Régulièrement sollicité par ses clients pour résoudre les problèmes qu’ils rencontrent avec leur électroménager alors qu’il travaillait dans le secteur des portails, Geoffroy Malaterre a saisi dès le milieu de la dernière décennie, les enjeux de réparabilité de ces appareils du quotidien. “À ce moment-là, les fabricants intimaient leurs clients de ne surtout pas s’aventurer à réparer eux-mêmes leurs appareils sous peine de se blesser ou de voir tomber leur garantie. Quant aux distributeurs, ils préconisaient systématiquement une extension de garantie assurant que la panne surviendrait à coup sûr au-moment où s'arrêterait celle du constructeur. J'ai pour ma part réalisé que la réparation était plus simple qu'il n'y paraît, explique Geoffroy Malaterre avant de poursuivre, Selon l'ADEME, le principal frein est le coût : lorsque le prix de la réparation dépasse 30 % de celui d'un appareil neuf, les consommateurs y renoncent. Or, le coût d'une réparation est essentiellement lié au coût de la main-d'œuvre."

Fort de ce constat, il crée en 2017 la startup Spareka. Contraction de Spare pour pièce détachée et d’Eureka, son ambition est alors d’inciter les consommateurs à réparer plutôt que de jeter leurs électroménagers. Initialement axé sur la vente en ligne de pièces détachées, Spareka a rapidement compris l'importance d'accompagner les utilisateurs tout au long du processus de réparation, du diagnostic à la mise en œuvre. ”Nous avons été les premiers à proposer des tutoriels détaillés pour aider les utilisateurs à réparer eux-mêmes leurs appareils. Nous avons débuté avec des textes et des images, inspirés du modèle d'iFixit. Rapidement, nous avons compris le potentiel des vidéos et développé de nouveaux formats qui ont séduit un large public. Nous sommes désormais la première chaîne de réparation sur YouTube avec près de 1300 tutoriels gratuits, 315 000 abonnés et jusqu'à 1,5 million de vues par mois. Tout ce travail a permis de démystifier la réparation, en montrant qu’une machine à laver était tout au plus composée de 10 modules connectés les uns aux autres et assez simples à appréhender.”

L’évolution bienvenue du business modèle

Le dernier baromètre SAV Darty l'affirme : dans 70 % des cas, il est possible de réparer son électroménager en panne sans pièce détachée. Une réalité confirmée par le fondateur de Spareka : “Dans seulement 30 % des cas, après avoir guidé nos clients vers l'origine de leur panne et identifié la pièce à remplacer, ils finalisent leur achat sur notre plateforme, qui sert à la fois de marketplace avec des pièces neuves ou reconditionnées- où nous prenons une commission sur les pièces de distributeurs que nous vendons - et de boutique en ligne pour nos propres stocks de pièces. Nous sommes la première plateforme de pièces détachées reconditionnées en Europe. C’est important pour le consommateur final qui cherche avant tout des pièces de qualité, délivrées rapidement et à moindre coût. Nous couvrons l'ensemble des besoins en pièces détachées pour tous les appareils de la maison."

Guidée par son intuition, Geoffroy Malaterre a anticipé dès 2019 l'évolution de ses services pour répondre aux besoins de ceux qui hésitent à se lancer dans la réparation eux-mêmes. “Nous avons créé une plateforme qui permet la mise en relation entre les clients qui hésitent à se lancer et des techniciens qui, à travers une visio conférence - les guident- pas à pas, explique Geoffroy Malaterre avant de poursuivre, Évidemment, la crise sanitaire, marquée par des confinements, une augmentation significative des difficultés à réparer les pannes d'électroménager et la démocratisation de la visioconférence ont été un véritable accélérateur pour notre activité.”

Et c’était sans compter sur la loi AGEC qui, promulguée en 2021, entend remettre l’économie circulaire au centre de l’économie et surtout l’entrée en vigueur en décembre  2022 du bonus réparation, un système pensé par l'État pour voir diminuer le coût de la réparation pour le consommateur. “Ce dispositif financé par une éco-taxe intégrée au prix d'achat des appareils, permet aux particuliers de bénéficier d'une réduction directe sur le coût de leurs réparations. Plutôt que de payer 100 euros la réparation de votre four, vous ne la paierez que 50 € et le réparateur ira récupérer la différence auprès de l’éco-organisme.”

Depuis 8 mois, Spareka propose à ses clients de bénéficier - sous réserve de voir le dit appareil parfaitement fonctionnel - de ce bonus réparation qui leur permet d'annuler le coût de leur visioconférence avec un technicien. “Nous sommes ensuite payés par les éco-organismes si, et seulement si, la machine est réparée. Pour s’en assurer, les éco-organismes se rapprochent des clients, explique Geoffroy Malaterre, nous avons multiplié par dix le nombre de visioconférences réalisées entre 2023 et 2024, atteignant ainsi les 100 000 visios. Ce service, partiellement pris en charge, encourage de plus en plus de consommateurs à se lancer dans la réparation eux-mêmes et surtout offre une seconde vie à de nombreux appareils qui, sans ça, auraient terminé dans une décharge", explique Geoffroy Malaterre.

Pour le plus grand bonheur des assureurs qui, mis à mal par l’intensification des risques climatiques, voient en Spareka une source d’économie. “Nous travaillons de plus en plus avec eux, pour que le parcours sinistres de leur client débute par un parcours réparation avec une visio”, se réjouit le CEO. 

Une campagne de financement sur Sowefund

Avec l'ambition de faire de la réparation un réflexe, Spareka développe deux axes majeurs : un renforcement de son offre en ligne, notamment grâce au bonus réparation, et une collaboration étroite avec les assureurs pour faciliter l'accès à la réparation.

"Après avoir levé 16 millions d'euros auprès d'investisseurs tels que Demeter et la Caisse des Dépôts de 2020 à 2023, Spareka lance une campagne de financement participatif sur Sowefund pour accélérer sa croissance. L'objectif ? Impliquer sa communauté de près d'un million de clients dans son projet de démocratiser la réparation en proposant des outils, des conseils et un vaste choix de pièces détachées. En investissant, nos clients deviendront les ambassadeurs de la réparation au quotidien", explique le CEO. 

Cette campagne devrait être complétée par une levée auprès d'institutionnels pour un montant total de 2,5 millions d’euros. Ces fonds seront  investis dans le développement de nouveaux partenariats stratégiques avec les assureurs et les distributeurs, afin de rendre la réparation accessible à un plus grand nombre. "Notre chiffre d'affaires devrait passer de 10 millions d'euros en 2024 à 26 millions d'euros en 2028", rappelle Geoffroy Malaterre. 

Pour devenir investisseur et contribuer à la démocratisation d’économie circulaire, c’est par ici.