Après le NRF Retail’s Big Show qui a lancé les hostilités à New York en janvier, le petit monde du retail se retrouve cette semaine à Monaco. L’occasion de confirmer des tendances tech entrevues ces derniers mois dans le retail et de se tourner vers l’avenir avec ambition malgré les vents contraires de l’économie et de la géopolitique mondiale.

Au-delà de l’inflation qui continue de pénaliser le pouvoir d’achat des consommateurs, les commerçants doivent, plus que jamais, rivaliser d’ingéniosité pour attirer des clients. En effet, la multiplication des opérations commerciales, à l’image du «Black Friday» qui n’a cessé de monter en puissance dans l’Hexagone ces dernières années, et l’envol de l’ultra «fast fashion» ont brouillé les repères des consommateurs. Mais face à des opportunités qui se multiplient et un climat d’incertitude économique qui l’invite à la prudence, le consommateur devient beaucoup plus exigeant et attend désormais un parcours optimisé autant que possible sur l’ensemble de la chaîne de valeur.

La «Retail Apocalypse» appartient désormais au passé

Pour répondre aux nouvelles attentes des consommateurs, les retailers ont dû déjà commencé par revoir les vérités qu’ils pensaient acquises à l’aune de la pandémie de Covid-19. Avant même l’arrivée de la crise sanitaire, nombreux étaient les observateurs à estimer que les points de vente physiques arrivaient à bout de souffle et que l’avenir se jouerait complètement en ligne. Le spectre de la «Retail Apocalypse» planait sur le secteur… Si le virus venu de Chine a évidemment complètement paralysé le commerce dans les magasins pendant de longs mois, il n’est pas parvenu à l’éteindre définitivement. C’est même l’inverse qui s’est produit.

A la sortie de la pandémie, les consommateurs ont exprimé leur besoin de retourner en magasin, mais avec des attentes nouvelles. Il n’est plus question de simplement proposer une offre variée de produits, en attendant que l’un d’entre eux attire l’œil du client. Désormais, les points de vente se réinventent pour devenir de véritables espaces proposant pléthore d’expériences immersives et de connexions humaines.

Privilégier l’omnicanal 

Cette approche hybride démontre que le physique et le virtuel ne sont pas antinomiques mais parfaitement complémentaires. En effet, la crise sanitaire a permis de rappeler deux vérités inaliénables : l’Homme est un animal social et la technologie seule ne suffit pas. Désolé pour les défenseurs du métavers, le centre de gravité du shopping mondial ne va se déplacer dans un monde 100 % virtuel qui deviendrait le royaume des publicitaires et des acteurs du marketing. En ligne, certaines expérimentations n'offrent d'ailleurs pas totalement le résultat escompté, à l'image des cabines d'essayage virtuelles pour limiter les retours. Mais la maturité technologique à ce niveau sera peut-être bientôt au rendez-vous.

Le commerce «phydigital» et «omnicanal» a de beaux jours devant lui. Désormais, l’expérience commence au domicile du consommateur ou sur son smartphone, se poursuit en magasin et peut se conclure en ligne ou en point de vente. Autrement dit, le magasin de demain ne sera pas seulement un espace connecté, mais un lieu où l’humain et la technologie se compléteront pour offrir une expérience véritablement unique.

L’IA toujours plus présente pour anticiper les futures tendances

Unique comme la personnalisation attendue par les consommateurs. Et dans ce cadre l’intelligence artificielle présente des perspectives nouvelles. En effet, l’IA constitue une arme redoutable pour améliorer la connaissance client. En permettant de mieux extraire la data accumulée, l’IA apparaît comme un levier indispensable pour analyser les comportements des consommateurs, mieux anticiper leurs besoins et ainsi leur offrir des recommandations ciblées. Avec une meilleure compréhension des habitudes d’achat des clients, les retailers sont davantage en mesure de leur proposer des produits susceptibles de leur plaire, ce qui aboutit à une pression de la satisfaction client et à la génération de ventes supplémentaires.

Si l’IA a des résultats visibles directement pour le consommateur, elle permet aussi d’automatiser considérablement l’ensemble de la chaîne de valeur des acteurs du retail. En coulisses, la gestion des campagnes marketing est ainsi automatisée, que ce soit en matière d’e-mailing ou de stratégie social media. Cela permet aux équipes de libérer leur créativité pour créer des expériences plus immersives et compactantes. Dernier étage de la fusée, mais le plus important, la supply chain peut être optimisée de manière spectaculaire avec l’IA. Elle se révèle très précieuse pour améliorer la gestion des entrepôts et ainsi limiter les risques de rupture de stock. Sur le dernier maillon de la chaîne, elle permet également de limiter les délais de livraison.

L’un des exemples les plus parlants pour couvrir l’ensemble de la chaîne de valeur du retail provient du géant américain Walmart. En effet, ce dernier exploite des jumeaux numériques pour optimiser le fonctionnement de ses entrepôts. Il s’agit de l’un des cas d’usage concrets pour démontrer comment l’IA peut générer des gains de productivité significatifs avec un retour sur investissement significatif. De manière globale, l’IA générative est un levier décisif pour transformer le secteur du retail, avec des gains de productivité pouvant atteindre 2 % de marge annuelle supplémentaire, soit 400 à 660 milliards de dollars à l’échelle mondiale.

L’IA n’est plus une option, c’est une urgence pour se transformer

Maintenant que l’IA est là et s’apprête à devenir un nouveau socle technologique comme l’a été Internet il y a 25 ans, se pose désormais la question de son intégration dans les différentes strates des acteurs du retail. De l’acte d’achat du consommateur à la livraison, en passant par l’expérience en magasin et la logistique, l’IA s’immisce partout. Mais pour cela, il faut évangéliser les équipes aux nouveaux outils rendus possibles par cette technologie.

C’est une véritable course contre la montre qui s’impose car ne pas embarquer dans le train de l’IA dès maintenant, c’est se pénaliser pour les années à venir. Dans toute révolution de cette envergure, il y a des gagnants et des perdants. Et s’il est encore un peu tôt pour entériner la liste des vainqueurs de cette révolution dans le retail, certaines enseignes pourraient définitivement rester à quai dans les prochains mois.

Si l’IA constitue un moteur de croissance et un avantage concurrentiel durable, encore faut-il être capable de s’en saisir correctement. Sans surprise, les retailers américains sont nettement plus avancées sur le sujet, mais charge aux acteurs français et européens de se réinventer rapidement. Cette urgence sera au cœur des discussions du One to One Retail E-commerce. Le temps maussade de ces prochains jours dans le ciel de la principauté sonne d’ailleurs comme une invitation à ne pas rater ce virage, sous peine d’avoir une addition salée.