Sur LinkedIn, les appellations de “part-time CMO” (pour “directeur marketing à temps partiel") se répandent. Dans les faits, ces missionnaires d’un nouveau genre occupent l’équivalent de plusieurs postes de direction dans différentes entreprises - mais à temps partiel et pour des durées variables, allant de quelques mois à quelques années : "Ce modèle existe aux États-Unis depuis de nombreuses années. Il se développe désormais en Europe et en France", affirme Marine Jouët, General Manager chez Iytro. Créée en 2018, cette startup est spécialisée sur le créneau des experts marketing à temps partiel.
Et de poursuivre : "Son déploiement a été fortement accéléré depuis la crise du Covid-19, en particulier pour certaines fonctions supports, comme le marketing.".
Pour la grande majorité des startups, le recrutement de talents est compliqué - d’autant plus lorsqu’il s’agit de postes de direction. "Les jeunes pousses ont beaucoup de difficultés pour recruter des C-level au démarrage : soit elles ne savent pas vraiment le profil dont elles ont besoin - et donc, il y a le risque de rater un recrutement, ce qui est onéreux -, soit elles n’ont pas les moyens de s’offrir la bonne personne, souligne Marine Jouët. Sans compter que le contexte actuel favorise le gel d’embauches. C’est pourquoi le modèle du temps partiel prend tout son sens.". Un constat partagé par Philippe Bonnet, partner In Da House, entreprise de consultants en marketing. "Sur le marché du travail, les nouvelles générations ont des aspirations propres : avoir davantage de libertés, découvrir plusieurs entreprises, se sentir challengés… Pour les entreprises, il est difficile d’attirer et de fidéliser des experts", commente-t-il.
Faire monter en compétences les internes
40 % des entreprises sondées disent recourir à ce modèle par manque de ressources financières pour une embauche en CDI, selon l’étude 2023 réalisée par In Da House. Parmi les autres raisons évoquées, 24 % disent vouloir avoir accès rapidement à des experts formés, 16 % veulent un éclairage spécifique sur un sujet défini et seulement 8 % pour remplacer une absence prolongée.
"Ce modèle permet de faire venir en interne des experts pouvant bâtir une vraie stratégie, monter une infrastructure, conseiller sur les outils, mettre en place les procédures… À la fin de la mission, l’entreprise pourra choisir d’embaucher un profil qui aura seulement à exécuter la stratégie", détaille Philippe Bonnet. "L’expert va aussi permettre de faire monter en compétences l’ensemble de l’équipe interne. Dans certaines entreprises, il y a parfois des équipes en place depuis longtemps, qui doivent encore se convertir aux leviers digitaux pour le marketing. Donc une personne extérieure peut jouer le rôle de locomotive.".
Gagner en flexibilité
Autre avantage : gagner en flexibilité. "Une startup n’a pas les mêmes besoins en amorçage qu’en série C. Le temps partiel lui permet de s’entourer d’une personne avec le niveau d’expérience adapté à son stade de développement", estime Marine Jouët.
Avoir un directeur à temps partiel requiert une disponibilité de la part des fondateurs. "La personne externe passe très peu de temps dans l’entreprise, parfois seulement un jour par semaine. Donc il va falloir une implication de l’entrepreneur pour que ça marche ! Le fondateur devra lui consacrer du temps pour lui donner toutes les informations pertinentes afin qu’il puisse être efficace", poursuit-elle. Viendra alors le moment du recrutement en interne. "Une personne à temps partiel n’a pas vocation à rester : la passation nécessitera aussi une implication du fondateur.".