Plus de deux ans après le début de l’explosion de l’Intelligence Artificielle (IA) générative sur le monde, l’engouement ne s’est pas démenti. Les fournisseurs de LLM rivalisent tous les jours d’annonces et de nouvelles livraisons qui font tourner les têtes et promettent des lendemains qui chantent.
Cette frénésie est difficile à suivre pour les utilisateurs, la peur de se concentrer sur l’écume quand une lame de fond peut vous emporter n’a jamais été aussi forte. Mais la fréquence du changement invite en réalité à développer la stabilité et la continuité dans une approche d’entreprise pour éviter les écueils d’une navigation hasardeuse.
Les constats que nous pouvions dresser dès les premiers mois sont toujours valables pour embarquer dans ce voyage sans se perdre.
La carte : pour tracer sa route avec un cadre de décision solide pour déployer des cas d’usage d’IA générative
Le compas : pour évaluer son cap et gérer les risques
La planification : ne pas oublier les fondamentaux, les données, la formation des équipes, prévoir des plans B
Ces instruments de navigation sont la garantie de garder le cap dans une mer aux vents changeants et parfois violents. Leur utilité se confirme à mesure que de nouveaux défis viennent s’ajouter sur le parcours ! Si le risque des hallucinations, de l’incertitude réglementaire ou de la consommation énergétique des grands modèles de langage ont vite été identifiés, d’autres défis ont pris de l’épaisseur.
La situation géopolitique n’est pas immuable et la pondération de certains paramètres de l’équation du déploiement de l’IA varie. Pour les entreprises européennes, intégrer à sa grille de lecture une vue sur sa dépendance à des modèles, des solutions et des infrastructures non européennes devient une question qui n’a jamais été autant d’actualité. Le temps où certains théorisaient des entreprises sans usines semble révolu.
Le déploiement stellaire de l’IA générative provoque aussi des effets pervers, arrivés eux aussi avec rapidité. Une proportion croissante des contenus publiés aujourd’hui est générée par des IAs, ces contenus sont eux-mêmes scannés et utilisés par des IAs qui créent à leur tour des contenus dérivés, les créations et les idées nouvelles risquent d’être noyées dans le flot avec un potentiel d’appauvrissement général des contenus. L’IA agentique risquant de renforcer ce biais.
Enfin la combinaison de ces deux problèmes montre aussi à quel point des modèles employés avec une approche volontairement orientée vont être à la source de désinformation massive, un entraînement sur un corpus d’information biaisé produit des résultats biaisés qui peuvent à leur tour nourrir de la génération de contenu par IA (deep fakes, information erronées) qui vont démultiplier les conséquences néfastes des modèles déployés.
Dernier défi, les attentes de retour sur investissement rapide générées par les nouveautés de l’IA et leur caisse de résonance médiatique peuvent pousser à changer de direction brutalement et fréquemment. Pourtant, si la technologie évolue très vite et les promesses de long terme ne sont pas obérées, force est de constater que beaucoup de cas d’usages ne génèrent pas encore d’économies massives, que les organisations ne sont peut-être pas encore complètement mûres et qu’il faut investir de façon régulière pour espérer obtenir des résultats tangibles en entreprise. Le passage à l’échelle et l’impact pour les organisations dans leur ensemble se fera à ce prix. Mais ce n’est pas une raison pour abandonner l’aventure, au contraire ; objectifs clairs, constance et persévérance paient. Le programme Apollo démarre en 1961 pour un premier alunissage en 1969, Amazon a fait des premiers bénéfices en 2001, 7 ans après sa création, et a dépassé les ventes de Walmart au Q4… 2024.
Tels les explorateurs, les entreprises doivent développer leur courbe d’expérience, utiliser ou créer des outils pour les aider à naviguer. Celles qui réussiront auront su s’adapter au fur et à mesure à ces nouveaux paramètres tout en gardant un cap clair, la constance dans le changement en quelque sorte.