S’implanter aux États-Unis représente un véritable tournant pour une startup française, notamment lorsqu’il s’agit de définir la politique salariale. Entre le coût de la vie, la structure des packages de rémunération et la fiscalité locale, les différences avec la France sont nombreuses et souvent sous-estimées. 

Lorsqu’un fondateur ou un salarié s’expatrie, son salaire est souvent recalibré via le COLA (Cost of Living Abroad). « Ce réajustement permet de compenser les différences de coût de la vie entre la France et les États-Unis. À New York City, par exemple, un dirigeant père de famille avec un salaire de 100 000 € et 150 000 € en France, peut atteindre 500 000 $ pour maintenir son niveau de vie », illustre Jacques Corre, Senior Manager chez Orbiss.

Des fondateurs souvent sous-payés au départ

Contrairement à la France, où un salaire minimum est généralement fixé dès le lancement, les fondateurs américains acceptent souvent de commencer avec une rémunération très faible, voire inexistante. « C’est une question de priorités, les fonds levés sont d’abord alloués au recrutement des talents stratégiques. Le fondateur, lui, peut commencer avec de l’equity uniquement », explique Jacques Corre.

En effet, dans les premiers temps, il n’est pas rare que les employés clés soient mieux rémunérés que les fondateurs. C’est particulièrement vrai pour les postes critiques tels que Chief Technology Officer (CTO) ou le Vice-President Sales. « Ces talents sont rares et chers, ils sont difficiles à recruter et à retenir », insiste Thibault Lunardelli, Senior Manager Tax chez Orbiss.

Cependant, cette sous-rémunération initiale des fondateurs évolue. À mesure que la startup lève des fonds, les fondateurs ajustent leur salaire pour l’aligner sur les standards du marché. « En France, cette évolution est souvent capée. Aux États-Unis, elle peut être bien plus significative », commente Jacques Corre. « Aux États-Unis, le salaire sert surtout à assurer un quotidien confortable. Pour un fondateur, la véritable richesse ne peut se créer qu’avec une plus-value à la cession de son entreprise », ajoute Thibault Lunardelli. 

Fiscalité américaine : des subtilités à ne pas négliger

La fiscalité américaine représente un défi de taille pour les entreprises étrangères. « Le système est plus complexe qu’il n’y paraît », souligne Thibault Lunardelli. En plus de l’impôt fédéral (allant de 10 à 37 %), chaque État applique sa propre taxation. En Californie, cette surtaxe peut atteindre les 12 %. « Ce double niveau d’imposition peut surprendre les fondateurs français, habitués à un système unifié », poursuit-il. Cependant, certains états comme le Texas ou la Floride n’imposent pas d’impôt sur le revenu, offrant un cadre fiscal plus avantageux.

La fiscalité n’est pas le seul élément à varier d’un état à l’autre, le coût de la vie est aussi un élément qui doit être pris en compte dans le salaire. À Austin, au Texas, le coût de la vie est quasiment divisé par deux par rapport à Los Angeles ou New York. « La situation familiale doit aussi être considérée. À l’école française de New York, une année scolaire coûte 50 000 $ quand elle coûte 25 000 $ à Austin. Ce sont des différences majeures dont les entreprises doivent tenir compte pour fixer les salaires », insiste Jacques Corre.

Une planification rigoureuse pour éviter les écueils

Face à ces défis, une bonne préparation est essentielle. « Nous conseillons toujours aux startups de réaliser des simulations précises avant de s’implanter », partage Jacques Corre. Ces simulations incluent des estimations de packages salariaux, prenant en compte le coût de la vie, les avantages fiscaux et les charges sociales spécifiques à chaque État.

Les erreurs les plus fréquentes ? Sous-estimer les coûts réels et négliger les disparités locales. « Certains fondateurs veulent s’implanter directement à New York, à Chicago et en Californie sans évaluer le budget nécessaire. Pourtant, à moins d’avoir levé des fonds conséquents, s’implanter dans ces régions en simultané est souvent hors de portée », avertit Thibault Lunardelli.

Enfin, au-delà du salaire, il faut travailler sa politique salariale globale. Dans ce cadre, les avantages en nature comptent énormément puisque aux États-Unis, le salaire de base ne représente qu’une partie du package global. « L’assurance santé, par exemple, est un must-have pour toute entreprise compétitive. Sans cela, il sera quasiment impossible d’attirer des talents », souligne Thibault Lunardelli. Là encore, les coûts varient selon la situation familiale.