Octave Lapeyronie et François Déchelette sont deux entrepreneurs aguerris. Le premier est notamment passé par Rocket Internet, Bain & Company et Kamet, quand le second a fait ses armes chez Groupon et TextMaster. Le secteur industriel, par contre, ils n’y connaissaient rien. Ils croisent pourtant le chemin du premier startup studio dédié à l’industrie, cofondé par OSS Ventures et OPEO. « Ils nous ont mis la puce à l’oreille sur le fait que le secteur industriel avait loupé plusieurs vagues d’innovation au cours des décennies qui venaient de s’écouler et qu’il y avait un grand besoin de technologies fraîches », explique Octave Lapeyronie, cofondateur de Fabriq.
Les deux hommes se rendent donc en usine pour la première fois de leur vie afin d’écouter les problématiques exprimées sur le terrain. « On a très vite constaté qu’il y avait un énorme investissement dans l’équipement industriel, dans la machine, dans l’automatisation, dans la collecte de données… mais les outils à destination des humains en comparaison étaient restés très archaïques. C’était des tableaux blancs, des cahiers papier, des gens qui s’écrivent des chiffres sur la main et qui se courent après dans les allées de l’usine. »
Six mois pour réussir
Durant leur carrière, les deux entrepreneurs ont utilisé des outils de productivité et de collaboration à la pointe. Ils décident de les adapter pour le secteur industriel.
« C’est quand même dommage d’avoir investi autant pour gagner quelques points de productivité sur les machines si on s’expose à autant d’erreurs humaines à cause d’outils qui ne sont pas adaptés », explique Octave Lapeyronie.
Les deux entrepreneurs se lancent donc en janvier 2019 en suivant la méthode très pragmatique du startup studio lancée par OSS Ventures et OPEO : en six mois, ils doivent réussir à facturer leurs premiers clients avec un simple MVP (produit minimum viable). Mission accomplie pour Fabriq qui arrive à vendre une première version qu’ils reconnaissent volontiers « atroce », mais qui était suffisante au vu des outils existants.
À partir de là, Octave Lapeyronie et François Déchelette développent l’outil tout en préparant une première levée en seed de 500 000 euros qu’ils annonceront en mai 2020.
Le Covid aurait pu être un coup dur pour Fabriq dont les premiers clients étaient principalement dans le secteur de l’aéronautique. Les entrepreneurs vont pourtant créer une solution plus flexible pour répondre aux besoins de différentes industries.
« On a su trouver des poches de croissance sur des secteurs qui se sont typiquement bien portés pendant cette pandémie comme l’agroalimentaire ou le secteur pharmaceutique », partage Octave Lapeyronie.
Questionnement philosophique autour de l’hypercroissance
L’entreprise réalise 300 % de croissance de ses revenus l’année suivant sa levée de fonds. Mais les deux fondateurs se questionnent immédiatement sur la trajectoire qu’ils veulent donner à leur entreprise. « On a été très bien conseillé par nos futurs investisseurs qui nous ont amenés à trouver un juste milieu. On cherche la croissance, mais pas à n’importe quel prix… surtout que nous sommes dans un secteur qui ne bouge pas à toute vitesse. »
L’entreprise vise tout de même un objectif de 10 millions d’euros d’ARR (Revenu Annuel Récurrent) avec une trajectoire qui devrait leur permettre d’atteindre la rentabilité. Les ambitions sont donc grandes pour Fabriq qui se voit déjà délivrer son produit à l’international. « On commence à se développer en Italie et en Allemagne et on va continuer ce développement progressif en Europe. Ensuite, ce sera peut-être le moment d’aller en Amérique du Nord. Il y a encore beaucoup de choses à accomplir… l’atelier est un tel terrain de jeu avec tellement de problèmes à résoudre. »