La banque de demain ne pourra émerger que grâce à une collaboration entre des établissements bancaires déjà bien installés dans leur secteur et des Fintechs qui viennent bousculer les codes établis. Solveig Honoré Hatton, Directrice Générale France de Mastercard, revient sur les logiques collaboratives à l'oeuvre dans le secteur bancaire.

Loin d’être un simple phénomène de mode, les investissements mondiaux dans les Fintechs ont triplé en quatre ans pour atteindre 15 milliards de dollars. Fin 2015, 14 Fintechs étaient valorisées 1 milliard de dollars ou plus. Aujourd’hui, on en compte plus de 25. 2018 devrait être l’année de la consolidation du secteur, avec une courbe des investissements en constante augmentation.

À l’heure où les grandes places financières européennes se battent en matière d’attractivité, notre écosystème s’enrichit d’incubateurs dont le but est de faire grandir ces startups qui réinventent la finance par la technologie et dopent la compétitivité de leur pays hôte. C’est le cas de la France qui a multiplié récemment des annonces de création d’incubateurs et espaces d’open innovation pour rivaliser notamment avec la City et faire de la place parisienne la future capitale de la Fintech.

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Dans le domaine des paiements, l’émergence des Fintechs et des acteurs non-financiers qui proposent des moyens de paiements directs, rapides et peu chers, remettent en question le rôle "d’intermédiaire" joué par les acteurs traditionnels. La nécessaire modernisation des infrastructures est une occasion pour ces derniers de se réinventer et de retrouver la croissance de long terme, en nouant des liens avec ces nouveaux acteurs de la finance.

La "coopétition" comme stratégie d’innovation

Malgré tous leurs atouts, l’essor des Fintechs ne signifie pas pour autant l’affaiblissement des grands groupes bancaires, en particulier ceux qui apprennent à jouer habilement avec ces innovateurs.  Les Fintechs travaillent aujourd’hui pour et avec les banques, dans une logique de coopétition. Si la coopération entre ces deux univers n’allait pas de soi il y a encore quelques années, la transformation digitale a changé la donne et souligne le caractère impératif de la convergence des banques et des Fintechs pour allier universalisme et particularisme, et réfléchir ensemble à des nouveaux services adaptés à de nouveaux clients dans un nouvel écosystème.

Reunion

Loin de désigner un grand gagnant, l’avenir de l’écosystème financier verra les Fintechs et les banques conserver leurs avantages compétitifs respectifs si elles admettent que leurs intérêts futurs convergent davantage. Les deux ont les atouts pour travailler ensemble, et ce que l’on constate de plus en plus, c'est une volonté de changement.

Pour comprendre où cette convergence peut avoir lieu, il faut d’abord comprendre quels sont les avantages compétitifs des Fintechs et des banques. Pour les premières, il s’agit de la liberté et de la capacité à utiliser une technologie de pointe pour construire des interfaces clients faciles d’utilisation. Ces startups symboles de flexibilité, d’agilité et d’innovation bouleversent le marché des banques et des assurances mais représentent globalement une amélioration du système bancaire et financier avec ces nouveaux services.

En Europe, l'une des principales tendances émergentes est la croissance des Fintechs dans des domaines horizontaux des services financiers grâce à des partenariats avec d'autres FinTechs. C'est ce qui se produit dans un contexte de prolifération de banques 100% mobiles comme Atom Bank, Monzo et Starling Bank, qui tirent toutes parti d'API ouvertes conformes aux normes bancaires et cherchent à devenir rapidement des guichets uniques pour répondre aux besoins des consommateurs en matière de services financiers.

Autre exemple, Revolut, startup londonienne lancée en 2015 qui propose des opérations de change sans commission et sans frais. L’entreprise a depuis élargi sa gamme de produits pour inclure des services additionnels, dont le transfert d'argent gratuit et l'assurance de smartphone. Une stratégie de diversification qui a permis à la Fintech d’atteindre la barre du million de clients fin 2017.

Les banques, quant à elles, malgré les défis de la régulation et de l’innovation auxquels elles font face, ont des atouts. Elles ont bâti des relations durables avec leurs clients. Alors que la génération Millenials serait prête à passer à une technologie bancaire plus avancée, la réalité est que la grande majorité d’entre eux choisissent toujours d’entretenir un relationnel avec leur banque plutôt que de chercher une alternative. La plupart des consommateurs perçoivent encore les institutions financières comme les plus fiables pour gérer leurs données en toute sécurité. Un sujet majeur à l’heure de la mise en application de la directive sur les services de paiement révisés (DSP2) qui, avec le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD), signent clairement la fin du contrôle exclusif des banques sur les données financières de leurs clients.

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La solution pour les banques est de reconnaître que la chaîne de valeur ne peut pas être maîtrisée par un seul acteur. Elles peuvent protéger leur modèle économique et se concentrer sur ce qu’elles font le mieux en utilisant l’innovation des Fintech à leur avantage. La "coopétition" est donc devenue la norme, voire une obligation. Cette nouvelle approche commune va au delà des fonds d'investissement ou de la recommandation mutuelle de produits et services. 2018 sera l'année d'une véritable collaboration, avec tout un ensemble de nouveaux termes d'engagement qui émergent dans le processus. Les uns et les autres ont plus que jamais besoin de l’autre pour redessiner la finance de demain...

Start Path, le programme qui provoque la rencontre entre banques et Fintechs

Depuis 2014, le programme Start Path permet à Mastercard de collaborer directement avec les startups du monde entier pour concevoir des solutions innovantes allant de l’intelligence artificielle au commerce conversationnel, en passant par la blockchain. Plus de 100 startups, issues de 24 marchés en Europe, intègrent ainsi un écosystème financier collaboratif en pleine mutation.