Dans un contexte où le marché de l’emploi se tend (-8 % d’offres au dernier trimestre 2024 selon Hellowork), recruter les talents idoines devient un défi stratégique pour les fonds d’investissement. Pour accéder à des profils qualifiés rapidement et sécuriser des recrutements clés, ces acteurs clés de l’écosystème tech misent sur des cabinets de recrutement ciblés. 

Pourquoi ? Leur capacité à comprendre les besoins spécifiques des startups et à dénicher des leaders adaptés à des environnements mouvants en fait des partenaires essentiels. Réactivité, expertise sectorielle et conseils stratégiques : quels sont les critères prioritaires des fonds pour choisir leur cabinet RH ? Décryptage. 

Recrutement et fonds d’investissement : les spécificités du marché français 

  • Private equity (PE) et venture capital (VC) : deux poids, deux influences 

Le Private Equity (PE) et le Venture Capital (VC) adoptent des approches distinctes en matière d'investissement et, par extension, ont des attentes différentes en termes de recrutement, selon Henri De Lorgeril, cofondateur de WEFY Group. « En France, les PE ont structurellement plus de poids et sont donc plus interventionnistes dans les entreprises de leur portefeuille : ils s'impliquent directement dans leur gouvernance, notamment dans la sélection des membres du CODIR, afin de recruter des profils capables de mener des transformations stratégiques. »

À l'inverse, les VC n’interviennent que rarement dans le recrutement des membres du Comex ou du Codir des startups qu’ils financent. « Leur rôle est avant tout d’accompagner les fondateurs en les aidant à structurer leur équipe. Ils recommandent simplement des cabinets de recrutement lorsqu’un besoin devient critique », explique Caroline Pailloux, CEO d'Ignition Program.

  • Différentes typologies de cabinets de recrutement 

Le marché français des cabinets de recrutement qui opèrent avec les fonds se structure autour de deux grandes catégories d'acteurs : les cabinets globaux et les cabinets spécialisés. « Les acteurs internationaux connus sous l’acronyme SHREK – Spencer Stuart, Heidrick & Struggles, Russell Reynolds, Egon Zehnder et Korn Ferry – bénéficient d'une forte notoriété et d’un réseau mondial, mais leur maîtrise des spécificités du secteur tech reste limitée », explique Henri De Lorgeril.

À l’inverse, certains cabinets spécialisés en executive search tech se distinguent par leur connaissance approfondie des enjeux et des attentes des fonds d’investissement. « Vauban, Virtuoz – notre marque spécialisée en executive search –, Sonnar ou encore A Female Agency sont des cabinets positionnés en tant que “pure players” du recrutement tech pour des postes de niveau CODIR. » Ignition Program, cabinet RH, se démarque par sa capacité à identifier des profils clés : « Depuis onze ans, nous proposons une approche unique, centrée sur les talents de type entrepreneur et intrapreneur », ajoute Caroline Pailloux. 

Choisir le bon cabinet de recrutement : les 6 critères privilégiés par les fonds 

Critère 1 : Relation de confiance et habitude historique 

Les fonds d’investissement entretiennent une relation de long terme avec les cabinets de recrutement, fondée sur la confiance. « Une dimension relationnelle intuitive est fortement présente : les fonds ont souvent leurs consultants de prédilection au sein du cabinet », souligne Henri De Lorgeril. Caroline Pailloux corrobore l’aspect relationnel : « Au départ, Ignition Program a dû défricher un marché peu exploité par les cabinets classiques. Notre approche innovante a séduit les startups et les fonds. D’autres sont ensuite venus via le bouche-à-oreille et sur recommandation. »

Critère 2 : Expertise pointue du marché tech 

Dans le recrutement de C-levels tech, la capacité des cabinets à identifier rapidement les bons profils et à maîtriser les dynamiques du marché est un critère décisif. Henri De Lorgeril précise : « À un certain niveau de management, les profils clés, nous les connaissons tous. Nous savons qui cherchent, qui ne cherchent pas, leurs compétences... » L’accès privilégié à ces profils stratégiques permet aussi aux fonds de sécuriser des recrutements critiques, notamment dans des contextes sensibles comme le remplacement d’un dirigeant. « Cette situation requiert une confidentialité absolue en amont, d’autant que les fonds et les entreprises n’ont pas toujours arrêté les modalités du départ. »

Critère 3 : Diplomatie entre les parties prenantes 

Les recrutements impliquant un fonds d’investissement sont particulièrement complexes en raison du nombre d’acteurs en jeu. « Dans un recrutement classique, la relation se joue entre trois parties : l’entreprise, le candidat et le cabinet de recrutement, mais lorsque le fonds intervient, une quatrième partie prenante s’ajoute, rendant l’équation encore plus subtile », précise Henri De Lorgeril.

Cette intermédiation exige une grande diplomatie pour éviter que l’entreprise ne perçoive le fonds comme une entité intrusive dictant ses choix stratégiques. « L’objectif est de maintenir un équilibre entre les attentes du fonds et celles de l’entreprise, tout en démontrant au candidat une dynamique cohérente et alignée entre eux. C’est un vrai sport de finesse ! »

Critère 4 : Maîtrise des package financiers créatifs

Autre point critère important : la compréhension des montages financiers qui demeure un levier de négociation essentiel. « Lorsqu’un DG quitte une entreprise pour en rejoindre une autre, il doit gérer non seulement son départ, mais aussi la restructuration de son package d’actions », explique Henri De Lorgeril. Les cabinets spécialisés interviennent alors comme conseillers, aidant à sécuriser ces transitions et à garantir des conditions optimales pour le candidat et l’entreprise. « Dans la négociation, nous ne parlons pas uniquement de salaire mais de modalité d'accès au capital, à l'investissement dans l'entreprise ou encore l’octroi aux actions gratuites... », décrit Henri De Lorgeril. Cette dimension financière requiert une très bonne expertise technique tout comme « une part de créativité en termes de package », ajoute Caroline Pailloux. 

Critère 5 : Identification de profils à la fois experts et agiles

Savoir identifier des cofondateurs ou des associés de startup est une compétence à part entière. « En phase de Seed ou série A, les entreprises ont besoin de profils entrepreneuriaux, capables de s’adapter, d’apprendre vite et de gérer l’incertitude. En phase de scale-up et série B (ou plus), les fonds privilégient davantage des profils experts, structurants et spécialisés », précise Caroline Pailloux. Pour garantir l’adéquation des candidats avec l’esprit startup, Ignition Program a notamment mis en place des grilles d’évaluation qui mesurent la capacité d’un talent à prendre des risques, innover, s’adapter à un environnement incertain ou encore endosser des rôles hybrides, mêlant stratégie et opérationnel. 

Critère 6 : Prise en compte de l’ADN lors des différents cycles de financement 

Les cabinets spécialisés disposent d’une compréhension fine de l’ADN des startups ou des fonds qu’ils accompagnent. « Lorsqu’un cabinet a accompagné une scaleup sur plusieurs recrutements clés, il connaît sa culture, ses valeurs et les attentes implicites du management », insiste Henri De Lorgeril. Caroline Pailloux précise : « Le recrutement consiste essentiellement à comprendre les motivations profondes et sous-jacentes de part et d’autre, tout en prenant en compte le cycle de financement. » Pour cela, Ignition Program a développé le baromètre d'alignement professionnel, un outil en accès libre permettant de jauger l'adéquation entre les valeurs d'une entreprise et celles d'un candidat.