Le Sommet sur l'intelligence artificielle (IA) de Paris a donné lieu à de multiples annonces d'investissements et de coopérations internationales pour accompagner le développement de cette technologie, qui bouleverse des pans entiers de la société depuis deux ans. Voici ce qu'il faut retenir :

Centres de données

C'est le nerf de la guerre dans la course effrénée que se livrent les géants du secteur: de gigantesques bâtiments qui stockent les données et fournissent les énormes capacités de calcul requises par l'IA. Une grande partie des 109 milliards d'euros d'investissements privés dans l'IA annoncés par Emmanuel Macron dimanche seront principalement dirigés dans la construction de ces centres.

Plus gros montant révélé, les Émirats arabes unis, via le fonds d'investissements MGX, vont construire en France un "data center" géant d'un gigawatt (GW) pour un montant de 50 milliards d'euros. Il fera partie d'un campus axé sur l'IA, le plus grand d'Europe, dont la localisation doit encore être décidée.

Le fonds canadien Brookfield a également l'intention d'investir 20 milliards d'euros en France d'ici 2030, dont 15 milliards pour de nouveaux centres de données, avec un data center géant à Cambrai (nord de la France) d'une puissance de 1 gigawatt.

L'entreprise américaine Digital Reality va aussi financer des centres à Marseille et en région parisienne, avec un investissement cumulé supérieur à cinq milliards d'euros, tandis que la start-up française Mistral AI va lancer son premier centre de données dans l'Essonne, qui coûtera plusieurs milliards d'euros.

De son côté, l'entreprise britannique Fluidstack a passé un partenariat avec le gouvernement français pour déployer en France le plus grand super calculateur au monde pour l'IA dont la capacité atteindra 1 GW. Un premier investissement s'élèvera à 10 milliards d'euros.

En amont du sommet, le gouvernement avait fait la promotion de 35 sites prêts à accueillir des centres de données en France, répartis sur plusieurs régions.

Investissements

L'Union européenne va mobiliser 200 milliards d'euros dans le cadre d'une alliance public-privé baptisée "EU AI Champions Initiative", qui regroupe plus de 60 grands groupes industriels (Airbus, L'Oréal, Mercedes...) et de la tech (Spotify, Mistral AI). La Commission européenne y contribuera à hauteur de 50 milliards d'euros. La banque publique Bpifrance a indiqué de son côté qu'elle allait consacrer 10 milliards d'euros à l'IA d'ici 2029 pour soutenir son développement et son adoption par les entreprises.

Parmi les 109 milliards d'euros annoncés en France, on trouve le plan à 6 milliards d'euros du géant américain Amazon pour développer l'infrastructure "cloud" en France ou encore 5 milliards d'euros investis par le fonds américain Apollo pour des projets de connectivité énergétique.

En conclusion du sommet, 58 pays, qui incluent la Chine, la France et l'Inde (les deux coorganisateurs de l'événement), ainsi que l'Union européenne et la Commission de l'Union africaine, ont signé une déclaration pour une IA "ouverte", "inclusive" et "éthique". Sans les États-Unis et le Royaume-Uni, qui se sont abstenus, les signataires souhaitent une coordination renforcée de la gouvernance de l'IA et ont appelé à éviter "une concentration du marché" afin que cette technologie soit plus accessible.

Neuf pays, dont la France, des associations et des entreprises, ont aussi annoncé le lancement de "Current AI", un véhicule d'investissements pour une IA "d'intérêt général" dotée d'un montant initial de 400 millions de dollars, avec l'ambition d'en lever 2,5 milliards sur cinq ans, et parrainée par 11 dirigeants de la "tech".

Parmi les détracteurs de l'IA, plusieurs syndicats et associations françaises, comme la Quadrature du net, ont lancé "Hiatus", une coalition qui appelle à la "limitation drastique" de l'IA et à "résister" à son "déploiement massif et généralisé". De plus, lancé en parallèle du sommet pour l’IA, un "contre sommet" a lieu à Paris. Il rassemblait des personnalités autour du philosophe Éric Sadin et invitait à réfléchir sur le danger potentiel de l’IA pour l’éducation, le travail, ou la culture.

Enfin, on retiendra le "Plug, baby, plug" ("Branche-toi, bébé, branche-toi") d'Emmanuel Macron, référence au "drill baby drill", slogan de campagne de Donald Trump ("Fore, bébé, fore"), manière de mettre en avant l'"énergie bas carbone disponible" en France grâce au nucléaire pour alimenter les gigantesques centres de données qui fournissent la puissance de calcul nécessaire à l'IA. Et bien sûr, l'offre surprise qu'a reçue Sam Altman d'Elon Musk pour racheter son entreprise OpenAI, alors qu'il dînait lundi soir à l'Élysée.