La CFDT, FO, la CFE-CGC et la CFTC ont émis un "avis favorable" sur la dernière version du projet d'accord national interprofessionnel (ANI) sur le télétravail, soumis jeudi par le patronat, mais pas la CGT, a annoncé Hubert Mongon, le négociateur du Medef. "Bien évidemment, le texte a reçu l'assentiment de la CPME et de l'U2P", a-t-il ajouté à l'issue de cette ultime réunion, lors d'une conférence de presse téléphonique. Cette négociation "s'achève positivement", a-t-il estimé, mettant en avant des "points importants" de cet ANI, comme le double volontariat (de l'employeur et du salarié), la réversibilité – qui permet à un salarié de revenir sur son lieu de travail si le télétravail ne lui convient pas – ou encore le droit à la formation.
Hubert Mongon a loué "un texte opérationnel" mais refusé de préciser si le texte était non contraignant pour l'employeur ("ni normatif ni prescriptif", comme le présente la CGT), un objectif que s'était fixé le patronat et contesté par les syndicats. Un ANI "par définition, lorsqu'il est signé par une majorité d'organisations professionnelles et patronales est un accord qui s'installe dans le paysage juridique des entreprises et du pays", a-t-il souligné. "À ce titre, ça devient un accord de référence et qui a vocation à être étendu" par la loi, a-t-il ajouté. Pour rappel, un ANI s'impose à tout employeur membre d'un syndicat patronal signataire (Medef, CPME et l'U2P).
Les organisations syndicales ayant émis un avis favorable doivent encore les soumettre pour approbations auprès de leurs instances représentatives dès jeudi "après-midi" ou "après", a ajouté Hubert Mongon. Le texte est ouvert à signature après ces approbations jusqu'au 23 décembre. Une réflexion a été engagée entre le gouvernement et les partenaires sociaux dans le but de rendre le télétravail obligatoire pendant les premiers mois de 2021, selon le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux.
Voici les principales mesures du projet d'"accord national interprofessionnel pour une mise en oeuvre réussie du télétravail", soumis à signature :
Éligibilité des postes au télétravail
Au centre d'un véritable bras de fer, ce sujet a sensiblement bougé en faveur des syndicats. Alors que le patronat considérait jusqu'à présent que l'éligibilité relevait uniquement de la responsabilité de l'employeur, la version finale accorde une place aux syndicats: "La définition des critères d'éligibilité peut utilement alimenter le dialogue social". Le comité social et économique (CSE) "est consulté sur les décisions de l'employeur".
Télétravail en temps de crise
La mise en place du télétravail (c'est-à-dire les conditions) en cas de circonstances exceptionnelles ou de "force majeure" (pandémie, catastrophes naturelles, destructions des locaux d'une entreprise), se fait dans le cadre d'"un accord ou, à défaut, la charte relatifs au télétravail". Comme le souhaitait la CFDT, ce chapitre a été étoffé, préconisant notamment "l'élaboration d'un plan de continuité d'activité ou d'un plan de reprise d'activité".
Volontariat et réversibilité
Le texte propose de remplacer les articles 2 (volontariat) et 3 (réversibilité) de l'ANI 2005. La CGT estime que la formulation utilisée dans le nouveau texte entérine "l'absence d'avenant au contrat de travail qui précise les modalités de passage en télétravail". Le texte reprend la notion du double volontariat (salarié et employeur) et garantit désormais pour la réversibilité le retour du salarié sur son même poste ou sur un poste à qualification égale. Le refus de télétravail par l'employeur doit être formulé par écrit.
Les accords salariés-employeurs
La mise en place du télétravail va toujours passer par un accord collectif, une charte ou un accord de gré à gré entre l'employeur et le salarié.
Prise en charge des frais
Les frais engagés par un salarié "doivent être supportés" par l'employeur et ce "peut être" le sujet d'un dialogue social en entreprise. Les syndicats estiment qu'il doit l'être "obligatoirement". La CGT regrette qu'il n'y ait pas de prise en charge des frais d'internet, chauffage ou électricité. Une éventuelle allocation forfaitaire sera exonérée de cotisations, propose le texte. Les syndicats soulignent qu'il n'y a pas de garantie de prise en charge de l'employeur du matériel professionnel.
Droit à la déconnexion
Il doit faire l'objet d'un accord ou d'une charte. Les managers doivent être formés, point positif pour les syndicats, qui souhaitent des obligations en matière de prévention et protection de la vie privée des salariés.