Une récente enquête menée par l’Apm, auprès de 1.200 dirigeants d’entreprises, révèle un optimisme à l’unisson malgré l’inflation ou encore les effets de la crise énergétique. 70 % des sondés affirment avoir le moral et se projeter, contre 44 % pendant la période Covid. Comment expliquer cet élan immarcescible ?
70 % des dirigeants optimistes pour 2023 : invocations ou convictions ?
" En tant que CEO, je me dois d’être optimiste : notre moteur est de faire bouger les lignes. Nous vivons certes une période dramatique, mais c’est aussi un shift sociétal révélateur d’opportunités ", explique Alexandre Vinot, cofondateur d’Hestiia, entreprise qui propose une gamme de radiateurs écologiques. Cette vision quasi méssianique de l’entrepreneur est partagée par Yasmine Dahmane, cofondatrice de Bibak, opérateur de solutions de réemploi des contenants : " Je dirige 40 personnes. Si j’étais pessimiste à chaque épreuve, je ne pourrais pas assumer mon rôle. Ma philosophie ? La vie est semée d’épreuves : c’est notre capacité à les traverser qui participe à l'épanouissement personnel.".
D’autres dirigeants restent néanmoins plus modérés, comme Sébastien Roelens, CEO de Jumpl, une marketplace engagée sur le pouvoir d’achat : " Il y a 6 mois, j’ai eu une vraie baisse de moral car nous étions confrontés à des indicateurs inquiétants résultant de la période post Covid et du conflit ukrainien.". Une confiance solide en l’avenir qui reste mesurée par plusieurs sujets de préoccupation.
Entre inflation et hausse des prix de l’énergie, la pression monte
Toujours selon la même enquête, deux préoccupations sociétales sont mises en exergue par les dirigeants : l’inflation pour 50 % des interrogés, 59 % considèrent même le tandem inflation et pouvoir d’achat (clients et collaborateurs) comme le principal sujet auquel ils doivent faire face. " Nous avons augmenté les salaires dès 2021 en prévention. Mais deux ans plus tard, l’inflation est à peine compensée ", explique Alexandre Vinot. Côté clients, Flexliving, startup qui facilite le logement des télétravailleurs, a trouvé une solution à la problématique de flambée des prix locatifs: " À cause de l’inflation, les taux d'intérêt augmentent rendant l’accès au crédit plus difficile. Les personnes se sont davantage orientées vers la location. Donc les prix des loyers augmentent : ces difficultés, nous tentons d’y répondre avec notre modèle de location flexible et plus accessible à tous ", explique Caue Brioli, cofondateur.
Quant aux prix de l’énergie, les répercussions sur les coûts de production exigent une adaptation du modèle : " Nous subissons de fortes hausses de prix de la part de nos fournisseurs : c’est l’effet domino, nous devons l’imputer à nos clients qui, par ricochet, augmentent leurs prix finaux. Nous parvenons à gérer ces hausses en offrant davantage de services ", confie Yasmine Dahmane.
Environnement : l’urgence de faire plus
Le sujet climatique est préoccupant pour 55 % des dirigeants. 54 % ont donc mis en place des actions liées aux enjeux ESG (Environnementaux, sociétaux et gouvernance). " Cette période de tension sur l’énergie nous oblige à adapter nos modèles de production : pour nos composants électroniques, nous sommes à aller sourcer des produits dans des filières de recyclage ", explique Alexandre Vinot.
L’enjeu environnemental se confirme comme pilier de l’entreprise : " Le recyclage et la durabilité ont toujours fait partie de notre ADN. Nous devons reporter des indicateurs RSE auprès de nos investisseurs. À plus grande échelle, le contexte actuel confirme que ce mode de pilotage devient nécessaire ", souligne Yasmine Dahmane. La situation économique couplée aux nouvelles exigences des consommateurs en termes de responsabilité ont aussi accéléré les mutations des business models : " Nous avons pivoté vers une plateforme de e-commerce vertueuse en termes de pouvoir d’achat, mais surtout, qui assure une consommation responsable et transparente envers ses consommateurs ", explique Sébastien Roelens.
Recrutement : le sujet boomerang en filigrane
Le recrutement caracole encore en tête des préoccupations des dirigeants (52 %). " Nous ambitionnons de doubler nos effectifs chez BIBAK : ce n’est pas évident d’attirer des candidats, très sollicités et toujours plus exigeants. Nous sommes transparents sur la proposition de valeur en mettant l’accent sur des avantages propres à notre startup à impact : une grande flexibilité, des évolutions plus rapides et du sens ", explique Yasmine Dahmane. Les actions mises en place pour se distinguer ? " Payer au prix du marché, offrir de la flexibilité dans la gestion du temps et des congés… Ne pas avoir peur de faire différemment : nous avons récemment embauché une personne qui entrait en congé maternité, par exemple ", raconte Alexandre Vinot.
Autre enjeu, notamment pour les startups : trouver des candidats avec un esprit entrepreneurial selon Clément Meslin, Founder & CEO chez Edflex, plateforme de formation innovante : " Nous recherchons des talents qui partagent notre ambition de vouloir révolutionner le secteur de la formation. Notre leitmotiv ? Privilégier la qualité à la quantité.".
CEO en 2023 : le Sisyphe des temps modernes ?
En pleine crise et secouée par les agitations socio-économiques mondiales, la vie de CEO en 2023 s’apparente à un travail de Sisyphe démultiplié. Face à une telle adversité, n’est-ce pas l’opportunité de voir éclore une nouvelle génération de dirigeants ? RDV en 2024.