L'organisation a déposé une requête en référé suspension et estimé, lors d'une audience, que l'entrée en vigueur du décret au 1er octobre 2022 ne laisserait pas suffisamment de temps aux acteurs de la filière pour réorganiser leur activité, au risque de semer la confusion chez les consommateurs et de perdre des parts de marché. La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), pour sa part, a contesté l'urgence à suspendre, estimant que la promulgation de la loi en 2020 avait laissé suffisamment de temps aux industriels pour prendre leurs dispositions avant le décret d'application du 29 juin dernier.
La filière des protéines végétales avait espéré que la France ferait "marche arrière", d'autant que l'Union européenne, qui autorise ce type de dénomination à l'exception des produits à base de lait animal, avait manifesté sa désapprobation face à la décision française. L'avocat de Protéines France, Me Guillaume Hannotin, a dénoncé le manque de clarté autour de la liste des termes prohibés, estimant qu'il fallait "épouiller le Larousse gastronomique" pour la déterminer. Pour l'avocat, cette décision "octroie un monopole d'un champ lexical au bénéfice des filières" viande, qui ont soutenu ce décret et largement salué sa publication.
La DGCCRF a invité les industriels des simili carnés à "développer leur propre terminologie", estimant que les produits concernés ne remplissaient pas, malgré l'usage, les critères pour s'appeler "steak" ou "nuggets". "On va devoir appeler nos lardons "petits bouts roses végétaux?" Ça va être compliqué", a ironisé Nicolas Schweitzer, fondateur de la startup française La Vie, qui a souligné le paradoxe avec l'ambition du gouvernement de renforcer la filière des protéines végétales. France Protéines a dénoncé un "morcellement du marché", les produits "légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre Etat membre de l'Union européenne ou en Turquie" pouvant conserver leur appellation "saucisse" ou "brochette" végétale dans les rayons français.
Pour Isabelle Castex, directrice juridique du groupe Nutrition & Santé, cela remet donc en question le maintien de la production en France, les industriels songeant à délocaliser leur activité à rebours des objectifs de souveraineté alimentaire et industrielle. La décision sera rendue mardi ou mercredi.