Comme chaque rentrée, entrepreneurs, investisseurs et autres acteurs de l’écosystème tech se sont retrouvés au France Digitale Day ce mercredi 20 septembre. Au-delà de la venue de Margrethe Vestager, commissaire européenne à la concurrence qui brigue la présidence de la Banque européenne d’investissement (BEI), qui a constitué un temps fort de cette journée, cette nouvelle édition du FDDAY s’est distinguée par une évolution majeure : son rapprochement avec le CES Tech Trends, événement qui sert de rampe de lancement européenne au salon américain.
Pour défendre son statut de plus grand événement tech au monde, les organisateurs du CES ne s’y sont pas trompés en choisissant un événement phare de l’écosystème français, qui a pris l’habitude de venir en force à Las Vegas au cours de ces dernières années. «Pour nous, c'est stratégiquement intelligent d’être ici. Mais c'est un choix assez naturel car la France a un immense réservoir de talents et une forte culture entrepreneuriale, avec notamment un écosystème d’ingénierie de qualité», indique Gary Shapiro, PDG de la Consumer Technology Association (CTA), l’entité qui organise le CES, auprès de Maddyness. «Dans un partenariat, il y a la stratégie, mais il y a aussi l'alchimie», ajoute-t-il. Il y a quelques jours, Maya Noël, la directrice générale de France Digitale, évoquait, quant à elle, «un partenariat pour montrer que la France est visible du monde entier», dans nos colonnes.
«Je pense que la France a été célèbre pour beaucoup de choses au fil des années, comme la cuisine, la mode, la culture, la musique ou encore l’art. Mais la technologie n’a jamais vraiment été en tête de liste. Cependant, grâce aux investissements réalisés par le gouvernement français et au fait de participer à des salons comme le CES, cela a nourri la réputation du pays d'être connu pour ses avancées technologiques et pour la création de cette culture de startups», complète John T. Kelley, vice-président du CTA.
La French Tech en force à Las Vegas
Il faut dire qu’avec un écosystème de 13 000 jeunes pousses qui s’est considérablement étoffé au cours de la décennie écoulée, la France est devenue une nation majeure sur la scène technologique mondiale. La vitalité de l’écosystème tricolore se reflète notamment au CES, où plus de 200 startups françaises se sont rendues en janvier dernier.
Avec une telle présence, la délégation tricolore ne passe pas inaperçue aux yeux des Américains. «La France est le principal pays qui embrasse réellement le domaine des startups au sein du CES. Il y a même de nombreux pays, lorsque nous parlons à des gouvernements étrangers, qui viennent vers nous en disant : comment pouvons-nous être comme la France ? Que fait la France différemment ? Comment pouvons-nous reproduire cela ? Je pense que c'est ce qui est unique en France. Ce sont les premiers à avoir une telle approche. Les Français ont mis en place un vrai modèle», explique John T. Kelley. Des propos qui plairont certainement à Jean-Noël Barrot, ministre délégué en charge du Numérique, présent au Musée des Arts forains ce mercredi.
Une bataille des chiffres face à VivaTech
Au-delà du fort intérêt de la tech française pour le CES, il apparaissait opportun pour les organisateurs du salon américain d’occuper le terrain en France, alors que VivaTech s’est targué en juin dernier d’avoir accueilli 150 000 visiteurs pour revendiquer le statut de premier événement tech au monde. Une auto-proclamation qui a intrigué les organisateurs du CES, un salon réputé pour sa démesure et habitué à être l’épicentre de l’innovation mondiale quand il a lieu depuis plus de 50 ans. En janvier dernier, 119 000 personnes avaient fait le déplacement dans le Nevada, selon les organisateurs.
Quelques jours avant la tenue du CES Tech Trends au FDDAY, la CTA n’avait d’ailleurs pas manqué de rappeler à son tour qu’il était le plus grand événement tech mondial, soumis à un audit indépendant. «Le monde a besoin de plus d’un événement technologique. C'est donc une bonne chose d’en avoir plusieurs destinés à différents publics. Je pense que nous sommes différents d'un événement comme VivaTech. Nous croyons en la force de ces chiffres», assure John T. Kelley. «Vous devez faire attention à votre marque. Et votre marque doit s’accompagner d’une honnêteté et d’une transparence dans vos chiffres. Quand les gens parlent de chiffres, je les remets toujours en question», renchérit Gary Shapiro. C’est ce qui s’appelle remettre l’église au milieu du village.
130 000 visiteurs attendus au CES en 2024
Pour rester un événement incontournable à l’échelle mondiale, le CES aura une envergure encore plus conséquente en janvier 2024, promet le patron du salon de Las Vegas. Dans moins de quatre mois, ce sont ainsi 130 000 visiteurs, 3 500 exposants et plus de 1 000 startups qui sont attendus. Lors de cette prochaine édition, l’accent sera mis sur l'impact de la technologie sur la sécurité humaine et la protection des droits de l'homme, notamment au travers du droit aux soins de santé, à la sécurité politique et à la sécurité économique.
Au niveau des technologies qui seront mises en avant, l’intelligence artificielle tiendra, sans surprise, le haut du pavé, après l’euphorie déclenchée par l’arrivée de ChatGPT sur le marché. «Elle sera omniprésente dans tout le salon. Ce sera dans toutes les catégories. Vous le verrez notamment avec l’impact dans le domaine de la santé par exemple, sur la manière dont les consommateurs et leurs appareils analysent les données pour prendre des décisions basées sur ces données», confirme le vice-président de la CTA. La mobilité, avec les véhicules électriques, autonomes et volants, la maison connectée, l’agtech ou encore la beautytech, figureront aussi parmi les thématiques fortes du CES 2024.
Comme il n’est pas toujours simple de tirer son épingle du jeu dans le gigantisme du salon américain, Gary Shapiro a quelques conseils sous le coude pour les startups françaises. «Si vous participez à un salon comme le CES en tant que startup et que vous pensez que vous allez vous retrouver avec la même entreprise avec laquelle vous avez débuté le salon quatre jours plus tôt, c’est une erreur. Il faut aller écouter tous les clients potentiels. Ce que je dis aux gens, c'est de ne pas attendre d'avoir le prototype ou le plan parfait. Ayez l’idée et une manière de la présenter, puis écoutez ce que diront vos clients potentiels. Alors changez d'idée si les retours ne sont pas bons, mais ne perdez pas un an et demi à créer un prototype», lance le patron du patron du CES.
Pour éclairer les différents acteurs qui participent au salon américain (entrepreneurs, investisseurs, journalistes…), Gary Shapiro a d’ailleurs fait savoir à Maddyness qu’il serait judicieux d’organiser un panel sur le sujet lors du prochain CES Tech Trends pour aider chaque participant à faire de leur expérience au CES un succès. D’ici là, rendez-vous à Las Vegas du 9 au 12 janvier 2024 pour découvrir les tendances qui rythmeront la prochaine année technologique.