Nous vivons une transformation technologique majeure. L’irruption de l'intelligence artificielle générative et des agents autonomes s'apprête à bouleverser le fonctionnement des entreprises, en automatisant des tâches complexes et en intervenant directement dans les processus. C’est toute la productivité, les métiers et les modèles de création de valeur qui vont évoluer.

Mais au-delà de leur impact opérationnel, l’intelligence artificielle devient un enjeu stratégique dans la compétition industrielle et géopolitique mondiale. Comparable par son impact à l’avènement de l’électricité, elle est aujourd’hui au cœur d’un bras de fer entre grandes puissances. L’exemple du contrôle de la production d’énergie montre à quel point les choix technologiques d’hier façonnent la souveraineté d’aujourd’hui. Dans ce contexte, l’Europe ne peut rester spectatrice. Elle doit, à travers ses entreprises, investir dans une IA qui renforce à la fois sa compétitivité et son autonomie stratégique.

La révolution de l’IA, moment décisif pour les entreprises européennes

En discutant régulièrement avec des décideurs d'entreprises européennes, je constate que beaucoup perçoivent cette révolution comme une opportunité, mais aussi comme un moment décisif. Ils soulignent l’urgence d’investir pour ne pas se laisser distancer, tout en évitant de s’enfermer dans des technologies verrouillées. Mais par crainte de prendre du retard, beaucoup concentrent leurs choix sur les solutions les plus visibles du marché, soutenues par la puissance marketing et financière des leaders du secteur.

Pourtant, les risques sont connus : dépendance vis-à-vis d’acteurs couvrant l’ensemble de la chaîne de valeur, recours à des technologies propriétaires, marginalisation des expertises métiers, et captivité face à des modèles économiques conçus pour maximiser la consommation.

Dans un contexte géopolitique incertain, les entreprises européennes doivent reprendre le contrôle de leur autonomie numérique. Après avoir massivement délégué l’hébergement de leurs données, il est essentiel qu’elles conservent la maîtrise de l’intelligence qui en extrait la valeur et oriente l’action.

Concilier performance et souveraineté, un impératif

Une prise de conscience encourageante émerge : de plus en plus de voix appellent à une IA ouverte, modulaire et responsable, construite sur des technologies open source et interopérables. Des solutions que les entreprises peuvent déployer librement, sur leurs propres infrastructures ou dans le cloud de leur choix. Elles leur permettent de garder la main sur leurs actifs stratégiques, d’industrialiser l’IA selon leurs propres règles, tout en embarquant les métiers pour préserver leur savoir-faire. Et bonne nouvelle : une part croissante de ces technologies de classe mondiale sort d'équipes de R&D européennes.

Choisir cette voie, c’est concilier performance et souveraineté. L’Europe a tout pour réussir : des talents, des technologies, et une vision d’une IA éthique et durable. Il est temps de transformer ce socle en véritable levier stratégique.

Il n’est pas trop tard. Tout se joue maintenant, dans les décisions que prennent les entreprises européennes. Et parce que ces décisions façonneront notre avenir technologique pour plusieurs années, il est essentiel que les directions générales s’en saisissent pleinement.

Pour en savoir plus sur la vision d’Amaury Delplancq, rendez-vous à la MKIA, le 29 avril, à la salle Gaveau. Il prendra la parole en fin d’après-midi lors de la table-ronde “Jusqu’où ira l’IA agentique ?”.