Le bureau, espace par excellence de sociabilité des travailleurs, doit faire face à des usagers en attente forte de transformations. Et l’entreprise d’aujourd’hui, qu’elle soit startup, PME, licorne ou traditionnelle, ne semble plus avoir d’autre choix que de mener à bien cette conduite de changement.
2017, année de tous les fronts pour les bureaux. C’est le souhait que l’on pourrait faire pour les acteurs des « Futurs du travail ». Car de nombreux défis les attendent : intégrer les nouveaux modèles économiques fondés sur l'échange et l'ouverture, s’adapter à une urbanicité croissante (75% de la population mondiale vivra en ville d'ici 2050) qui implique de prendre en compte les enjeux de mobilité du travailleur ou encore penser la résilience des entreprises avec des « bureaux 4.0 », soit reflets d’un environnement digital mis sous le signe de l’Internet des objets.
" Avec 50 milliards d’objets connectés pour 7,6 milliards d’être humains sur la planète, la résilience de l’entreprise passera par l’Internet des objets "
À coté de ce nouveau réseau d’acteurs et maillage territorial - où règne flexibilité, agilité et diversité des espaces - les grands quartiers d'affaires mondiaux de la City à Central Area en passant par MidTown ou la Défense semblent être à l’opposé de cette dynamique. La fin des tours mono-fonctionnelles et spécialisées avec unité d'espace et de temporalité serait-elle enfin arrivée ? C'était la question récemment posée par l’Atelier Parisien de l’Urbanisme (l'Apur) dans sa dernière étude.
Et aujourd’hui - pour répondre à cette question - nous recevons dans Les entretiens des futurs du travail Nathanaël Mathieu, président de LBMG Worklabs, une startup leader sur les nouveaux modes de travail, et Bernard Michel, président de la foncière immobilière Gecina qui investit les questions sur les « futurs du travail » au sein du laboratoire de prospection et d’innovation, Gecina Lab.
Entre mixité entrepreneuriale et haut niveau de services: retour sur 2 visions pour les quartiers d’affaires de demain.
Comment voyez-vous les quartiers d'affaires d’aujourd'hui ?
" Les quartiers d’affaires doivent se réinventer vite et aller vers plus de mixité entrepreneuriale "
Nathanaël Mathieu, président de LBMG Worklabs
On voit qu'aujourd'hui la présence d'entreprises de toute taille est un besoin réel au sein des quartiers d'affaires. Le fait d'avoir des bâtiments sur lesquels les grandes entreprises se referment sur elles-mêmes entre en contradiction avec les attentes d'une nouvelle génération de travailleurs, privilégiant l'ouverture comme avec l'open innovation.
Pour Bernard Michel, les quartiers d’affaires sont attractifs. Si on prend - par exemple - La Défense, c'est le plus grand quartier d'affaires d'Europe continentale et l'un des plus grand au monde avec 400 entreprises, 75% de sièges sociaux et un niveau de location jamais atteint depuis dix ans. Mais il faut les faire évoluer vers plus de mixité des usages, d'intérêt pour les questions environnementales et pour les petites et moyennes entreprises. L' enjeu sera aussi d'attirer l'économie numérique dans ces quartiers, conclue Bernard Michel.
Quels leviers d'actions de transformation mettez-vous en place qui peuvent déjà être sources d’inspiration pour une nouvelle attractivité des quartiers d’affaires ?
" Aujourd’hui, c’est plus de 50% des salariés de la Défense qui souhaitent télé-travailler. Et quand on prend le RER A le matin, on voit bien la raison de cette envie ! "
Nathanaël Mathieu
La première réponse est donc de mettre en place des pratiques de télétravail pour faciliter la fluidité au sein des quartiers d'affaires et ainsi éviter les phénomènes d'engorgement aux heures de pointes. Il s'agit ensuite de développer des espaces différents qui soient plus proches de l'univers de la maison pour transformer la culture d'entreprise. C'est l'exemple des espaces de co-working.
Pour Bernard Michel les leviers d'attractivité passent déjà par avoir une approche beaucoup plus interdisciplinaire des espaces imaginés pour les usagés des quartiers d'affaires. Il s'agit, par exemple, de se tourner davantage vers les designers, les anthropologues, sociologues et spécialistes de la végétalisation. En effet, ces quartiers doivent être aujourd'hui organisés de manière à ce qu'il y ait une véritable vie autour des bureaux que nous construisons, insiste Bernard Michel. Hôtels, tourisme, stade, logements et maintenant résidences étudiantes et tiers-lieux sont ainsi développés pour changer le regard que nous portons sur les quartiers d'affaires.
De l’automatisation aux intelligences artificielles en passant par les chatbots, on a aujourd'hui beaucoup d’images sur les « Futurs du travail » qui nous viennent du domaine de la transformation digitale. Elles véhiculent un imaginaire en étroite résonance avec la mythologie d’une U-City dystopique et celle des séries techno-centrées et d’anticipation, comme Tripalium. A l’inverse, vous avez un modèle fondé sur l’humain, la rencontre, la sérendipité et la créativité.
Alors finalement demain : quelle vision des « Futurs du travail », selon LBMG Worklabs et Gecina ?
" Il y a un sujet très clair de la place de l’humain, de l’autonomie et de la responsabilisation que l’on va donner de plus en plus aux salariés : c’est la montée de l’intrapreneuriat "
Nathanaël Mathieu
Redonner plus d'autonomie et de sens aux métiers est une attente forte de la part des salariés. Pour l'entreprise, il s'agit donc d'accélérer la dynamique d'échange entre les compétences, les partenaires de la classe créative, et les entreprises, et cela au sein même de leurs bureaux. A charge aux acteurs de la ville (privés ou publics) de créer des passerelles entre les structures.
On peut ainsi imaginer que demain on ait des mini-usines locales à l’intérieur même des grandes tours de la Défense, partagées entre des entrepreneurs, des indépendants et des artistes pour dépasser cette « série de tours » juxtaposées, projette déjà Nathanaël Mathieu pour les Futurs du travail. Quant à Bernard Michel, il rappelle que la question des Futurs du travail ne doit pas être simplement corrélée au progrès technologique mais aussi et surtout à celle de l'innovation sociale dans les entreprises. D'ailleurs, Gecina en a fait son credo : parmi les 120 grandes entreprises cotées en France, Gecina détient la "palme" de la parité.
Pour autant - souligne Bernard Michel - la technologie et l'innovation sociale sont aujourd'hui très liées, comme on peut le voir avec les services aux salariés et la mixité des usages ou encore dans le domaine de la biodiversité qui permettent de re-qualifier la notion de bien-être au travail.
Retrouvez le podcast en entier : ICI.
Maddyness, partenaire média de Gecina