Deux nouvelles études qu’a pu consulter Maddyness sont sorties cette semaine au sujet des Séries A, qui correspondent au second tour de table lors d’une levée de fonds après le Seed. Elles font état des difficultés pour certaines startups françaises d’aller au bout de leur financement, mais mettent aussi en exergue de larges disparités entre les jeunes pousses et leurs créateurs… Explications.
La première étude, réalisée par la société d’investissement et Venture Capital Mighty Nine, a dénombré 100 Séries A réussies en France en 2022. Si ce chiffre est plus de deux fois supérieur à l’année précédente, où seules 42 Séries A avaient abouti, il demeure relativement faible en comparaison du nombre de startups qui ont réussi leur financement en pré-Seed ou Seed. Ces dernières seraient environ 5000. La probabilité de passer de la première étape à la seconde n’est donc que de… 2% !
Des inégalités géographiques ou de genre entre les startups
A ce constat, s’ajoute celui de lourdes inégalités entre les startups. Mighty Nine souligne par exemple que 84% de celles qui ont bouclé leur Série A sont basées à Paris ou en région parisienne. Dans une autre étude publiée par la plateforme d’investissement participatif Tudigo, qui s’étale elle de début 2022 à août 2023, on en compte 62,45% autour de Paris, contre 7,88% pour la région Auvergne-Rhône-Alpes, 5,67% pour l’Occitanie, et 4,81% pour la Nouvelle-Aquitaine.
Autre fossé : celui du genre. Les femmes restent “largement sous-représentées” : sur les 229 levées de fonds passées au crible par Tudigo, plus des trois quarts des équipes fondatrices sont “exclusivement masculines”. A l’opposé, moins de 4% sont uniquement féminines… et elles lèveraient également moins d’argent en moyenne, avec des montants 3 fois moins importants. “L’univers des startups qui réussissent à lever des fonds de manière importante est presque exclusivement masculin et la présence des femmes, en tous points, est beaucoup plus rare que dans le reste de l’univers entrepreneurial”, nous précise à ce sujet Alexandre Laing, cofondateur de Tudigo. Julien Petit, fondateur de Mighty Nine, évoque quant à lui un ratio de de 91% d’hommes et 9% de femmes.
Le profil-type de l’entrepreneur à succès
Ces deux études dressent finalement en fil rouge le portrait de l’entrepreneur qui réussit, et détaillent son “parcours-type”. Il s’agirait d’un homme parisien, si possible issu d’une grande école. En effet, environ 60% des startups ayant levé en Série A ont dans leur équipe fondatrice au moins un alumni de grande école (HEC, Centrale, Polytechnique, ESCP, ESSEC), ce qui leur permet visiblement de lever plus d’argent - jusqu’à trois fois plus que leurs confrères ou consoeurs non alumnis, selon Tudigo. 22% auraient également fait une prépa prestigieuse, révèle la seconde étude.
L’entrepreneur à succès peut avoir déjà fondé une autre société, dans 22,85% des cas, ou avoir occupé un temps un poste dans un grand groupe ou un cabinet de conseil (30%).
Pour Mighty Nine, 77% des startups analysées avaient au moins un Venture Capital au tour précédent de leur financement, tandis que seulement 12% avaient uniquement des business angels, et pas de VC. 67% de ces entrepreneurs ont développé un produit purement software, et les domaines les plus représentés restent la fintech (21% des jeunes pousses) et le commerce en ligne (8%), tandis que le social et l’éducation semblent avoir été laissés à la traîne. La startup de notre entrepreneur modèle a environ 4 ans d’ancienneté, et a été créée par plusieurs personnes (en moyenne, 2,83 cofondateurs très précisément).
Des solutions alternatives pour financer sa startup ?
Selon Alexandre Laing, ces inégalités dans l’accès au financement des startups sont importantes, mais globalement difficiles à étudier. Il reconnaît en effet “manquer cruellement de données pour pouvoir se rendre compte de s’ils augmentent, stagnent ou diminuent”. Cependant, les chiffres actuels sont là, et lourds de sens. Que faire, lorsqu’on n’appartient pas à ces catégories ?
Du côté des plateformes de crowdfunding comme Tudigo, on œuvre pour la démocratisation, sur tous les points, de l’accès aux financements. “Il est très clair que dans notre sélection, l’entre-soi des grandes écoles et l’entre-soi géographique n’entrent pas en compte, et nous portons une attention particulière à soutenir les diversités, femmes-hommes certes, mais aussi d’origines sociales.” Avec un ticket d’entrée à 1000€, le site entend “rendre l’entrée au capital des entreprises possible pour beaucoup plus de monde.” De quoi aider sans doute bon nombre de startups hors des sentiers battus…