Lutter contre le gaspillage alimentaire, voilà le crédo de plusieurs startups comme Phénix et TooGoodToGo ou encore Beesk. Nouvelle pépite à l’abordage de ce secteur, Hors Normes propose en abonnement des paniers de fruits et légumes bio composés, non pas à partir des invendus des supermarchés, mais de ceux des producteurs, à des tarifs 20 à 30% inférieurs à ceux proposés dans les supermarchés. Un concept qui séduit les consommateurs : l’entreprise comptabilise déjà un millier de clients, mais aussi les investisseurs puisqu'elle vient de lever 1,5 million d’euros auprès de fonds et de business angels tels que Stride VC, Kima Ventures, Bertrand Jelensperger, Gokul Rajaram, Nicolas Douay, Greg Bulckaert, Nathanael Berbessou, Neeraj Berry, ou encore Enrico Pandian.
Atteindre le bon volume
Offrir des fruits parfaits à leurs clients, avec une surface lisse et sans aucune marque, telle est la demande des grandes surfaces. Exit donc tous les produits qui n’entrent pas dans ce cahier des charges. Face à ces critères de sélection, encore plus drastiques que le calibrage imposé par l’Union européenne, les producteurs se retrouvent face à une importante quantité d’invendus. Résultat, "les producteurs comptabilisent 5% de pertes sur leur récolte en raison d’une qualité qui ne correspond pas aux standards de la grande distribution - visuellement ou en raison du calibre - ou parce qu’ils ont des surplus" , détaille Grégoire Carlier, co-fondateur de la structure avec Sven Ripoche et Claire Laurent.
Avec son concept, Hors Normes leur offre une solution gagnant-gagnant : les producteurs écoulent une plus grande partie de leur production et Hors Normes achètent des produits comestibles à un prix inférieur à celui habituel.
Même si les producteurs y trouvent leur compte, la collaboration n’a pas été aussi évidente. "Ils fonctionnent uniquement sur de gros volumes. Leur acheter 50 kilos de pommes 'moches' ne leur parle pas. La plus petite unité de mesure est la palette, soit 600 kilos , détaille le co-fondateur. Le temps d’obtenir le volume requis, nous avons dû collaborer avec des grossistes de Rungis" .
La recette a rapidement séduit. "Nous avons posté une annonce sur un groupe de voisinage et le concept a tout de suite pris. Nous avons rapidement eu les 50 premiers clients" , explique Grégoire Carlier. Le bouche à oreille a fait le reste. "Pendant le premier confinement, nous avons seulement pu livrer les paniers mais nous nous sommes sentis utiles et cela nous a confirmé la pertinence de notre modèle" , assure t-il. Avec son millier de clients, la startup peut désormais négocier directement avec les producteurs. Les fruits et légumes sont acheminés par des transporteurs classiques à Rungis puis conditionnés en panier par la suite.
Déployer le concept
Hors Normes n’est pas la première startup à s’appuyer à ce type de gaspillage. Une autre marque, Les légumes moches - commercialisée au départ chez Intermarché - a vu le jour sans réussir à gagner en masse les rayons des supermarchés. "C’est aussi une question de timing, estime l’entrepreneur. La sensibilisation écologique des Français a changé au cours des 4 à 5 dernières années. Ce qui fait aussi la différence, c’est notre système d’abonnement et de livraison" . Et Hors Normes entend bien capitaliser sur l’évolution de cette prise de conscience pour poursuivre son développement.
Avec sa récente levée de fonds, l’entreprise souhaite étendre son influence en dehors de l’Ile-de-France. Une équipe est d’ailleurs dédiée à ce développement. Le second palier sera de s’attaquer à l’Europe, confrontée aux mêmes difficultés que l'Hexagone concernant ce gaspillage alimentaire à la source. Troisième objectif, et non des moindres : déployer ce modèle à d’autres produits. "Nous nous sommes concentrés dans un premier temps sur les fruits et les légumes bio. Nous allons conserver ce label pour cette catégorie de produits. Mais nous souhaitons aussi proposer des produits d’épicerie salée ou sucrée avec une centaine de références disponibles d’ici 6 mois" , développe t-il. Sur cette typologie de produits, par contre, le label bio ne sera pas forcément de mise, la société cherchant surtout à proposer "des aliments de qualité" .
En parallèle, les trois fondateurs réfléchissent également à un autre problème majeur de l'ensemble de la filière : celui des emballages et de la livraison qui ne sont pas encore totalement vertueux.