Concevoir des objets connectés de A à Z, c’est le pari de Bluegriot . Basé à Eurasanté, ce bureau d’études " vend sa matière grise " et modélise depuis plus de trois ans des objets de notre quotidien, aussi bien pour les entreprises que pour les entrepreneur.se.s. Le point commun ? Tous sont dits " intelligents ". En 2018, la startup s’est fait un nom en mettant au point 2500 cintres connectés pour les Galeries Lafayette Champs-Elysées. Une prouesse technologique que l’ingénieur Grant Erickson de Google Nest, la division d'objets connectés du géant californien, a lui-même applaudi.
Tout est allé très vite pour Bluegriot. En 2016, Rudy Houque est responsable innovation de l’agence Phoceis, spécialisée dans la création d’applications mobiles. Là-bas, dans le cadre d’un projet avec Eram, l’ingénieur en micro électronique propose de mettre au point une chaussure connectée. Un défi aussitôt accepté, aussitôt relevé. Le concept plaît et est une réussite. C’est la naissance de la " Choose ". Désormais, plus besoin de changer de chaussures en fonction de sa tenue, ce sont elles qui changent de couleur en une fraction de secondes. C’est pratique et tout se fait via Bluetooth depuis son smartphone, même si techniquement, cette métamorphose est rendue possible par des fibres optiques reliées à un circuit électronique.
La série de chaussures - rendue possible grâce au soutien d’Unistudio, d’Eram, de PHOCEIS, de Brochier Technologies, d’Eolane et du PICOM (appel à projets 2015 New Shopping Expérience) - est limitée à quelques 300 exemplaires mais suffit à provoquer le déclic chez Rudy Houque qui décide de fonder sa propre startup spécialisée dans l’IoT. Il embarque avec lui Ramuntcho Gassiat, son patron chez Phocéis. " On formait un binôme qui fonctionnait bien en interne. On voulait continuer cette collaboration à travers l’aventure de BLUEGRioT ; a priori, on avait la bonne recette ", se souvient Rudy Houque.
Le cintre connecté, une success story
Créée dès 2017, la structure ne veut pas perdre de temps pour se lancer à la conquête du marché des objets connectés. Cette année-là, quand les Galeries Lafayette lancent un appel à projets en vue de l’ouverture d’un nouveau grand magasin, au 60 avenue des Champs-Élysées, Bluegriot n’hésite pas une seule seconde et postule pour réinventer l’expérience client en magasin grâce au cintre connecté. " On a voulu concevoir un objet sur-mesure. L’idée, c’était de mettre au point un cintre connecté capable d’informer instantanément les visiteurs sur un produit et sur sa disponibilité. " Les Galeries Lafayette décident de parier sur Bluegriot, quand bien même la société est jeune. " Notre cintre connecté a un autre avantage : il permet de récolter de précieuses données. On peut, par exemple, savoir quel cintre a été le plus touché dans le magasin. "
Douze mois durant, Bluegriot travaille en étroite collaboration avec les Galeries Lafayette. Au programme : la création d’une carte électronique sur-mesure et le développement d’un logiciel embarqué. Des étapes incontournables avant de tout envoyer en production à Tourcoing. La conception de ce cintre connecté résume très bien la force du bureau d’études, capable d’aligner des compétences de design produit, de conception mécanique, d’électronique ou encore de software.
Des capteurs pour améliorer l’expérience client
Aujourd’hui, BLUEGRioT s’est bien agrandi (une quinzaine de personnes) et s’adonne à un tout nouveau projet : le développement de sa propre gamme de produit " Auditkit ", en partenariat avec Leroy Merlin et Mobivia (dans le cadre du programme New Shopping Expérience 2020). " Tout le monde s’accorde à le dire, la data, c’est le nouveau pétrole, l’une des richesses du 21e siècle, affirme Rudy Houque. En travaillant avec la grande distribution, on a remarqué qu’il y avait un paquet de datas à récolter sur le comportement des clients. Toujours dans l’idée d’améliorer leur expérience en magasin. "
Alors, chez Bluegriot, les ingénieurs en microélectronique et en mécanique ont imaginé des capteurs nouvelle génération pour récolter des données. " Des solutions existent déjà mais généralement leurs installations sont coûteuses, ou sont trop spécialisées. On a donc voulu développer une solution innovante, faciles à installer et désinstaller, et à coûts optimisés. " Concrètement, via des capteurs, clipsables en deux temps trois mouvements devant l’étalage d’un magasin par exemple, il sera désormais possible d’enregistrer le temps de présence des clients, la détection de mouvement, le taux d’humidité, la température…
Soutenue par les financements européens du FEDER, dans le cadre du programme New Shopping Experience (1) de PICOM by Cap Digital (la branche Retail basée dans les Hauts-de-France du pôle de compétitivité Cap Digital), la technologie est en ce moment testée dans un atelier de Norauto et de Carter-Cash, spécialistes de l'entretien et l'équipement automobile. Mais Rudy Houque en est convaincu : cet objet pourrait bien devenir l’allié des magasins et des usines. " Le gouvernement a annoncé qu’en raison de la crise sanitaire, il va être instauré ce qu’on appelle la FMI (Fréquentation Maximum Instantanée), c’est-à-dire la capacité maximale de fréquentation dans un lieu. Les surfaces de plus de 400 mètres carrés ont désormais le devoir de compter en temps réel l’affluence en magasin. Auditkit répond clairement à ce besoin ", se félicite le cofondateur de Bluegriot, qui rappelle que les fonctionnalités de ces capteurs sont multiples. " Ils sont personnalisables et peuvent évoluer en fonction des besoins. "
Alors que la phase de tests touche à sa fin, Bluegriot a un autre plan en tête : s’ouvrir à l’international. " La crise sanitaire a rebattu les cartes, considère Rudy Houque. C’est le bon moment pour développer d’autres cas d’usages. " La technologie sera d’ailleurs présente en janvier 2021 au National Retail Federation de New York, la grand-messe internationale des retailers. Mais virtuellement, pandémie oblige.
1.Le Fonds européen de développement régional (FEDER) apporte un soutien financier à l’ensemble des startups du programme New Shopping Experience de PICOM by Cap Digital, et permet de soutenir 50% des dépenses engagées par BLUEGRiot dans le cadre du projet AuditKit sur une enveloppe globale de 60 à 80k€.