Trois jours sur la Croisette pour créer des connexions dans le secteur du private equity : telle est la raison d'être de l'événement numéro un du non-coté en Europe qui, pour sa septième édition, rassemble 3 900 participants venus de 37 pays différents.

Parmi les participants, 1400 sociétés sont présentes et plus de 600 investisseurs. Des institutionnels mais pas que”, précise Antoine Colson, CEO et managing partner d’IPEM. Une occasion pour l’écosystème d’échanger leurs perspectives sur les défis émergents et d'explorer ensemble les opportunités d'investissement dans le marché privé à travers un programme riche de conférences, rencontres B2B et sessions de networking plus intimistes.

Au total, près de 300 speakers sont attendus à l'événement parmi lesquels Josh Helfat, Directeur des Investissements Privés pour les Solutions d'Investissement Alternatives Globales chez J.P. Morgan, Amy Jupe Directrice Générale chez Goldman Sachs asset management, Viral Patel, Président Directeur Général de BXPE pour Blackstone, ou encore Claire Roborel de Climens, Directrice Mondiale des Investissements Privés et Alternatifs pour Bnp Paribas Wealth Management. 

Un optimisme teinté de prudence 

Malgré des mutations annoncées dès le discours inaugurale, une majorité des gestionnaires de fonds (GP) reste optimiste. Selon l'enquête paneuropéenne IPEM sur le capital-investissement 2025, réalisée en partenariat avec AlixPartners, 51% d'entre eux s'attendent à un meilleur environnement économique mondial en 2025, contre 44% l'année précédente. Cet optimisme serait notamment alimenté par l'émergence de nouvelles sources de capitaux, une volonté d'adaptation face aux défis du marché et des améliorations anticipées dans certaines régions ; aux États-Unis par exemple, où une administration plus favorable aux affaires stimulerait la croissance économique, influençant ainsi les attentes globales, malgré des conditions en Europe toujours incertaines. 

Présent au Venture Village - un espace dédié au VCs plus émergents - aux côtés d’Axeleo Capital, Breega, ION Pacific ou encore Vi Partner, Paul Bazin, Partner chez Daphni s’inscrit dans cet état d’esprit : « La crise des liquidité va perdurer, mais nous sommes néanmoins également positif pour l’écosystème dans son ensemble. » 

Pour Antoine Ganancia, Managing partner chez Clipperton la reprise économique est indéniable: "La perspective d'une baisse des taux d'intérêt rend le monde du capital-investissement plus attractif. Les gestionnaires de fonds sont plus confiants quant à la performance des sociétés, qui se stabilisent après le choc de la Covid-19. Les discussions que nous avons avec des gestionnaires de portefeuille (GPs) et des investisseurs institutionnels (LPs) révèlent un optimisme croissant ». Pour Antoine Colson, cela ne fait aucun doute “C’est l’effet US”.  Une vision partagée par Ben Marrel,  CEO et co-fondateur de Breega, “Quoi qu’on en pense, ce qui se passe aux US fait bouger les lignes. Les annonces sur DeepSeek également. Avec les changements, viennent les opportunités donc nous avons tendance à être optimiste pour l’année qui vient”.

Mais l'événement devrait également montrer que des inquiétudes persistent. Le protectionnisme, les guerres commerciales et l'incertitude politique planent et sont autant de raisons qui poussent les gestionnaires de fonds à rester sur leurs gardes. Et pour cause, ces facteurs affectent directement les coûts des entreprises, leur rentabilité et, par conséquent, leur capacité à investir et à croître. Des inquiétudes, plus que jamais légitimes. La semaine dernière le président américain Donald Trump annonçait son intention d'imposer des tarifs douaniers de 10% sur les importations chinoises à partir du 1er février 2025. 

La majorité des VCs présents pour rencontrer les LPs

L'IPEM s'est imposé depuis plusieurs années comme un rendez-vous majeur pour les VCs français, avec une participation massive des acteurs du marché. Jean Bourcereau, Managing Partner chez Ventech qui - comme ses pairs -, s’y rend pour rencontrer des investisseurs, confirme cette tendance en déclarant : "Je pense qu'il y a une grosse partie du marché. La plupart des confrères sont là. Ça fait plus ou moins trois ans que c'est vraiment un rendez-vous et que la majorité du marché vient".

Et pour cause, pour Ben Maurel, l’IPEM est une bulle propice aux affaires : “Être loin de Paris, permet de couper et pleins de moments sont pensé pour faire des connexions, voir des clients, rencontrer des prospects. C’est un indispensable dans la prospection commerciale. Rencontrer de potentiels co-investisseurs est aussi important pour nous les VCs.” Si le CEO de Breega affirme qu’aucun chèque ne lui a été signé sur le salon, il se réjouit d’avoir fait au moins douze rencontres prometteuses.

Cependant certains acteurs désireux d’attirer de nouveaux investisseurs à l’instar de Paul Bazin manifestent un peu de frustration : "La plateforme de prise de rendez-vous de l'IPEM semble privilégier la quantité au détriment de la qualité des rencontres. Le taux de conversion est faible au vu  du nombre élevé de sollicitations reçues par les limited partners (LPs) via cet outil". 

