D’ici 10 ans, un agriculteur sur deux sera parti à la retraite (selon l’Insee). Une réalité qui touche aussi le monde des éleveurs, avec une baisse de la taille du cheptel français. D’ici 2027, la France pourrait perdre sa souveraineté en production laitière.
En parallèle, les grands industriels cherchent des solutions pour réduire l’impact environnemental de leur production. Mais, dans un même temps, la demande grandit pour des alternatives vegans. C’est sur ce créneau que se positionne Standing Ovation, startup française spécialisée dans la production de caséine, une protéine essentielle du lait pour reproduire la texture du fromage ou de la glace. Son objectif : produire à grande échelle sa caséine pour atteindre un coût à parité avec le lait. Une réalité qui pourrait être atteinte dès 2026.
La naissance de Standing Ovation
Mais avant de s’intéresser à la naissance de la startup, il faut d’abord se pencher sur une autre naissance : celle du fils de Romain Chayot, cofondateur de Standing Ovation. En effet, l’entrepreneur est devenu père d’un enfant intolérant au lactose.
À l’époque, il travaille pour une entreprise nommée Global Bioenergies chez qui il avait acquis une expertise dans la fermentation de précision. Dans cette entreprise, il appliquait cette technique pour réduire l’impact environnemental des biocarburants. Face aux problèmes digestifs de son petit garçon, Romain Chayot se demande s’il serait possible d’utiliser les mêmes procédés de fermentation de précision pour la production de lait.
Ces évènements ont lieu pendant la période des confinements liés à la pandémie de 2020 : un moment propice à la réflexion et au saut dans l’inconnu. Avec Frédéric Pâques, ils quittent tous deux Global Bioenergies pour créer Standing Ovation.
Une stratégie BtoB pour l’impact
Ils débattent pendant les premiers mois de l’entreprise sur la meilleure stratégie à adopter. Est-ce qu’il faut viser le grand public et produire du fromage issu de leur caséine non animale ? Il s’agit d’ailleurs du choix de leur plus grand concurrent, une entreprise américaine qui s’est spécialisée dans la production de mozzarella pour la pizza.
Romain Chayot et Frédéric Pâques découvrent pourtant la réalité du marché : avec ces multiples urgences autour de l’impact environnemental de l’industrie, mais aussi celle de la souveraineté française de la filière du lait. Ils choisissent donc la stratégie BtoB, ce qui leur permettra d’atteindre l’impact le plus fort en venant fournir les grands industriels. Un partenariat est rapidement noué avec le groupe Bel qui est actuellement en phase de développement de produits tels que les Babybel ou les Kiri en utilisant la caséine de Standing Ovation. Un choix qui leur permet instantanément de réduire de 94 % les gaz à effet de serre produits par le lait utilisé.
L’industrialisation de la caséine
Ce partenariat les propulse dans la cour des grands. Dans la foulée, Standing Ovation annonce une série A de 12 millions d’euros menée par le fonds Astanor Ventures, avec les fonds Peakbridge, Seventure Partners, Big Idea Ventures, Good Startup, mais aussi une prise de participation du groupe Bel.
L’équipe, aujourd’hui constituée de 28 personnes, se concentre maintenant sur la production à grande échelle de son alternative aux protéines de lait, d'origine non animale et sans lactose. « Pour atteindre la parité de prix avec le lait, il nous faut produire des milliers de tonnes de caséine chaque année, explique Romain Chayot. Aujourd’hui, on en produit quelques centaines de kilos, mais on planifie de multiplier par un facteur dix chaque année. On devrait atteindre l’objectif en 2026 ou 2027. »
L’entrepreneur insiste pourtant sur le fait qu’il ne sera jamais une menace pour la filière laitière : « Je ne le souhaite d’ailleurs pas. On propose une complémentarité, mais il y aura toujours de la place pour des produits 100 % d’origine animale, ou avec des produits hybrides. »
L’utilisation de la caséine de Standing Ovation est pourtant en attente du tampon confirmant l’autorisation pour sa commercialisation auprès du grand public. Une autorisation qu’il devrait recevoir pour les États-Unis courant 2024, et qui attendra certainement 2026 pour la France.