«Si on buvait un shot à chaque fois que l’on parle d’IA, on ne sortirait pas d’ici vivant !» Cette phrase prononcée par Brett Martin, co-fondateur de la société Kumospace (Future of Work) et du fonds Charge Ventures, lors du Media Day de Slush résume parfaitement la boulimie d’intelligence artificielle qui met actuellement la tech en ébullition. Un an après la sortie de ChatGPT, l’euphorie autour de l’IA générative n’est pas retombée.
Si le potentiel qui en émane est désormais bien identifié, tout comme ses dérives, c’est désormais la question de la souveraineté qui est au cœur des discussions en Europe. L’édition 2023 de Slush n’échappe pas au phénomène, et le duel à distance entre le Vieux Continent et les États-Unis a bien lieu lors de cette conférence finlandaise. Preuve en est, Arthur Mensch, co-fondateur de Mistral AI, entreprise sur laquelle reposent les espoirs tricolores, a eu les honneurs de la scène principale pour expliquer l’approche de la jeune pousse afin de développer une IA générative open-source. L’entrepreneur, passé par Meta, en a d’ailleurs profité pour promettre de nouvelles annonces d’ici la fin de l’année.
Toujours sur la scène principale, c’est Romain Huet, Head of Developer Experience chez Open AI, qui est également intervenu pour faire la démonstration des dernières avancées de ChatGPT. Une manière pour l’entreprise américaine de revenir sur le devant de la scène pour des raisons positives après l’incroyable séquence qui avait vu Sam Altman, le patron d’OpenAI, évincé par le conseil d’administration de la société, avant d’être réintégré sous la pression de Microsoft.
L’open-source pour faire la différence
Face aux milliards de dollars déboursés par le géant américain pour donner plusieurs longueurs d’avance à OpenAI, la tech française et européenne tente de riposter depuis plusieurs mois. Mistral AI mène la meute de l’IA sur le Vieux Continent avec la startup allemande Aleph Alpha, qui a récemment levé 500 millions de dollars. De son côté, la pépite tricolore a bouclé un tour de table de 105 millions d’euros en juin dernier et chercherait également à tripler la mise pour accélérer son développement.
Aux yeux des fondateurs de Mistral AI, passés par les laboratoires de Google et Meta, comme la plupart des startups européennes positionnées sur le marché de l’IA générative, l’approche open-source est la plus pertinente pour tirer son épingle du jeu et rivaliser avec les poids lourds américains du secteur. Lors de son intervention à Slush, Arthur Mensch a estimé qu’il existe de nombreuses opportunités dans les secteurs de la santé, de l’éducation et de l’énergie.
Enfin un nouveau titan technologique européen ?
Si les startups européennes du secteur se montrent optimistes à adresser les enjeux inhérents à l’IA générative, elles se méfient de l’AI Act qui doit réguler le secteur dans l’Union européenne. A Helsinki, Arthur Mensch n’a pas éludé le sujet. S’il se dit conscient de la nécessité d’encadrer les usages autour de l’IA générative, il est davantage partisan d’une approche nuancée plutôt que très stricte comme le laisse présager la version actuelle du texte européen.
Reste désormais à savoir si le cadre final fixé par Bruxelles permettra l’émergence d’un titan européen technologique qui se fait désespérément attendre. A l’exception de Spotify, aucun autre acteur du Vieux Continent n’a réussi à décrocher un tel statut. Dans une révolution aussi majeure que celle de l’IA, voir Mistral AI ou Aleph Alpha y parvenir serait un signal fort. Toujours est-il que la bataille bat son plein dans le secteur des deux côtés de l’Atlantique et Slush en est l’illustration.