6 ans après le lancement du plan deeptech, Bpifrance décompte 2 589 deeptechs françaises. 42% d’entre elles sont des biotechs, medtechs ou dans le secteur de la e-santé. 25% sont des startups d’IA ou de quantique. Le montant total levé par les startups de ce secteur est en forte baisse de 31% entre 2023 et 2024, mais l’écosystème se consolide. Il est de plus en plus attractif à l’international.
La banque publique d’investissement note que la deeptech française est passée de la huitième place à la quatrième place mondiale en montants levés entre 2021 et 2024. Les Etats-Unis, la Chine et le Royaume-Uni trustent le podium mais la France double largement l’Allemagne, le Canada et Israël. L’écosystème deeptech gagne donc en attractivité pour les investisseurs privés, notamment étrangers.
La France mobilise ses capitaux pour l’IA
“La France génère un deal flow de grande qualité, avec des startups deeptechs à fort potentiel, des innovations de rupture et des valorisations encore attractives comparées à d’autres écosystèmes internationaux. Les investisseurs étrangers reconnaissent la profondeur technologique du marché français, sa capacité à produire des innovations disruptives et l’engagement de l’État dans le financement et la structuration de l’écosystème”, confirme Charles Beigbeder, président de la société de gestion Audacia et fondateur des fonds deeptech Quantonation (quantique), Expansion Aerospace (new space) et Exergon (transition énergétique) .
La France concentre 20% des levées de fonds deeptech européennes, le Royaume-Uni, 28%, pour l’année 2024. Mais le chiffre britannique est dû en grande partie à la méga-levée de Wayve, dans les véhicules autonomes, de plus d’un milliard d’euros. La France, elle se démarque largement dans l’intelligence artificielle et le quantique. Les levées de softwares comptent pour 43% du montant total des tours de deeptech. Elles ne comptent que pour 5% outre-Manche.
Un vivier de talents reconnus mondialement
“La France dispose de laboratoires de recherche de pointe dans des domaines stratégiques tels que le quantique, le nucléaire, le magnétisme, l’hydrogène, les batteries, les neurosciences, etc. Le pays s’illustre aussi en mathématiques et en intelligence artificielle, disciplines essentielles à l’essor des deeptechs”, souligne Charles Beigbeder. Le territoire français abrite de nombreux laboratoires de recherches mondialement reconnus : l’INRIA, le CNRS mais aussi l’Institut du Cerveau, l’Institut Universitaire de Cancérologie ou encore l’Institut de la Vision, pour ne citer que ceux-là.
“La France forme environ 50 000 ingénieurs et un nombre significatif de docteurs. En 2023, 15 200 doctorats ont été délivrés, marquant une hausse de 9,6 % par rapport à 2022. Cette progression est particulièrement marquée dans les sciences du vivant et les sciences exactes, deux secteurs essentiels à la Deeptech”, souligne le président d’Audacia. Ces doctorants se tournent de plus en plus vers l’entrepreneuriat et les startups. L’écosystème français est extrêmement prolifique. Ces startups peuvent s’appuyer sur un réseau de soutien fort : “base industrielle connectée à l’innovation, un soutien institutionnel fort et des fonds de venture capital spécialisés”, remarque Charles Beigbeder.
Manque de financement sur le late-stage
Mais, si la France crée des startups et sait comment les lancer, elle manque de ressources passé le stade de la série B. En 2023, 35 à 45% des financements se situent en seed et Série A. 24% concernent la série B et 33% la série C. En comparaison, aux Etats-Unis, moins de 24% des montants financent les premiers tours de deeptech. Les séries C comptent pour 38% et les séries B, pour 45%.
Or ce sont bien sur ces tours que les startups font face aux plus grands enjeux : internationalisation, commercialisation, passage à l’échelle. “Nous avons un besoin accru de fonds deeptech spécialisés et de fonds de scale-up”, rebondit Charles Beigbeder. “La France dispose d’une épargne abondante mais encore insuffisamment mobilisée vers le financement des startups technologiques. Des réformes incitatives et la création de fonds de pension orientés vers la tech seraient des leviers puissants.”
Pour flécher plus d’investissements vers la tech, nombreux sont les acteurs qui prescrivent la création de véhicules capables d’investir l’épargne des Français. “Pour renforcer la pérennité du financement, il est nécessaire de structurer des fonds de pension dédiés aux deeptechs et des fonds de fonds capables d’accompagner l’ensemble des acteurs du capital-risque”, insiste le président d’Audacia.