"J’ai rigolé quand j’ai reçu le message sur Linkedin, j’ai cru à une blague", se souvient Hanna Feyler, la CEO et cofondatrice de Karacal, une startup qu’elle a créée en 2019 avec son associée Charlotte Durand autour d’une plateforme de contenus audios géolocalisés. Pourtant, il s’agissait bel et bien d’une demande entrante de Renault, par l’intermédiaire de son directeur des partenariats digitaux, Jean-François Labal. "Nous l’avons rencontré avec son équipe une semaine plus tard pour commencer à discuter d’une collaboration. C’est un peu ce dont rêve tout entrepreneur !".
Un partenaire, pas un prestataire
Le constructeur automobile avait en effet identifié la startup comme un partenaire potentiel pour étoffer son offre de contenus embarqués dans ses véhicules, grâce à ses “bulles sonores”. "Les situations de mobilité, et la voiture en particulier, sont des espaces extrêmement puissants pour les contenus", souligne Jean-François Labal, qui rappelle que le groupe Renault a initié depuis plus d’un an une stratégie ambitieuse en la matière.
Dès les premiers échanges, Renault a fait le choix de ne pas considérer la startup comme un de ses prestataires, mais plutôt comme un partenaire de long terme. "Karacal n'est pas seulement le fournisseur d'une application, c'est une startup qui a une vision et une compréhension du marché qui échappe à un grand groupe comme Renault, c’est une force de proposition. Nous avons adopté une approche humble, pour tirer parti de sa connaissance du marché", souligne-t-il, avant d’ajouter : "Aujourd'hui, ce n'est pas Renault qui pousse Karacal, mais c'est Karacal qui pousse Renault.".
S’intégrer dans les écosystèmes de Renault et Google
Tout au long de leur collaboration, la startup et le grand groupe ont ainsi noué des liens très forts, en mettant l’accent sur la communication. "Nous avons une gestionnaire de projet dédiée chez Renault et des points très réguliers avec les équipes, ce qui permet de débloquer très rapidement des problèmes", explique Hanna Feyler. Cette transparence et cette réactivité s’avèrent d’autant plus nécessaires que Karacal a dû s’insérer dans deux écosystèmes en même temps : celui de Renault et celui Google, qui fournit le système d’exploitation au sein des véhicules.
"Il faut bien comprendre que Karacal a développé pour nous quelque chose qui n’existait pas avant. Son intégration et ses fonctionnalités ont fait l'objet de négociations avec Google, en Californie. Nous avons négocié ensemble, parce que tout cela était nouveau y compris pour Google, qui est un nouvel acteur dans le monde automobile", souligne Jean-François Labal.
Une intégration progressive dans les nouveaux véhicules
Après plusieurs mois de co-développement, l’application Karacal est désormais intégrée à la Renault Austral, présentée lors du Mondial de l’Automobile 2022 et disponible à la vente depuis février dernier. Elle est aussi progressivement intégrée aux nouveaux véhicules de la marque équipés de l’interface multimedia openR link (Google Built-In).
S’il est encore trop tôt pour tirer de premiers enseignements en termes d’usages, pour les deux partenaires, la collaboration est déjà gagnante. "Dans notre roadmap, nous n'aurions peut-être pas été aussi rapides, Renault nous a aidés à accélérer", souligne ainsi Hanna Feyler.
Un tremplin pour l’international ?
Et ce n’est qu’un début. "Ce n’était pas juste un partenariat pour un lancement avant de passer à autre chose, il faut que cela s'inscrive dans le temps", insiste Jean-François Labal. "Nous ne sommes qu’à la première phase de notre stratégie de contenus : la création d’une base d’utilisateurs actifs. Une fois l’usage installé, cela sera un atout sur lequel capitaliser pour proposer encore plus. Les étapes suivantes vont permettre à Karacal de trouver un équilibre commercial et financier.".
Parmi les développements possibles : la production de contenus exclusifs pour Renault, une extension du service à l’international - ce qui marquerait une nouvelle phase dans le développement de la startup - ou encore la mise en place d’un modèle de monétisation. "Cela va de soi que le contenu, qui a une valeur, sera monétisé, d'une manière ou d'une autre. Il y a beaucoup de choses dans les cartons, beaucoup d'ambition sur ce sujet", précise-t-il.