C’est un exit majeur qui vient d’être annoncé pour le secteur de la biotech française. En effet, Stilla Technologies annonce son rachat par le groupe américain Bio-Rad, spécialisé dans la recherche en sciences de la vie et du diagnostic clinique. Le montant de l’opération s’élève à 225 millions de dollars auxquels pourront s’ajouter des paiements supplémentaires en fonction d’objectifs atteints pour une enveloppe maximale de 50 millions de dollars. Soumise à l’approbation des régulateurs, la transaction devrait être finalisée d’ici la fin du troisième trimestre 2025.

Pour Rémi Dangla, co-fondateur et patron de Stilla Technologies, et ses équipes, cela marque l’aboutissement d’une histoire débutée en 2013 pour mettre au point des tests génétiques de nouvelle génération en fournissant aux chercheurs et aux cliniciens une solution PCR numérique flexible pour extraire de l’information génomique précise à partir d’échantillons biologiques complexes. Installée à Villejuif (Val-de-Marne), la biotech tricolore a réussi à s’exporter à l’international, notamment aux États-Unis, où elle dispose d’un bureau à Boston, mais aussi au Japon ou encore en Chine.

Rémi Dangla, « un futur capitaine d’industrie »

Dans le cadre de son développement, la société a bouclé plusieurs tours de table, dont le dernier de 26,5 millions d’euros avait été annoncé il y a moins d’un an. L’objectif affiché était alors de commercialiser sa nouvelle plateforme d’analyse génétique de précision Nio et d’aller chercher la rentabilité à l’horizon 2025, tout en portant le chiffre d’affaires de l’entreprise au-delà des 100 millions d’euros sous quatre ans. « Suite à cette dernière levée, Nio a été un vrai succès commercial et technologique. Nous avons pu faire la preuve de marché du produit, ce qui nous a permis d’enclencher l’étape d’après et d’éveiller les industriels du secteur », observe Rémi Dangla, cofondateur et CEO de Stilla Technologies.

Durant toutes ces années, la biotech a notamment pu compter sur le soutien de Kurma Partners, qui a pris part à l’aventure dès 2018, à l’occasion de la série A de 16 millions d’euros de l’entreprise, puis la série B en 2020 de 20 millions d’euros et enfin la série C dévoilée en mars 2024. « C’est la sortie la plus marquante de ma carrière », lance d’entrée de jeu Philippe Peltier, Partner chez Kurma Partners. « Stilla aurait dû être la première participation de notre fonds healthtech, mais je n’étais même pas sûr de pouvoir investir dans la société. Toutefois, peu importe que j’investisse ou pas, je voulais aider Rémi. Ça n’a pas été simple, mais voilà le résultat », se réjouit-il. L’investisseur ne tarit pas d’éloges à l’égard de l’entrepreneur : « Rémi est un visionnaire, un futur capitaine d’industrie. C’est un homme qui embarque de la première à la dernière minute. »

Stilla Technologies, une « étincelle » pour réveiller l’industrie française ?

Maintenant que Stilla Technologies s’apprête à basculer sous pavillon américain, comment ce dernier voit-il son avenir ? « Je ne sais pas encore quel sera mon avenir dans cinq ou dix ans », assure-t-il. Avant d’ajouter : « J’ai toujours eu à coeur de développer notre technologie. Je voulais montrer qu’on pouvait faire ce produit en France et qu’on était capable de l’industrialiser. Si on ne le fait pas en France, il ne reste rien derrière. Il y avait besoin de faire cette démonstration et ça n’a pas été facile. Il y a une faiblesse de l’environnement industriel en France. »

Dans ce contexte, Rémi Dangla et ses équipes ont d’autant plus de mérite aux yeux de Philippe Peltier. « Il y a ceux qui parlent d’industrialisation et ceux qui la font. Rémi fait partie de la deuxième catégorie », observe l’investisseur. Néanmoins, le patron de Stilla Technologies anticipe les critiques à venir concernant la vente d’une énième startup de la French Tech à un acteur américain. « Certains pourront dire que c’est encore une boîte française rachetée par les Américains. Mais c’est aussi la première fois qu’une biotech sur ce segment rencontre un tel succès financier. C’est uniquement grâce à ce succès qu’on pourra aller chercher d’autres succès encore plus gros », analyse Rémi Dangla. Et de conclure : « On ne va pas réindustrialiser la France juste avec de la bonne volonté. Créer une usine, ça coûte de l’argent. Or il y a un déficit de capitaux fléchés vers l’industrie en France à l’heure actuelle. J’espère donc que Stilla sera l’étincelle pour la suite. »