Après quatre jours intenses, la ruche du CES de Las Vegas s’arrêtera de fourmiller dans quelques heures. Avec près de 4 800 exposants, le salon américain XXL a une nouvelle fois offert une large palette d’innovations développées aux quatre coins du monde. Maddyness a passé la semaine à Las Vegas et sillonné de long en large les allées du CES. Il est donc temps de vous dire ce qu’on a pensé de ce que l’on a vu dans la capitale mondiale du divertissement.
Sans surprise l’intelligence artificielle a encore été la grande star de cette grand-messe de la tech, mais les organisateurs et certaines sociétés pensent déjà à la prochaine grande transformation technologique, à savoir l’informatique quantique. «Le quantique va permettre tant de choses qui n’ont jamais été faites auparavant», estime ainsi Gary Shapiro, le patron du CES. Dans ce contexte, plusieurs acteurs du secteur étaient de la partie, à l’image de la pépite française Quandela.
L’IA, un tremplin pour la robotique
En attendant la révolution du quantique, celle de l’IA générative bat son plein. Dans les allées du salon américain, l’IA a été mangée à toutes les sauces. Mais comme elle est désormais incontournable, elle est maintenant perçue, à juste titre, comme un socle technologique, au même titre qu’internet, et non plus comme une verticale. Une avancée qui n’est pas anodine, alors que l’essentiel des exposants se targuant de faire de l’IA l’an passé s’étaient seulement contentés d’intégrer ChatGPT à leurs solutions. «Dans l’IA, il y a plein de choses dingues, les gens ont beaucoup évolué. On assiste désormais à une guerre des chapelles dans le secteur, avec ChatGPT, Copilot, Alexa…», observe Florent Roulier, Manager Innovation chez Niji, cabinet de conseil dédié à la transformation numérique des entreprises et des organismes publics.
Dans ce contexte, la keynote de Jensen Huang, l’emblématique patron de Nvidia, a été un gros temps fort de CES 2025, à la veille de l’ouverture officielle du salon américain. A cette occasion, il a notamment partagé sa vision de l’intelligence artificielle, de son évolution et de l’impact sur les différents pans de l’économie. D’après le dirigeant d’origine taïwanaise, l’intelligence artificielle est aujourd’hui au stade «génératif».
Deux autres évolutions, moteurs de révolutions industrielles, nous attendent encore : l’ère des agents IA ou «agentic AI», et, enfin, le moment de la «physical AI». L’entreprise américaine définit cette dernière de la manière suivante : «elle permet aux machines autonomes telles que les robots et les voitures auto-conduites de percevoir, de comprendre et d'effectuer des actions complexes dans le monde réel (physique).»
Cette ère à venir de l’IA physique commence d’ores et déjà à s’amorcer avec une thématique robotique qui monte en puissance au CES. Nvidia se positionne sur le sujet, en travaillant sur des robots humanoïdes, mais aussi des entreprises, comme Enchanted Tools, startup tricolore qui avait reçu la visite de Satya Nadella sur son stand il y a un an, ou Pollen Robotics. A noter qu’Enchanted Tools a d’ailleurs retenu l’attention de Nvidia, qui a mis en avant la société de Jérôme Monceaux dans la vidéo d’introduction de sa keynote. Wandercraft, startup spécialisée dans les exosquelettes, a également eu cet honneur. Une belle reconnaissance pour nos Frenchies !
La France (presque) en bande organisée
Dans l’ensemble, ces derniers étaient un peu moins nombreux cette année (110 startups, contre 135 en 2024), mais ils étaient toujours bien visibles à l’Eureka Park. Parmi les jeunes pousses tricolores présentes, 80 % ont découvert le CES pour la toute première fois. A noter que le Pavillon France faisait (enfin) l’objet cette année d’une répartition sectorielle des startups, et non plus régionale. Les Américains n’étant généralement pas les meilleurs quand il s’agit de placer la France sur une carte, inutile de dire que c’est encore pire s’ils doivent tenter de trouver les régions de notre pays… Seule la région Auvergne-Rhône-Alpes a voulu faire bande à part avec un stand imposant réunissant toutes ses startups.
Trois secteurs ont été mis à l’honneur : la santé, la greentech et la mobilité. Dans la santé, Withings a une nouvelle fois fait preuve d’originalité en présent l’Omnia, un miroir connecté futuriste pour surveiller sa santé au quotidien depuis son domicile. Ce n’est pour l’instant qu’un concept, mais il donne une idée de ce que pourrait être la santé de demain d’ici quelques années. L’ère de médecine prédictive se rapproche un peu plus chaque année et le CES confirme cette tendance. A noter que le secteur de la santé représentait un quart des startups présentes sur le Pavillon France à l’Eureka Park.
