Parcours et expertise : des facteurs de réussite à relativiser
Le parcours est souvent décrit comme le terreau d’un acte fondateur d’une aventure entrepreneuriale. Ce fut le cas pour Agnès Dupuy, fondatrice de FamyHelp : " J’ai eu l’idée de créer FamyHelp grâce à mes 10 ans d’expérience à la tête d’un réseau de service d’aide à domicile. Je me suis rendu compte qu’il fallait réfléchir à des moyens simples de leur venir en aide ". Du parcours se crée un regard sur un secteur, parfois une analyse critique, autant de critères qui alimentent une expertise qui enrichit le profil d’un porteur ou d’une porteuse de projet.
Thibault Lecerf tempère le poids de l’expertise et précise qu’elle n’est d’ailleurs pas sans risque : " On a parfois affaire à des experts qui par manque de distance n’arrivent pas à évangéliser leur projet, vulgariser. Souvent dans ces cas-là, ils peinent à convaincre, à embarquer leurs équipes, leurs clients ou leurs prestataires. "
Pour savoir s’il ou elle est fait·e pour son projet, un entrepreneur ou une entrepreneuse doit donc avant toute chose savoir se poser les bonnes questions. La motivation de départ, facteur clé de réussite, se complète chemin faisant par un ensemble de compétences, de rencontres, d’évolutions personnelles, qui font que le profil, autant que le projet, évoluent au gré de ce cheminement.
En apparence simple, l’adéquation entre un porteur ou une porteuse de projet et son idée cache de nombreuses nuances et de nombreux enjeux et c’est tout un ensemble de critères qui sont scrutés pour en définir la pertinence. Parler de profil, c’est parler de facteurs endogènes : l’appétence, l’expérience, les compétences, la personnalité ; mais aussi de facteurs exogènes : le réseau, le contexte de l’aventure entrepreneuriale, la réalité du marché.
Créateur, créatrice d'entreprise, de première pierre à clé de voûte
La grande majorité des conseils sur la préparation d’un business plan concordent au moins en un point : celui-ci commence par la présentation du créateur ou de la créatrice. Guillaume Malvoisin, expert en création d’entreprise chez Bpifrance, précise d’ailleurs que cette partie doit " montrer que le porteur est l’homme ou la femme de la situation, au travers de la présentation de ses compétences et de son expérience notamment ". Avant même la création, l’entrepreneur ou l’entrepreneuse est le premier ambassadeur ou la première ambassadrice de son projet, auprès des organismes d’accompagnement, des partenaires financiers, des prospects ou des fournisseurs. La symbiose entre le profil et le projet apparaît alors comme un prérequis, car pour toutes ces parties prenantes de l’écosystème mobilisé lors de la création d’une entreprise, l’analyse de la viabilité d’un projet commence par la perception de la personne qui le porte.
Cette harmonie est en outre un repère tout au long du chemin, dans les bons comme dans les mauvais moments, selon Coralie Millou, présidente et cofondatrice de Aÿ Cactus, avec Clémentine Poncin : " La conviction de lancer un produit qui correspondait totalement à nos propres attentes nous a habitées dès le départ et a donné du sens à notre projet. C’est aussi ce qui nous a permis de continuer y compris dans les moments difficiles ". Le fondateur ou la fondatrice, dans l’exercice de ses fonctions de dirigeant·e, doit donc garder en tête cette conviction, ce sens, pour continuer de convaincre en interne comme en externe. Or, pour convaincre, les compétences techniques ne sont pas toujours les plus importantes. Depuis quelques années, les soft skills sont sur toutes les lèvres. À raison selon Thibault Lecerf, qui a participé au lancement de plusieurs startups et qui est aujourd’hui à la tête du startup studio HighCo Venturi : "Les compétences techniques, ou hard skills, peuvent être très importantes, mais elles ne suffisent pas toujours et elles peuvent s’acquérir ou s’acheter. La capacité à écouter, à faire preuve d’empathie, à partager sa vision clairement - entre autres - forment un ensemble de soft skills tout aussi, voire plus importantes encore."
Et si le profil était une notion collective ?
Si l’image du créateur ou de la créatrice d’entreprise hardi·e, assuré·e, a encore la peau dure, est-ce suffisant pour dire qu’une personnalité introvertie n’est pas adaptée au lancement d’un projet d’entrepreneuriat ? Non, tranche Guillaume Malvoisin : " Tout le monde peut potentiellement créer ou reprendre une entreprise. Il n’existe pas de personnalité type. Les qualités qui font défaut peuvent être acquises ou compensées par des équipes complémentaires ". D'où l’intérêt d’une équipe bien pensée.
Les ressources externes comptent aussi beaucoup, poursuit-il : " Il existe aujourd’hui suffisamment de dispositifs d’aide et d’accompagnement pour que les traits de personnalité ne représentent pas ou plus de barrière à l’entrée ". Plus que la personnalité, c’est donc son analyse lucide, objective et sans concession qui permettra au porteur ou à la porteuse de projet de mettre à profit ses propres traits de caractère et d’identifier ceux qui lui manquent pour les trouver ailleurs si nécessaire.
Un bon réseau peut s’avérer précieux. À la condition de savoir s’en servir avec pertinence, souligne Thibault Lecerf : "Il ne faut pas sursolliciter son réseau, ne pas l’idéaliser. Il peut être un formidable atout si l’on sait s’en servir, mais il ne suffit pas" . Coralie Millou confirme : "Notre réseau était très spécialisé avec un fort ancrage dans le monde de la communication. Nous en avons donc utilisé les opportunités au lancement, principalement sur des enjeux de notoriété et d’influence".
Maddyness, partenaire média de Bpifrance