Franck Delorme, VC et business angel, a imaginé une série d’articles sur le développement aux U.S d’éditeurs de logiciel français. En effet, compte-tenu de l’importance et de la taille de ce marché pour les acteurs du logiciel, y compris pour les sorties, aller se développer aux U.S est souvent considéré comme un must : c’est là-bas que se font –et se défont aussi parfois…– les succès de nos startups. Dans ce contexte, Franck Delorme a souhaité raconter l’histoire et l’expérience (do’s & dont’s, lessons learnt…) de ceux qui l’ont fait afin d’aider ceux qui envisagent d’y aller. Découvrez la sixième des 10 sociétés sélectionnées pour ce projet : Neolane.
Les quatre associés fondateurs de Neolane avaient déjà une expérience du software en France et dans des sociétés américaines. Trois d’entre eux avaient travaillé chez un éditeur français Apsylog (IT Asset Management) et chez Peregrine Systems après le rachat d’Apsylog. Leur projet était de se relancer dans une nouvelle aventure du software d'entreprises. Ils ont choisi le domaine du marketing qui leur semblait en 2001 le plus pertinent. Le marché pour leur premier produit (plateforme d’envoi d’emails et de SMS) a décollé un peu tardivement et cela les a incité à enrichir très rapidement l'offre en l’étendant à la gestion des bases de données et des offres.
Passer par le Royaume-Uni pour mieux se lancer aux US
Même si l’ADN et la motivation des associés était un développement à l’international, ils ont d’abord voulu valider leur positionnement en France, en se fixant l’objectif d’avoir un modèle de vente réplicable et une société profitable. Avec des résultats nets de l’ordre de 15% en 2004 et 2005, leur choix aurait été de se lancer directement aux US. Ils ont dû se plier à la forte recommandation de leur investisseur financier et dupliquer d’abord le modèle au Royaume-Uni. Ils reconnaissent aujourd’hui que c’était la bonne décision.
C’est finalement en 2007 que le lancement s’est fait aux US avec la relocalisation de l'un des associés. Le principal challenge a été le recrutement de l’équipe locale qui devait permettre au fondateur associé de revenir en France au bout de deux ans. En pratique, il est resté aux US puisque trois VP Sales avec un potentiel de devenir Country Manager n’ayant pas donné satisfaction; ça n’est qu’après l’acquisition de Neolane par Adobe que le management américain a complètement pris le relai.
Pour le recrutement des autres positions US, la crise de 2008 a été bénéfique. En effet la société a pu commencer à attirer des profils de très bons niveaux en n’ayant pas ralenti ses recrutements à la différence de nombreuses sociétés US qui les avaient gelés. Il a fallu quatre ans pour que les opérations US deviennent profitables. L’entreprise a alors décidé de se déployer globalement à l’international avec l’ouverture entre autres de l’Allemagne, l’Australie, Singapour. Fin 2011, Battery Ventures est entré au capital avec une participation significative pour un investissement de $27 millions. Cet investissement a permis d’établir définitivement la crédibilité de Neolane sur le marché US.
Les « lessons learnt »
Parmi les raisons de la réussite de Neolane sur le marché US, Stéphane Dehoche met en avant :
- La présence d’un des associés aux US
- Le choix de l’installation sur la côte Est
- La localisation dans l’équipe US d’un ingénieur de « liaison » ayant une connaissance approfondie du produit, des projets clients et des équipes françaises. Ce poste a fait l’objet de missions de longues durées d’environ deux ans
- Les déplacements fréquents et encouragés par le management de collaborateurs US au siège français et vice et versa. Dans le cadre de sa stratégie de devenir un leader mondial du marketing conversationnel des entreprises, Adobe a racheté Neolane mi 2013 pour 600 millions de dollars. Le chiffre d’affaires de l’entreprise est estimé à 60 millions d'euros en 2013 dont près de 15% étaient réalisés par les opérations US.