Parmi les tendances majeures de ces CES 2025, on notera un retour en force des lunettes connectées. «C’est vraiment la grande tendance de cette année», souligne Arnaud Auger, directeur général adjoint du C.Lab, un service de conseil pour faire le lien entre les corporates et les pépites tech du monde entier lancé par Cathay Innovation depuis San Francisco. Alors qu’elles semblaient avoir été jetées aux oubliettes, les lunettes connectées reviennent avec de belles ambitions pour les acteurs qui les proposent. Le partenariat de long terme entre Meta et EssilorLuxottica, propriétaire de la marque Ray-Ban, en a été l’illustration l’an passé. Au CES, les lunettes présentées par Xreal proposent notamment une expérience immersive assez bluffante.
La keynote de Delta dans la Sphère, une expérience unique
Bluffante, c’est aussi comment on pourrait décrire la toute première keynote de l’histoire du CES dans la fameuse Sphère de Las Vegas. C’est Ed Bastian, le directeur général de Delta Air Lines, qui s’est collé à cet exercice périlleux. Au vu du potentiel d’une salle atypique comme la Sphère, il ne fallait pas faire les choses à moitié pour être à la hauteur. Et force de constater que le contrat est réussi. Nous avons assisté à cette keynote et nous en avons pris plein les yeux !
Pour y parvenir, Delta Air Lines a conçu la keynote comme un vol à bord de l’un de ses avions. Ainsi, l’écran géant de la Sphère a mis en scène un décollage, avec des vibrations envoyées dans les sièges pour rendre l’expérience très immersive.
Durant ce vol virtuel, Ed Bastian a mis les petits plats dans les grands, en invitant notamment sur scène Tom Brady, légende vivante du football américain, et Dara Khosrowshahi, le directeur général d’Uber. Ce dernier a joué le jeu, en invitant un chauffeur Uber Eats à entrer dans la salle pour livrer le café préféré du dirigeant de Delta Air Lines sur scène. Un café que toute la salle a pu sentir grâce aux odeurs diffusées dans toute la Sphère.
Bref, c'était un show hors normes pour permettre à Ed Bastian de livrer sa vision du voyage de demain. Et cerise sur le gâteau, Lenny Kravitz a conclu l’événement par un showcase d’une demi-heure. Définitivement, cette keynote fera date dans l’histoire du CES !
L’automobile en perte de vitesse face au retour du salon de Détroit
Enfin, le salon américain est toujours un rendez-vous majeur pour des poids lourds de la tech comme LG, Samsung, Sony ou encore Hisense. Pionnier dans les télévisions transparentes, LG a encore impressionné cette année, tandis qu’on a même vu un téléviseur waterproof et résistant aux températures extrêmes présentés la marque Sylvox. De son côté, Sony proposait une nouvelle fois de découvrir sa voiture Afeela, conçue avec Honda. On connaît enfin son prix : 89 900 dollars minimum ! Elle devrait prendre la route sur le plan commercial en 2026.
On a pu voir de nombreux véhicules insolites tournés vers le futur au CES, notamment au West Hall, qui propose une sorte de salon auto au sein du salon tech américain. Néanmoins, il y a eu peu de nouveautés dans l’automobile cette année, conséquence sûrement du retour du salon de Détroit dans la foulée du CES (10-20 janvier). «L’automobile est un peu en perte de vitesse, il n’y a rien d’incroyable. On est plutôt sur des annonces de lancement de marché cette année. Ça se concrétise mais ce n’est pas au service du commun des mortels. Les voitures proposées sont très chères. Parfois, on se demande si ce n’est pas un salon de millionnaires sur le volet des mobilités. En revanche, c’est très axé sur les pays en voie de développement dans la santé», remarque Florent Roulier.
Le CES obligé de se réinventer pour conserver son attractivité
Dans l’ensemble, ce CES 2025 aura confirmé la toute puissance de l’IA à l’heure actuelle sur la scène tech. Mais l’émergence de tendances fortes autour de l’informatique quantique et des lunettes connectées sera intéressante à suivre l’an prochain. Après la keynote de Delta Air Lines dans la Sphère, on a hâte d’être au CES 2025 pour voir quelle est l’entreprise qui prendra le risque de s’y produire.
A l’heure où le monde entier est confronté à des mutations technologiques sans précédent, il est intéressant de voir comment le CES arrive à se réinventer face à une concurrence de plus en plus intense (VivaTech, Gitex, IFA…). Et dans ce cadre, la Sphère est un atout non-négligeable dans la démesure de Las Vegas.
Bref, vivement le CES 2025 !