Pour un entrepreneur, la vente de son entreprise (ou « exit ») est dans le meilleur des cas un moyen d’atteindre une forme d’indépendance financière. Ariane Darmon, co-fondatrice d’iVESTA, du family office digital Sapians et experte de l’ingénierie patrimoniale, définit cette situation comme « la capacité à vivre des intérêts de son patrimoine ».
Mais déterminer quelle somme est nécessaire pour “vivre des intérêts de son patrimoine” n’a rien de simple, car cela implique de se poser la question du train de vie et des flux financiers nécessaires au quotidien, à court, moyen et long terme. Or, ce paramètre est propre à chacun et il peut évoluer avec le temps.
L’hypothèse d’un taux d’indépendance financière de 2%
“Par exemple, pour financer un train de vie de 2 millions d’euros par an et couvrir l’inflation, il faut 100 millions d’euros de patrimoine. Mais pour quelqu’un qui a besoin de 200 000 euros, 10 millions suffiront”, détaille-t-elle. Son calcul se base sur une hypothèse clé : un taux d’indépendance financière de 2%, qui prend en compte un taux moyen d’inflation de 2%, une fiscalité représentant un tiers des revenus, ainsi qu’une rémunération (optimiste) de l’épargne entre 5 et 6%.
Voilà pour le principe général. Ensuite, pour définir la stratégie patrimoniale correspondante, il convient de se projeter dans le temps long, en anticipant les grandes étapes à venir : étude des enfants, retraite, arrêt de travail du conjoint, changement de mode de vie… De ces scénarios découlent ensuite différentes options d’investissement, de financement et d’allocation du capital.
Un exercice intéressant à faire en amont d’un cash-out
“Ce travail de projection est intéressant à faire en amont d’un cash-out [cession d’entreprise ou vente d’une partie de ses parts] ou dans le cadre d’un LBO, lorsqu’on propose aux managers de réinvestir dans l’entreprise. Cela permet d’évaluer le capital à sécuriser ou les sommes qui peuvent être réinvesties”, précise Ariane Darmon, qui reconnait que cet exercice n’a rien d’évident, et peut même parfois s’avérer anxiogène.
“C’est souvent une étape difficile pour un entrepreneur. La vente de l’entreprise marque généralement le passage d’un salaire mensuel à des revenus financiers qui n’ont rien d’aussi prévisible. Il faut arriver à passer d’un raisonnement en termes de flux à un modèle de stock, avec des rendements irréguliers et instables” explique-t-elle.
L’intérêt de ces calculs n’est pas seulement d’anticiper les besoins futurs : ils permettent également de définir quelles poches d’investissement sont immédiatement disponibles pour de nouveaux projets, comme la création d’une nouvelle entreprise ou une activité de business angel.