Pfizer, Astrazeneca, Moderna, Sinopharm, Johnson & Johnson (Janssen), Spoutnik-V... Plusieurs pays ont réussi à développer en quelques mois des vaccins pour lutter contre la pandémie de Covid-19. Mais pas la France. La pandémie a finalement mis en lumière le retard pris par le pays et ses industriels du secteur dans certaines technologies, comme celle de l'ARN messager. "Coté recherche, je ne peux pas faire un immense cocorico" , a d'ailleurs admis le Président de la République en présentant la stratégie Innovation Santé 2030. "Nous avons sous-investi clairement durant les 15-20 années qui viennent de s'écouler" , a-t-il encore regretté. Une analyse également réalisée par Vincent Giolito, Professeur, EM Lyon dans un article de the Conversation France dans lequel il explique ce retard français par la stratégie des grands laboratoires pharmaceutiques visant à déléguer la recherche aux BioTech depuis le début des années 2000. Emmanuel Macron entend bien remédier à la situation grâce à un plan de 7 milliards d'euros destiné à refaire de la France une nation innovante en santé.
Trois domaines prioritaires
Ce plan s'appuie sur l'analyse effectuée par les experts mandatés par le Conseil stratégique des industries de santé. L'État va ainsi investir 4 milliards d'euros de fonds publics auxquels devraient s'ajouter "au moins autant du privé" , selon le chef de l'État.
L'objectif est de réinvestir massivement et principalement dans trois domaines :
- Les biothérapies — avec 800 millions d'euros investis et complétés par deux milliards de fonds privés — qui sont des thérapies innovantes dont fait partie l'ARN messager, le moteur des vaccins stars de Pfizer et de Moderna contre le Covid.
- La santé numérique — avec 650 millions d'euros investis via le plan et 1,5 milliard d'euros provenant de fonds privés,
- Les maladies émergentes et infectieuses, qui bénéficieront d'une enveloppe de 750 millions d'euros selon les chiffres avancés par l'Élysée.
Dans ces quatre milliards de fonds publics figurent aussi 400 millions d'euros pour les programmes prioritaires de recherche. Mais aussi 600 millions pour créer des "clusters", autrement dits des sites intégrant recherche, soins, acteurs privés et valorisation industrielle des découvertes.
Accélérer les synergies et les mises sur le marché
L'un d'entre eux, centré sur le cancer, sera lié à l'Institut Gustave Roussy (IGR), en collaboration avec Polytechnique, Saclay, Sanofi et l'Inserm, dans le Fort de la Redoute, d'anciens bâtiments du ministère de l'Intérieur, a précisé à l'AFP le directeur général de l'IGR, le professeur Jean-Charles Soria. L'État va par ailleurs allouer plusieurs dizaines de millions d'euros pour permettre à de futurs talents de créer leur laboratoire de recherche en France, avec trois à cinq millions d'euros chacun.
Pour les PME et les startups de la santé, deux milliards d'euros seront mobilisés à travers la banque publique d'investissement Bpifrance. Ce qui répond à une réalité : Sanofi et l'Institut Pasteur ne sont pas les seuls à pouvoir faire émerger des solutions. Si elles ne sont pas souvent mises en valeur, plusieurs BioTech françaises se sont lancées dans la course au vaccin également. Enfin 1,5 milliard d'euros viendront soutenir des projets européens d'industrialisation.
Autre objectif: simplifier les démarches. Le chef de l'État souhaite un accès des produits innovants beaucoup plus rapide au marché, avec la multiplication de "fast track", qui permettent d'autoriser plus rapidement un traitement quand son bénéfice humain est important, comme le font les États-Unis. Enfin, une agence d'innovation en santé va prochainement voir le jour pour permettre la synergie des acteurs autour d'une structure unique.
Ce plan a été bien accueilli par les représentants des industries de santé, qui réclament régulièrement des mesures d'incitation à l'innovation. "Les mesures annoncées (...) nous donneront les moyens de restaurer la compétitivité et l'attractivité de la France" , a ainsi souligné Frédéric Collet, le président de la fédération française du médicament Leem. De son côté, l'association de technologies médicales Medtech in France a salué des mesures "concrètes pour les entreprises et les investisseurs du secteur" .