Les ordinateurs, les serveurs, les data centers, les smartphones et autres appareils électroniques sont devenus des piliers essentiels de notre environnement professionnel. Cette dépendance croissante aux technologies numériques a engendré un problème insidieux et souvent négligé : la pollution numérique en entreprise. La pollution numérique ne correspond pas seulement à la consommation d'énergie nécessaire pour faire fonctionner les ordinateurs d'une entreprise. Elle regroupe tous les impacts environnementaux liés à des activités numériques. En passant par les équipements utilisés pour l'activité et jusqu'aux usages nécessitant une ressource énergétique.
"De l'extraction de métaux pour la fabrication d'ordinateurs, en passant par tout ce qui faut pour alimenter un ordinateur ou un data center pour réaliser telle ou telle activité numérique", précise Nicholas Mouret, cofondateur de Greenmetrics. Pour se faire une idée, "la fabrication d'un smartphone - environ 20 millions sont vendus chaque année en France - nécessite 70 matériaux différents, dont des métaux qui représentent 40 à 60 % du poids de l'appareil", lit-on dans l'édition 2019 de "L'économie et la société à l'ère du numérique", publiée par l'Insee. Plus globalement, "la consommation mondiale énergétique du numérique représente 2,7 % de la consommation mondiale totale d'énergie (de 1,9 % en 2013, elle passerait à 3,3 % en 2020)".
Pour Nicholas Mouret, il n'y a pas de gain d'argent lié à une réduction de ces impacts. "Ce n'est pas en réduisant les émissions liées à votre site internet que vous allez réduire votre facture EDF". Mais le fondateur de Greenmetrics parle d'être plus performant, tout en réduisant les impacts au maximum.
Gérer sa pollution numérique : une question de volume
Lorsqu'on parle de pollution numérique, les entreprises peuvent mettre en place des bonnes pratiques qui découlent du bon sens. Il est possible d'opter pour des équipements plus économes en énergie, de privilégier l'usage d'équipements reconditionnés, ou encore d'éviter le stockage excessif de données en ligne.
"Mais là où il va y avoir une difficulté, c'est lorsqu'on rentre dans des sujets techniques, ces bonnes pratiques sont difficilement mesurables et ajustables", explique Nicholas Mouret. Franck Lhuerre, cofondateur de Notify, pose le même constat et souligne les difficultés de volume : "envoyer un email ça ne coûte rien, mais ça consomme des ressources, ce n'est pas normal qu'il y ait encore des envois marketing massifs". L’entrepreneur parle par exemple d’ajouter la dimension de l'impact carbone directement dans un algorithme, avec des données externes, “sur le type de device détecté, les meilleures tranches horaires pour envoyer des messages, mais aussi les moments où ça consomme le moins. Ce sont des données open source qui vont permettre d'aller un peu plus loin sur la mesure de l'impact carbone”.
Imaginons une base de clients de millions de personnes, la seule manière d'appréhender ce volume, selon lui, est d'intégrer de l'IA applicative. "L'IA est très tendance. Il y a eu le big data, après le machine learning, ensuite le deep learning et ensuite l'IA. C'est une évolution dans les capacités de calcul". Quand on parle à Franck Lhuerre de la possibilité de gérer la pollution numérique en interne, il cite deux freins, "le temps pour développer les outils nécessaires, et le prix de ce développement".
Finalement, pour ne pas se laisser déborder par la pollution numérique, il faudrait justement appréhender les outils numériques qui peuvent la limiter.