. Les CoS proviennent de divers horizons : une partie conséquente des répondants étaient consultants (20,4 %), entrepreneurs (11,1 %) ou encore analystes financiers (5,6 %).
« Cette pluralité des trajectoires témoigne de l'éventail de compétences et d'expériences que les CoS apportent à leur poste », souligne Estelle Maret. Néanmoins, elle note un invariant : « La pluridisciplinarité alliée à une expertise majeure. Par exemple, un CoS peut tout à fait être mandaté pour travailler un temps sur la communication externe. Puis dans la finance, en se focalisant sur la croissance externe. »
Expérience professionnelle hétéroclite
L'étude montre également que la majorité des CoS ont une expérience professionnelle significative. Environ 46,3 % des CoS ont travaillé entre 5 et 10 ans, tandis que 18,5 % ont une expérience de 2 à 3 ans. Le poste est souvent occupé par des professionnels expérimentés, capables de naviguer dans des environnements complexes avec des responsabilités élevées.
« L'expérience professionnelle antérieure est cruciale car elle permet de mieux appréhender les dynamiques organisationnelles et les enjeux transversaux. Néanmoins, de plus en plus, on observe des postes ouverts à des personnes profils plus juniors… mais toujours avec cette habileté de traiter des sujets holistiques et pluridisciplinaires », insiste Estelle Maret, elle-même embauchée avec moins de 5 ans d’expérience pour accompagner Yahya Fallah, cofondateur de Seven.
Titres de poste : la grande nébuleuse
Bien que 87 % des répondants portent le titre de Chief of Staff, d'autres titres comme Chief of Growth (3,7 %) et Executive Business Partner (1,9 %) sont également courants. Cette diversité des titres reflète les variations des responsabilités et des rôles spécifiques associés au poste de CoS. Les titres peuvent indiquer des focalisations différentes, comme la croissance pour les Chiefs of Growth ou le soutien exécutif pour les Executive Business Partners.
« Historiquement, le rôle était très implanté dans les grandes structures en tant que “directeur de cabinet”, avec une connotation politique. Depuis quatre ans, les postes ont déferlé dans l’écosystème tech. On a vu émerger des stages en tant que “bras droit”, qui sont davantage des missions de court terme, avant de prendre la dénomination Chief of Staff à des postes plus implantés », explique Estelle Maret.
Secteurs d'activité, responsabilités et rémunération : les variables clés de l’équation
Les entreprises employant des CoS opèrent dans un éventail de secteurs : la technologie (33,3 %), la finance (11,1 %) et le SaaS (7,4 %). Cette polyvalence démontre que leur rôle est adaptable à différents environnements, où des compétences en gestion de projet, en stratégie et en communication sont hautement valorisées. « Si l’on croise les données, on remarque que c’est dans la fintech que les rémunérations sont les plus élevées ainsi que dans les plus grandes organisations », explique Estelle Maret. En effet, la rémunération des CoS varie considérablement, avec 37 % gagnant entre 55 000 et 75 000 euros annuellement, et 25,9 % entre 75 000 et 95 000 euros. Les salaires les plus élevés (+ de 95 000 euros) représentent 22,2 % et sont liés, sans surprise, à la séniorité. Cette variabilité est donc influencée par plusieurs facteurs, notamment la taille de l'entreprise, le secteur d'activité et l'expérience professionnelle du CoS.
En filigrane, une autre dimension s’ajoute à l’équation : les responsabilités et missions intrinsèques qui restent divergentes d’une entreprise à une autre, selon Estelle Maret. Néanmoins, quatre rôles - ou postures - ressortent invariablement : « Celui de porte-parole d’abord : il s’agit de partager les valeurs en interne ou en externe, de fédérer et de porter la vision. Puis celui de bras droit : savoir s’adapter à son environnement et trouver des solutions innovantes. Ensuite, la posture de l’architecte qui apporte des méthodologies agiles ou supplée le CEO lors d’un COMEX. Pour finir, le couteau-suisse, qui revêt un rôle transverse dans l’entreprise : il faut savoir détecter les signaux faibles et incarner la vision du CEO. »
Une fonction en quête de reconnaissance ?
Les perceptions sur la rémunération sont partagées : 48,1 % des CoS se sentent justement rémunérés, tandis que 51,9 % estiment être sous-payés. « L’investissement est tel que cette perception négative est justifiable, eu égard à l’investissement qui est exigé sur ce type de poste : l’enquête laisse entrevoir une forme de dissonance entre contribution réelle et rémunération. »
Pour améliorer la satisfaction des CoS, les entreprises doivent donc aligner les rémunérations sur les contributions et les attentes du poste. Pour cela, différentes architectures salariales existent : 68 % des Chiefs of Staff bénéficient de BSPCE (Bons de Souscription de Parts de Créateur d'Entreprise) dont le montant varie entre 11 400 et 86 800 euros, illustrant une grande disparité dans la valeur de ces avantages ainsi que la diversité des politiques de rémunération au sein des entreprises.
Alors que les entreprises ne cessent d'évoluer, le rôle de CoS sera probablement davantage central dans la stratégie et la gestion organisationnelle. « De plus en plus de startups, dès leur première levée de fonds, recrutent un CoS sur les conseils des investisseurs. Néanmoins, comme beaucoup de fonctions, nous sommes en pleine réflexion quant aux transformations à venir face à l’arrivée de l’IA », conclut Estelle Maret.