Yousign, Front, Slite, Crew, Aircall... Voilà plus de 10 ans que Thibaud Elzière et Quentin Nickmans passent leur journée à créer des startups au sein d'eFounders. Au regard de leurs résultats, les deux associés semblent avoir trouvé la formule pour faire éclore pépites et licornes. Sur la trentaine de sociétés SaaS créées, sept ont fait l'objet d'un exit, à l'image de Briq, qui a été rachetée par Swile, Mailjet par Mailgun et Canyon par Yousign, pas plus tard que cette semaine. Sans compter les deux licornes, Spendesk et Aircall, qui figurent à son palmarès. Maddyness est allé s'enquérir auprès de Thibaud Elzière, du fonctionnement de cette usine à succès.
Quel regard portez-vous sur eFounders, après une décennie d'existence ?
Thibaud Elzière : Cela fait maintenant plus de 10 ans que l'on a lancé eFounders. Le bilan ? 30 entreprises qui atteignent une valorisation totale de 3 milliards de dollars et qui emploient plus de 2 000 personnes, à travers le monde ! Aujourd'hui, on récolte les fruits de cette décennie de travail avec notamment des gros succès comme Spendesk, la dernière licorne française en date, Aircall qui a franchit ce cap l'année dernière, et les prochaines qui ne vont pas tarder.
Même si les licornes se démultiplient et deviennent de moins en moins rares, on oublie trop souvent que la trajectoire la plus probable pour une startup c'est l'échec. Donc deux licornes sur trente entreprises lancées est un ratio complètement exceptionnel. Et cela, on le doit à la fois aux entrepreneurs brillants avec lesquels on s'est associé et à notre modèle qui permet d'entreprendre en équipe. Co-fonder une startup avec eFounders, c'est co-fonder avec non seulement un autre co-fondateur ou co-fondatrice, mais avec une équipe (une core-team) d'une vingtaine de personnes qui nous permet de mettre toutes les chances de notre côté pour aller plus vite et réussir. On est donc extrêmement fier d'avoir contribué à ces succès et aux prochains.
Certaines de vos idées ont-elles échoué à devenir des entreprises ?
T. E. : Transformer une idée en société demande énormément d'énergie. Quand on commence à s'essouffler, quand on se rend compte qu'on est moins excité par l'idée, qu'au fil des discussions avec des utilisateurs potentiels le produit qu'on lancerait a plus l'air d'un "nice-to-have" qu'un "must-have", quand il est difficile de trouver le fondateur ou fondatrice avec qui ça match, et qu'on se rend compte que ça fait quelques mois qu'on veut lancer l'idée mais que ça coince, on peut alors prendre la décision de passer à une autre idée.
On avait, par exemple, voulu aider les PME à accélérer leur transition numérique en imaginant un SaaS qui avait pour ambition de devenir la référence auprès des PME pour outiller son équipe et d'accéder aux logiciels les plus pertinents pour leurs besoins. On a commencé à travailler sur l'idée, qui avait même un nom : Chili. Nous nous étions associés avec deux co-fondateurs, mais après quelques mois de travail nous nous sommes rendu compte que ce modèle qui se rapprochait plus de l'agence qu'un SaaS traditionnel était trop loin de notre univers et nous avons dû arrêter. Nous n'avions pas incorporé la société et donc cette idée, sur laquelle on avait quand même mis des ressources, ne s'est jamais transformée en entreprise à part entière.
Avant de sortir de terre, l'idée est travaillée. Comment procédez-vous, en interne ?
T. E. : La core-team d'eFounders est une équipe d'une vingtaine de personnes, composée d'experts dans tous les domaines (Produit, Design, RH, Legal, Finance, Marketing, Communication...) qui travaillent aux côtés de nos startups pendant 12 à 18 mois. La particularité de lancer une startup avec eFounders, c'est ce support opérationnel très fort. Chez eFounders on entreprend en équipe. Nos CEO et CTO ont, dès le premier jour chez eFounders, le support d'une vingtaine de personnes prêtes à mettre les mains dans le cambouis pour créer une première version du produit, imaginer la stratégie Go-To-Market, recruter les premiers employés, lancer le premier site... C'est une chance inouïe pour les co-fondateurs d'avoir cette force de frappe, dès le début.
Le modèle d'eFounders repose sur l'association de deux co-fondateurs. Sur quels "critères" vous basez-vous pour évaluer leur adéquation au projet ?
En ce qui concerne les co-fondateurs entre eux, ce n'est jamais une science exacte car ça reste de l'humain, mais il faut absolument qu'ils ou elles aient le même niveau d'ambition et d'implication dans le projet. Lancer une startup est un chemin qui est semé d'obstacles et il faut être impliqué à 1 000 % pour réussir. Si l'un des co-fondateurs n'est pas autant impliqué ou motivé que l'autre, un déséquilibre émerge qui peut nuire à la startup. Il faut aussi qu'ils se fassent confiance sur leurs expertises respectives, mais partagent et soient alignés sur une vision et des valeurs communes.
Qu’est-ce qui a le plus changé dans votre manière de fonctionner, au cours des deux dernières années ?
T. E. : La core-team a grossi considérablement. Il y a deux ans, nous étions même pas 10 à travailler main dans la main avec les startups. Aujourd'hui, nous sommes environ 20 personnes. Notre portefeuille grossit lui aussi et donc naturellement on a besoin de plus de compétences en interne pour à la fois continuer à tout donner pour les startups qu'on lance mais aussi accompagner les entreprises plus matures de notre portefeuille, avec qui nous gardons une relation privilégiée en ayant un siège au board.
Bien que la core-team grossisse, on ne veut pas perdre le côté artisanal d'eFounders qui nous est cher. C'est important que l'on reste proche de nos co-fondateurs et que l'on construise ensemble comme une équipe à part entière. Le challenge des prochaines années va être de scaler eFounders, tout en gardant notre ADN artisanal. On ne veut absolument pas devenir une usine à startups.
Quelques mots sur l'avenir d'eFounders ?
T. E. : On est très enthousiastes pour le futur, et le long chemin qu'il reste à parcourir. On ambitionne de scaler eFounders, non pas en multipliant le nombre de startups qu'on lance chaque année mais en créant de nouveaux startup studios sur différentes verticales (web3, health tech, AI...), comme on l'a fait l'année dernière avec Camille Tyan en créant Logic Founders, notre startup studio dédiée à la FinTech.