La configuration de l'IPEM révèle une distinction entre les marques établies et les fonds émergents. Comme l'explique Paul Bazin, "La plupart des VC français était là mais les marques implantées avaient un plus grand stand”. 

Jean Bourcereau de Ventech met en lumière l'évolution de l'événement : "Il y a plus de monde, mais la population a un tout petit peu changé. Cette année il y avait le focus sur les familles d'office, donc un peu moins d'institutionnel. Côté GPs à peu près la même chose." 

Malgré ces défis, l'optimisme prévaut pour 2025. Jean Bourcereau affirme : "je pense que nous sommes au début d'un nouveau cycle, nous allons revoir des sorties et avec elles, un peu plus d'enthousiasme. » 

La Wealth révolution en marche 

L’IPEM marque cette année un tournant décisif dans l'industrie du capital-investissement avec le lancement d'IPEM Wealth - un événement dans l'événement inédit en Europe - qui trouve sa concrétisation dans les IPEM Wealth Awards, une remise de prix qui met en lumière les contributions qui façonnent la démocratisation des marchés privés. Cette plateforme novatrice  qui réunit sous un même toit les family offices, les banques privées, les gestionnaires de patrimoine et les gestionnaires de fonds reflète la "révolution de la richesse" qui secoue le secteur, caractérisée par une démocratisation sans précédent. 

C’est la grande nouveauté cette année. C’était déjà courant dans le Venture avec le crowdfunding et les BA, mais ce n’était pas le cas dans la dette privée et l’infrastructure au sens large”, explique Antoine Colson.

Les marchés privés, englobant le private equity, le venture capital, la dette privée et l'infrastructure, gèrent aujourd'hui 15 milliards de dollars d'actifs à l'échelle mondiale. Ce volume a triplé depuis la création de l'IPEM en 2016, et les analystes prévoient son doublement à 30 milliards d'ici cinq ans.

"Cette croissance devrait être portée à 60% par l'arrivée des investisseurs individuels. Si ces acteurs sont déjà très présents aux États-Unis, leur émergence s'accélère en Europe. Nous réunissons ici tous les ingrédients nécessaires au succès de cette croissance. L’IPEM est la première pierre", se réjouit le CEO et Managing Partner de l'IPEM qui identifie deux leviers pour mener à bien cette révolution : l’éducation du marché et l’usage plus systématique de technologies pour gérer cette multitude d'investisseurs individuels.

Pour Antoine Ganancia cette tendance s’explique aussi par l'apparition de nouveaux outils et applications.  “On assiste à une évangélisation qui a ouvert l'épargne des générations de 30 à 40 ans vers des produits boursiers, ce qui est un pas vers la démocratisation du capital-investissement. Historiquement, il n'était pas facile d'avoir accès à des fonds de capital-investissement sans un investissement minimum élevé, mais aujourd'hui, avec la performance croissante des fonds et une meilleure distribution, on commence à voir un changement significatif dans ce domaine»

Une démarche astucieuse 

La France se positionne comme pionnière dans la démocratisation du private equity en Europe. Premier marché du non-coté sur le continent, elle bénéficie de la présence de grands investisseurs et de sociétés de gestion majeures. Cette avance s'explique notamment par le dynamisme des sociétés de gestion, l'engagement des assureurs-vie et les récentes évolutions réglementaires, comme la loi Industrie Verte, qui facilitent l'accès à cette classe d'actifs. À l'IPEM, elle donne le ton. 

Pour préparer l'industrie à cette nouvelle ère où le private equity devient plus accessible et adapté à une clientèle plus large, un riche programme de conférence met en lumière les défis et les opportunités liés à cette démocratisation, notamment en termes de produits, de liquidité, de transparence et de technologie.  

"Nous faisons face à une démocratisation de l'accès à l'information sur ce type d'activité. C'est une démarche assez astucieuse de la part de l'IPEM d'avoir mis en avant cette évolution. Il s'agit d'une approche pédagogique ; une manière de signaler aux acteurs que nous sommes que ce public commence à s'impliquer dans les opérations", analyse Guillaume Vitrich, associé au sein du cabinet d’avocats White & Case LLP. 

Ben Maurel se réjouit aussi de leur intégration : “C’est une très bonne idée. Contrairement aux institutionnels qui peuvent être influencés par des politiques, les investisseurs ont leur propre agenda. Ils sont aussi sans doute plus proches des VCs pour avoir eux-mêmes été souvent entrepreneurs.” 

Avec la promesse d’une distribution toujours plus large et d'un terrain de jeu toujours plus grand, l'IPEM 2025 se veut être un événement crucial, reflétant les transformations profondes du secteur du capital-investissement. Les participants encore présents aujourd’hui y exploreront les innovations dans les transactions, l'élargissement de l'univers d'investissement au-delà du capital-investissement traditionnel, et les opportunités liées à la démocratisation du secteur, mais aussi les projets à caractère environnemental, autour des nouvelles technologies qui impliquent généralement les startups, une composante essentielle de l'écosystème du capital-investissement représenté à l'événement.