Joachim Fourquet et Matthieu Sénéchal, les deux cofondateurs de Hones, ont commencé en tant que CTO à temps partagé. Ils ont depuis ajouté à leurs offres la diligence technique, à destination des investisseurs. “Je viens du monde du Private Equity, explique Joachim Fourquet. J’ai vu des dizaines de collègues investisseurs miser sur des SaaS qui généraient du chiffre d’affaires… sans jamais ouvrir le capot. Cela peut sembler contre-intuitif ; c’est pourtant bien ce qui se passe ! Les investisseurs ne sont pas des « techos », ils font confiance plus facilement aux startuppers sur le volet technique. Et puis, il faut le dire : ils ont tendance à penser que la tech est une commodité. Un SaaS, ça ne doit pas être tellement compliqué, si ? C’est là qu’ils se trompent.”

Avec la crispation du marché depuis 2022, ces investisseurs se montrent toutefois plus avisés, selon les deux patrons de Hones.”Ils s’interrogent sur la façon dont ils ont mené leurs investissements entre 2017 et 2022, reprend Joachim Fourquet. Notre rôle, c’est de les aider à se pencher sur la stack technique, ainsi que sur l’organisation de l’équipe tech, tout aussi importante.“

Une problématique qui passe sous les radars : l’organisation de l’équipe tech

“La tech n’est pas une science exacte, complète Matthieu Sénéchal. Il y a des sujets de gouvernance et des choix politiques. Elle produit un effet boîte noire sur le CEO, qui se demande si son CTO lui dit tout, pense à tout… et si lui-même le challenge correctement ! Dans ces conditions, faire appel à un tiers pour tester la robustesse de l’actif technologique et pour évaluer la scalabilité de l’offre s’avère rassurant. »

Le binôme aux commandes de Hones organise des entretiens avec les équipes, pour confronter les points de vue. Il peut y avoir des décalages entre la vision des dirigeants et celle des opérationnels. “Sur l’IA typiquement, tout le monde affirme s’y être pleinement engagé, alors que certaines entreprises n’ont toujours pas intégré de CRM. Sans parler d’une stratégie data digne de ce nom.”

“Nous nous interrogeons également sur la communication entre les équipes tech et business, reprend Joachim Fourquet. Comment les techs sont-ils informés des enjeux commerciaux, comment leur fait-on remonter les problèmes rencontrés par les clients ? Et comment les techs travaillent-ils entre eux ? Qui revoit le code, qui fait les tests ?”

Car c’est un point-clef, qui passe complètement sous les radars pour quelqu’un qui n’a jamais travaillé dans la tech : la startup est-elle capable d’embarquer rapidement de nouveaux collaborateurs tech ? “C’est compliqué d’intégrer de nouveaux collaborateurs quand on grandit, c’est là qu’on perd de l’efficience, souligne Joachim Fourquet. “Accueillir un développeur sans lui fournir de documentation précise, ni lui expliquer les process, c'est comme présenter un énorme tableau Excel à un Sales, sans aucune explication, et en lui demandant d'être opérationnel rapidement. C’est ça, la réalité d’une boîte tech. Et c’est ça qui détermine sa capacité à scaler…”

Pérenniser une startup

La due diligence technique n’est pas seulement une photographie de l’existant ; elle amène son lot de recommandations, “concrètes et actionnables”. Il s’agit d’aider le fond d’investissement à challenger le CTO et l’équipe IT et à ne pas se fier uniquement à leurs déclarations. Autre erreur à éviter : négliger la sécurité et la conformité, alors qu’un risque cyber peut tuer une startup.

“Ce qui a fait péricliter Clinke (paiement mobile), c'est une mauvaise préparation de son organisation tech et des choix technologiques inadéquats. Un audit aurait pu déceler ces faiblesses au moment de l'investissement et permettre de corriger le tir. Mais la startup américaine s’est révélée incapable de gérer un nombre élevé d’utilisateurs, ce qui a conduit à une dissolution complète de l’entreprise en 2017 malgré une levée de fonds de 25 millions de dollars en 2013”, expliquent les deux fondateurs de Hones.

Dans un futur proche, on peut imaginer que ce seront les startups elles-mêmes qui demanderont cet audit, préparant le terrain pour rassurer leurs prochains investisseurs, concluent les dirigeants de Hones.