Chaque année, nourries par les nitrates présents dans les sols et les cours d’eau qui se jettent dans la mer, les algues vertes - communément appelées “laitue de mer” - grignotent un peu plus les littoraux. Il n’est pas rare d’entendre parler de “marée verte” lorsque cette algue - de la famille des Ulva -, recouvre des plages entières.
Outre l’odeur que la putréfaction des algues dégage, les marées vertes émettent de l’hydrogène sulfuré particulièrement néfaste pour la santé des acteurs locaux et du méthane qui contribue à l’effet de serre.
C’est en voulant répondre à cette double problématique que Philippe Lavoisier et Philippe Michon, tous deux issus du monde de la plasturgie, engagés dans la réduction de la pollution et fins connaisseurs des bioplastiques, ont créé Eranova. " Une alternative au plastique fossile devrait voir le jour, celle-ci devrait être végétale sans entrer en concurrence avec les ressources alimentaires. Dès lors, la valorisation de cette algue verte très polluante, est apparue comme une évidence pour créer une nouvelle génération de résine biosourcée. ", explique Philippe Michon, cofondateur et directeur général de la société.
Faire du problème une solution
La société, née à Port Saint Louis Du Rhône en 2016, a développé une solution innovante qui convertit chaque année plusieurs tonnes de macro algues vertes échouées sur les plages en ressource pour fabriquer quatre familles de résines. " L’effet Eranova a de multiples effets bénéfiques. Dans une première étape, Eranova récolte les algues sur les plages contribuant ainsi à leur dépollution. La Ulva est ensuite stockée dans des bassins où elle peut s’épanouir. En grandissant, la “Laitue de mer” capte le CO2 présent dans l’air. Enfin, nos bassins étant connectés à l’étang de Berre, les algues vertes vont se nourrir des nitrates et phosphates qui y prolifèrent et ainsi contribuer à l’amélioration de la qualité de l’eau, énumère Philippe Michon avant de poursuivre, en plus de préserver la biodiversité locale avec cette technique de bioremédiation, les algues présentes dans les bassins sont enrichies en amidon. Celui-ci est ensuite prélevé blanchi et transformé en résines aux applications particulières : durable, compostable, soluble… ".
Passer le procédé à l’échelle
Ce procédé disruptif et breveté a valu à Eranova d’être sélectionnée parmi les 18 lauréats du premier appel à projets “Première usine” inscrit dans le volet “startup industrielle et deeptech” du plan Industrie 2030. Et ce n’est pas tout, la société a également obtenu l’accord de la Banque Européenne d’Investissement (BEI) pour financer l’industrialisation à grande échelle de cette alternative aux plastiques issus d’hydrocarbures. En attendant qu’Eranova bénéficie des différentes subventions nationales et européennes, la startup a lancé une collecte sur la plateforme de financement participatif Wiseed. " Cumulés, ces fonds nous permettront de multiplier au centuple la taille actuelle de notre démonstrateur, mais aussi de le dupliquer à l’international en projetant les équipes que nous aurons constituées dans différents pays. " .