La future gouvernance du fonds New Wave se fera désormais sans Jean de La Rochebrochard, directeur général jusqu’au 15 mars dernier, a révélé Les Echos. Pia d’Iribarne, qui avait lancé New Wave, reste présidente et continue de mener le projet créé à la mi-2020. En cause, une divergence d’opinions, qui a provoqué la révocation du patron de Kima Ventures, et acte la séparation entre les deux anciens associés.
De nombreux différends animent le duo d’investisseurs depuis plusieurs mois : des conflits autour de leur méthode de travail mais aussi une inadéquation de caractère a eu raison de leur association. Chaque partie, contactées par Maddyness, affirme que des propositions pour poursuivre la collaboration ou pour une séparation en douceur ont été faites et refusées. Pia d'Iribarne a pris la décision de révoquer Jean de la Rochebrochard le 15 mars 2024.
Hasard du calendrier, cette séparation intervient au moment où New Wave s’apprête à closer son deuxième fonds, sur-souscrit selon les informations de Maddyness, en rassemblant ses investisseurs historiques et de nouveaux LP’s, notamment américains. Aujourd’hui, New Wave dispose d’un portefeuille comprenant une vingtaine de startups comme Mistral AI, BeReal, Amo ou encore Sunday, via son fonds New Wave 1. Après un premier closing fin 2021 à 70 millions d’euros, le fonds New Wave 2 pourrait réaliser son closing autour des 100 millions d’euros.
Gage de réussite, le duo Pia d’Iribarne / Jean de la Rochebrochard et les succès du premier fonds de New Wave ont suscité beaucoup d'intérêt de la part d’investisseurs externes. C’est d’ailleurs sur leur binôme très complémentaire que reposait New Wave. La séparation médiatique et douloureuse des dirigeants pourrait porter un sérieux coup à la société d’investissement.
New Wave 2 sérieusement menacé
Les premières discussions pour lancer leur deuxième fonds débutent en mars 2023. Certains investisseurs historiques d’accord pour recommencer une nouvelle aventure et quelques nouveaux signent des accords d’engagements dès le printemps de la même année. Un an plus tard, le fonds 2 n’est pas - encore - closé. En mai 2023, un des investisseurs se serait retiré du projet suite à de mauvais échos sur la fondatrice, nous assure un proche de New Wave de la première heure. Une affirmation confirmée par Antoine Martin, LP initiateur de New Wave et fondateur d’Amo.
Alors qu’en est-il aujourd’hui ? Nicolas Julia, fondateur de Sorare et LP, semble frileux suite au départ de Jean de La Rochebrochard, par ailleurs partner chez Kima Ventures et très proche de Xavier Niel : «C’est encore très frais, je vais réfléchir sur tout cela, mais comme la plupart des entrepreneurs, j’ai toute confiance en Jean de La Rochebrochard et en son track record. S’il ne fait plus partie de l’aventure, ce n’est probablement pas quelque chose que je vais soutenir.»
Antoine Martin, proche de New Wave dès sa fondation, raconte avoir convaincu Pia d’Iribarne et Jean de La Rochebrochard de monter ce fonds ensemble, avec d'autres LP's et notamment Xavier Niel. «J’ai été la référence quasiment à chaque fois pour les investisseurs du fonds 1 et pour ceux avec qui ils discutaient pour le fonds 2, aucun closing n’a été fait, pas un euro n’a été versé pour l’instant», insiste Antoine Martin. «Tous ces investisseurs investissent dans un duo.» Antoine Martin se dit «scandalisé» par la tournure des événements. «La plupart des LP’s réfléchissent aux actions en justice qu’ils peuvent mener à l'encontre de Pia d'Iribarne», confie Antoine Martin. «Certains investisseurs peuvent la suivre mais pas tous, il y a une situation d’attente», commente encore un investisseur proche du fonds.
Un autre investisseur, qui a souhaité rester anonyme, nuance toutefois ces propos : «Les deux sont essentiels à la réussite du fonds mais ce n’est pas forcément la fin de New Wave.»
Un coup pour tout l’écosystème
D’autres sources très proches du dossier restent ainsi confiantes dans l’avenir de New Wave : «New Wave peut tout à fait continuer sans lui, comme cela était le cas au départ» et insistent sur le fait qu’aucune clause de 'Key Man' n’existe dans les lettres d’engagement des investisseurs, une pratique commune dans les fonds. Cette clause protéïforme vise à protéger les investisseurs et la société en cas de départ d'un ou des fondateurs considérés comme étant clés. Par ailleurs, et ce depuis le démarrage de New Wave en 2020, il a toujours été inscrit que Jean de La Rochebrochard n’était pas à temps plein au service de cette société d’investissement et que Pia d’Iribarne en était la présidente et la décisionnaire avec 60% des parts du capital social.
La fondatrice reste d’ailleurs concentrée sur l’avenir de New Wave. Elle va s’entourer d’un partenaire à temps plein et serait en train de constituer un advisory group, comme l’a confié à Maddyness une source proche de la dirigeante. Contactée via son conseil par Maddyness, Pia d’Iribarne n’a pas souhaité s’exprimer à nouveau sur sa décision. «New Wave continue sans Jean et avec beaucoup de soutiens de la part de nos entrepreneurs et LPs, et notamment la constitution d'un groupe de conseillers», a-t-elle déclaré aux Echos.
Si des séparations adviennent régulièrement au sein de fonds d’investissement, il est rare qu’elles soient rendues publiques. Au-delà du conflit entre associés et du coup d’arrêt que cela porte à New Wave, beaucoup d’entrepreneurs déplorent que cela n’ait pas pu se régler à l’amiable et que l’écosystème tout entier pâtisse directement ou indirectement d’un tel conflit. Un LP investisseur de New Wave 1 confie à Maddyness constater surtout la fin d’un duo très prometteur, tant pour les startups que pour les investisseurs.